Une symphonie gigogne

par

Henryk GÓRECKI
(1933-2010)
Symphonie n° 4
London Philharmonic Orchestra, dir. : Andrey BOREYKO
2016-DDD––35’ 47’’–Texte de présentation en anglais–Nonesuch 7559-79503-4

Le Polonais Henryk Górecki est un cas fort curieux. En 1992, il est contre toute attente propulsé sur l’avant-scène de la musique contemporaine, grâce à l’enregistrement de sa Symphonie n° 3 pour orchestre et soprano, écrite quinze ans plus tôt, par le London Sinfonietta sous la direction de David Zinman et la chanteuse Dawn Upshaw, sous le label californien Nonesuch. En Grande-Bretagne, le disque se vend à plus de quatre cent mille exemplaires et, dans le reste du monde, à plus d’un million. Du jamais vu. Mais il se produit alors quelque chose d’inexplicable et d’inexpliqué : Henryk Górecki ne devient pas pour autant une vedette, et toutes ses autres œuvres ne rencontrent que de l’indifférence, si ce n’est dans le petit cercle fermé des amateurs d’avant-garde. Et voilà pourquoi sa Quatrième symphonie, qui est son opus 85 et auquel il a travaillé de 2006 à 2009, avant d’être achevée par son fils, Mikolaj Górecki, n’a pas obtenu le succès planétaire de la Troisième (opus 36) et n’est guère connue des mélomanes.
Sous-titrée « Tansman Episodes », en hommage cordial à Alexandre Tansman (1897-1986), qui est natif de Lodz en Pologne, elle est divisée en quatre mouvements de longueur inégale, chaque mouvement étant lui-même divisé en plusieurs parties. C’est une sorte d’œuvre gigogne qui tient à la fois de la grande symphonie romantique (genre Anton Bruckner), de Dimitri Chostakovitch (dans ses passages empruntant à la musique populaire), d’Arvo Pärt (par son caractère parfois liturgique) et à Steve Reich (à travers ses mesures répétitives). À un moment donné, au cours du quatrième mouvement, Henryk Górecki introduit tout à coup un piano et on a l’impression qu’il se met à parodier un concerto classique avec un malin plaisir. Le tout est vivant, entraînant, ludique à souhait, espiègle, drôle. Du cousu main musical.
Jean-Baptiste Baronian

Son 9 – Livret 6 – Répertoire 8 – Interprétation 8

Les commentaires sont clos.