Du grand Andriessen

par

JOKERLouis Andriessen (° 1939)
La Commedia
Claron McFADDEN (soprano), Marcel BEEKMAN (ténor), Dutch National Opera, Asko Ensemble, Schönberg Ensemble, dir. : Reinbert DE LEEUW
2014-DDD-63’ 30’’ et 40’ 15’’-Texte de présentation en anglais-Nonesuch 7559-79590-0

Aux Pays-Bas, les Andriessen forment une importante famille de compositeurs et d’interprètes. Il y a Hendrik Andriessen, son frère Willem Andriessen, son fils aîné Jurriaan Andriessen et son fils cadet Louis Andriessen, sans conteste le plus doué des quatre. Élève de Luciano Berio à Milan de 1962 à 1963, Louis Andriessen est l’auteur d’une œuvre très personnelle et fort diverse dans laquelle figurent des partitions qu’on pourrait qualifier d’excentriques comme Reconstructie, un opéra collectif « anti-impérialiste » en 1969, De Staat pour quatre voix de femmes et vingt-sept instruments en 1975 ou Workers’Union, une pièce symphonique pour un groupe d’instruments « à sonorité puissante » [sic], la même année. Avec La Commedia, Louis Andriessen a signé ce qu’il a lui-même baptisé un « film opéra » en cinq parties, une œuvre qui a été créée au Koninklijk Theater Carré d’Amsterdam en juin 2008. On en a à présent le CD (deux disques en fait) et le DVD – un DVD magnifique réalisé par Hal Hartley et montrant avec une grande maîtrise plastique un drame basé sur des textes tirés de l’Ancien Testament, de Dante et de Vondel, et s’appuyant sur l’éternel combat entre le Bien et le Mal, entre les Cieux et les Enfers. D’ailleurs, Lucifer – un Lucifer d’autant plus terrible qu’il est en habit de gala – y joue un rôle essentiel et tient pour ainsi à bout de bras toutes les passions des personnages mis en scène et dont on est parfaitement conscient qu’ils ne sont jamais que de pauvres et pitoyables marionnettes et des âmes errantes, malgré leur soif d’amour et d’absolu (les images du film en noir et blanc sont à cet égard très significatives). Tour à tour tempétueuse, expressive, lyrique, dissonante et même sarcastique, voire triviale, la musique de Louis Andriessen fait vibrer ce drame de la première à la dernière note et lui confère une puissance devant laquelle il est bien difficile de rester insensible. Le chef Reinbert de Leeuw, qui collabore avec le compositeur depuis plusieurs décennies, y est assurément pour beaucoup. Un événement dans le riche répertoire contemporain.
Jean-Baptiste Baronian

Son 10 - Livret 10 - Répertoire 10 - Interprétation 10

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