Anna Besson illumine les concertos pour flûte de Mozart

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concertos pour flûte et orchestre n° 1 en sol majeur KV 313 et n° 2 en ré majeur KV 314 ; Concerto pour flûte et harpe en do majeur KV 299. Anna Besson, flûte ; Clara Izambert, harpe ; A Nocte Temporis, direction Reinoud Van Mechelen. 2023. Notice en français, en anglais et en allemand. 69’ 19’’. Alpha 1115.
C’est à Mannheim, où il rencontre en fin d’année 1777 le flûtiste Johann Baptist Wendling (1723-1797), musicien à la Hofkapelle locale, que Mozart répond à une commande du fortuné Ferdinand Dejean (1731-1797), qui se concrétisera par deux concertos et trois quatuors. La notice de Nicolas Derny rappelle la lettre écrite à Léopold par son fils en février 1778, dans laquelle Wolfgang fait état de son peu d’attrait pour la flûte. Cette réticence n’empêche pas de constater, à l’audition des deux concertos KV 313 et 314 qui rivalisent de finesse et d’élégance, de subtilité et virtuosité, que son génie créateur n’a pas failli en la circonstance. La flûtiste française Anna Besson (°1988), formée à Perpignan, Versailles, Genève et Paris, et professeur de traverso au Conservatoire flamand de Bruxelles et à Amsterdam, propose une version éblouissante de ces délicieuses partitions, auxquelles est joint, en toute logique, le Concerto pour flûte et harpe, composé à Paris pour le duc de Guines, qui en passa commande à Mozart en mars 1778 pour pouvoir l’interpréter avec sa fille Marie. C’est une autre Française, la harpiste Clara Izambert, une élève de Marielle Nordmann, qui est la complice idéale d’Anna Besson pour ce KV 299 plein de verve et de dynamisme.
Dans les deux concertos où la flûte est soliste, Anna Besson déploie un jeu souple et racé au sein duquel le chant de l’instrument ne cesse de dialoguer idéalement avec A Nocte Temporis, ensemble qu’elle a fondé en 2016 avec Reinoud Van Mechelen, qui le dirige ici avec un sens de l’équilibre et de la précision qui sert d’écrin au bijou qu’est la prestation de la soliste. On se régale avec les traits virtuoses de l’Allegro maestoso du KV 313, le climat si tendre et si pur de son Adagio non troppo, et le côté brillant du Rondo final.
Même bonheur dans le KV 314, transposition en ré d’un antérieur concerto pour hautbois, qui est parcouru par une grâce discrète, non exempte de mélancolie dans l’Andante ma non troppo central, qui laisse rêveur. Le son d’Anna Besson est clair et souligne toute la poésie du propos, il inscrit dans l’espace des harmonies d’une absolue fraîcheur dont on se régale, car l’ensemble A Nocte Temporis, dirigé par Reinoud Van Mechlene, est au diapason.
Partenaire idéale d’Anna Besson pour le Concerto pour flûte et harpe, Clara Izambert allie elle aussi la grâce et la subtilité au raffinement, qui atteint un sommet dans le pastoral Andantino central, dans une atmosphère diaphane qui laisse planer comme un parfum de rêve éveillé. Excellente idée d’avoir, dans le programme, placé ce concerto entre les deux consacrés à la flûte seule. Le charme agit tout au long d’un parcours à marquer d’une pierre blanche, proche de l’enchantement et qui enrichira toute discothèque mozartienne.
Son : 9 Notice : 10 Répertoire : 10 Interprétation : 10
Jean Lacroix