Telemann da camera : deux nouvelles parutions

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Georg Philipp Telemann (1681-1767) : Sonates en trio pour flûte à bec, dessus de viole et basse continue en fa majeur TWV 42:F6, en ut majeur TWV 42:C2, en sol mineur TWV 42:g9, en ré mineur TWV 42:d7. Sonate en trio pour flûte à bec, basse de viole et basse continue en fa majeur TWV 42:F3. Quatuor en sol majeur pour flûte de voix, deux basses de viole et basse continue TWV 43:G10. Suite en fa majeur pour chalumeaux alto et ténor et deux violes TWV 44:6/55:F2. Erik Bosgraaf, flûte, chalumeau. Carl Rosman, chalumeau. Lucile Boulanger, Robert Smith, dessus et basse de viole. Alessandro Pianu, clavecin, orgue. Juillet 2020. Livret en anglais, allemand. TT 56’42. Brilliant 96393

Georg Philipp Telemann (1681-1767) : Moralische Kantaten : Die Zeit ; Das Glück ; Der Geiz ; Die Falschheit TWV 20:23, 25, 26, 27. Fantaisies en si majeur, fa mineur, ut mineur, ré majeur TWV 40:14, 16, 26, 27. Bettina Pahn, soprano. Joachim Held, luth. Juliane Laake, viole de gambe. Carsten Lohff, clavecin. Septembre-octobre 2020. Livret en allemand, anglais. TT 63’11. Hänssler HC21008

Après ses albums chez Brilliant consacrés aux douze Fantaisies solo, aux sonates (avec le clavecin de Francesco Corti), aux suites, concertos et double-concertos, après son album de sonates en trio avec violon pour le label Berlin Classics, Erik Bosgraaf poursuit son exploration des œuvres que Telemann écrivit pour la flûte à bec. Les sonates en trio de ce nouveau CD proviennent du recueil Essercizii musici et du manuscrit de Darmstadt. La notice de Thiemo Wind annonce que le disque regroupe toutes celles dans lesquelles la flûte à bec est accompagnée par l’une ou l’autre des violes (dessus et basse). Exact, quitte à exclure certains opus avec violon (comme les 42:d10, 42:a1 ou 42:a4), un instrument qui certes diffère dans son mode expressif si l’on en croit le Traité (Paris, 1687) de Jean Rousseau cité dans le livret. Le programme inclut aussi le quatuor à deux basses de viole TWV 43:G10 (il en existe un autre dans la même tonalité, non joué ici) conçu pour traversière et exécuté par Erik Bosgraaf à la flûte de voix en ré, évitant la transposition.

Ce florilège se conclut par le TWV 44:6/55:F2 que le catalogue du compositeur classe à la fois comme quintette (pour l’effectif) et Suite (pour la forme en six parties enfilant des airs de danse). L’alliance de la sonorité crémeuse des chalumeaux avec les « violettas » (ici tenues par les violes) rappelle le goût de Telemann pour les configurations inventives. Le tour galant n’échappe pas aux interprètes qui, par ailleurs, nous livrent d’impeccables lectures, équilibrées autant qu’expressives. L’exécution de la sonate en fa majeur rappelle l’excellent enregistrement par Sébastien Marcq (Astrée, octobre 1994). Sans oublier les ingrédients pittoresques qui émoustillent le finale de la sonate en ré mineur, et surtout celui de la sonate en sol mineur (plage 14), sommet de l’album : l’imagination, l’astringente pugnacité de l’équipe y font des étincelles.

Un peu fourre-tout, cet album qui mêle cantates de chambre et des transcriptions instrumentales en duo ou solo ? Voici quatre des six Cantates Morales, où la dénonciation des vices (l’Avarice, l’Hypocrisie…) se contrebalance par la vertu. Manquent Die Hoffnung et Die Grossmut (l’Espérance, la Générosité) : pourquoi les avoir écartées alors qu’il restait de la place sur le disque ? Dommage aussi que le livret du CD n’en inclue pas le texte.

Le versant instrumental du programme convoque deux des douze Fantaisies pour basse de viole TWV 40:26-37 redécouvertes en 2015 à Osnabrück, et deux des douze Fantaisies pour violon TWV 40:14-25, ici déclinées au luth, lequel s’avère « capable de présenter les phrases polyphoniques plus clairement, et surpasse naturellement le violon en terme de façonnage harmonique » selon les mots de Joachim Held. Au demeurant, cet ancien élève d’Eugen Dombois et Hopkinson Smith en propose une fine lecture. L’archet de Juliane Laake sculpte avec verdeur les deux pièces qui lui échoient.

Dans une veine archaïsante, cordes pincées et viole se partagent le chiffrage de l’accompagnement des pages vocales, servies avec caractère par la soprano thuringeoise, qui s’investit particulièrement dans le répertoire germanique, de Buxtehude au lied romantique. L’acoustique ajustée de l’Erlöserkirche de Vahrendorf nimbe la voix d’une délicate réverbération sans compromettre le ton direct de ces moralités, qui ici nous parlent sans détour ni joliesse.

Brilliant : Son : 8,5 – Livret : 8 – Répertoire : 8-9 – Interprétation : 9,5

Hänssler : Son : 8 – Livret : 5 – Répertoire : 8 – Interprétation : 8,5

Christophe Steyne

 

 



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