Deux beaux artistes en ce bel après-midi

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Ce mercredi après-midi, c'était le tour des K. 466 et 467 de Mozart dont on n'arrive pas à se lasser. Le Coréen Hans H. Suh ouvrait la séance en présence de la Reine Mathilde et de l'un des petits Princes.

Hans-H. Suh
Hans-H. Suh
Denis Zhdanov
Denis Zhdanov

Le pianiste a 25 ans, il a travaillé à la Columbia University, dans un programme d'échange avec la Juilliard School, avec Emanuel Ax (7e Prix du Concours Reine Elisabeth en 1972) et Matti Raekallio, avant de rejoindre la Hochschule für Musik de Hanovre où il travaille avec Olivier Gardon (6e Prix en 1975). Belle articulation, belle pulsation, belle sonorité cristalline mais les traits rapides un peu agités et bousculés. Comme ce qui s'est passé avec EunAe Lee hier soir, les intentions sont bonnes, mais la sauce ne prend pas. La vision de l'Ukrainien Denis Zhdanov est tout autre. Il est bachelier de l'Académie de Musique de Kiev, a suivi des cours de perfectionnement à Fiesole en Italie. Ses professeurs : Leonid Margarius, Eliso Virsaladze et Konstantin Lifschitz. Il a le grand mérite de vouloir faire sien le concerto, prend des risques stylistiques tels des rubati pas tellement appropriés, il abuse ci-et-là de la pédale, il joue sa propre cadence qu'il conçoit dans la résonance. L'Andante est très vécu, soutenu par une belle pulsation intérieure très intense et l'Allegro vivace assai est pris dans un tempo un "chouia" trop rapide pour être énoncé dans la sérénité. On peut ne pas être d'accord avec ses positions stylistiques mais la personnalité musicale est intéressante et son "Mozart" particulièrement attachant.

Kana Okada
Kana Okada

La pianiste japonaise Kana Okada poursuit depuis 2006 sa formation au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris où elle réside d'ailleurs. Ses professeurs : Halina Czerny Stefanska, Georges Pludermacher, Claire Désert, François-Frédéric Guy, Frank Braley et Haruko Ueda. Un panel bien français. La pièce imposée est suivie des Niais de Sologne de Rameau dans lesquels elle communique sa joie de jouer et, dans la 1ère Novelette et la 3e Improvisation en si mineur de Poulencelle se balade joyeusement dans le Paris du compositeur. Ces jolies pièces de genre sont suivies de la 2e Sonate de Prokofiev et là, les choses se gâtent. A force de ne pas prendre de temps pour changer d'atmosphère entre les différentes pièces de son répertoire, la pianiste enchaîne tout dans la même sonorité, le même type d'articulation. Mais Prokofiev n'est ni Rameau ni Poulenc. Elle terminait avec une courte pièce d'Elliott Carter, "Caténaires", où elle déploie ses qualités de virtuose.

Henry Kramer
Henry Kramer

Henry Kramer est âgé de 29 ans et nous vient des Etats-Unis. Il est bachelier et Master de la Juillard School où il a travaillé avec Julian Martin et Robert McDonald et, depuis 2014, il poursuit un doctorat avec Boris Berman à la Yale School of Music. Il donne des Tears of Light de Fabian Fiorini une vision très personnelle avec une belle urgence, écoute et concentration. Ce sont les plus beaux pppp à ffff entendus jusqu'ici. Il poursuit avec une sonate peu jouée de Haydn (la Hob. XVI:31) dans un style classique, avec naturel et fluidité. Le second moment fort de l'après-midi -après le Mozart de Denis Zhdanov- sera son interprétation de Gaspard de la nuit de Maurice Ravel, l'oeuvre redoutable que l'on sait. Un Ravel comme on aime l'entendre, le meilleur entendu jusqu'ici. L'Ondine est vivement colorée, ondoyante et souple à souhait, Gibet donne froid dans le dos et le redoutable Scarbo est livré avec une virtuosité toute naturelle. Un moment captivant de musique que le public a partagé sans détour.
Bernadette Beyne
Flagey, mercredi 11 mai après-midi 

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