Sturm und Drang au Conservatoire

par

Joseph Haydn : Symphonies 64 et 45 - Carl Philippe Emanuel Bach : Concerto pour flûte et orchestre, Wq 22 - Johan Christian Bach : Symphonie op.6/6
Les Agrémens, Guy van Waas, direction – Anne Freitag, flûte

Autour de la thématique du « Sturm und drang », Les Agrémens et Guy van Waas ont proposé lundi un programme particulièrement dynamique agrémenté de touches comiques au Conservatoire Royal de Bruxelles. Commençant par la Symphonie n°64, un sommet du répertoire, quelques soucis de justesse et de mise en place perturbent très légèrement le premier mouvement. Sur instruments anciens et surtout avec un effectif restreint (cordes, deux hautbois, deux cors), on peut aisément comprendre l’adaptation indispensable qu’il aura fallu aux musiciens dans cette salle du Conservatoire. Dès le second mouvement (lent) arriveront précision, justesse, phrasés exceptionnels et authenticité des nuances. Le Menuet sera charmant sous l’impulsion du chef à l’écoute et toujours souriant. Le Presto final marque les esprits par la minutie des coups d’archets en adéquation avec les vents. Après cette belle ouverture, Anne Freitag (née en 1986 et dont la carrière est déjà fulgurante) a proposé une lecture très personnelle du Concerto pour flûte Wq 22 de Carl Philippe Emanuel Bach. Si à certains endroits la soliste semble être étouffée par l’orchestre, notamment par le clavecin, elle protègera toujours sa conception de l’œuvre avec intelligence. Certainement pas l’instrument le plus puissant de l’époque, la justesse et la finesse des attaques sont éclatantes. Très sobre, elle se fond dans la masse orchestrale particulièrement dynamique ici. Excellente technique pour ce qui est des parties lentes où le discours ne s’interrompt jamais. Phrasé conduit et construit avant un troisième mouvement brillant. Virtuosité éclatante pour ce dernier mouvement où la concentration mena le concerto à bien. Après la pause, la Symphonie op. 6/6 de Johann Christian Bach pour le même effectif que Haydn, débute avec énergie et précision. L’orchestre est davantage à l’aise ici, toujours sous la battue dansante de Guy van Waas. Le mouvement lent propose de beaux mélismes teintés d’accents dramatiques. Le parcours harmonique, déjà moderne pour l’époque, est traité avec réflexion et le public se laisse entraîner dans un moment de pure émotion. Le dernier mouvement, comme une envolée rythmique et dynamique conclut cette symphonie avec brio. Notons l’extrême attention des musiciens entre eux, permettant ainsi une parfaite cohésion. Arrive enfin la Symphonie n°45 de Haydn. Seule symphonie du 18ème siècle écrite en fa# mineur, elle a la particularité de voir les musiciens partir les uns après les autres pendant le dernier mouvement. Le premier mouvement, dramatique regorge ici de dynamiques où le chef n’hésite pas à accentuer certains contretemps dans les violons II. Parfaitement conduits, les cordes proposent un jeu précis sans vibrato inutile au travers d’inflexions parfois plus calmes. L’Adagio qui suit est plaisant avec une continuité saisissante comme le Menuet. Le Finale retrouve toutes les dynamiques du premier mouvement dans un style un peu plus léger avant de conclure sur une touche d’ironie. Comme bis, Guy van Waas propose, toujours ironiquement les dernières notes des deux violons solos, seuls instruments à être restés sur scène.
Très belle performance donc des Agrémens, un ensemble particulièrement attentif au style et l’écoute au sein de l’orchestre.
Ayrton Desimpelaere
Conservatoire Royal de Bruxelles, le 27 janvier 2014

Les commentaires sont clos.