La jeunesse à l’honneur à Bozar avec l’Orchestre Français des Jeunes et Kristiina Poska

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Bozar accueille ce mercredi 10 décembre l’Orchestre Français des Jeunes pour un concert consacré aux talents de la nouvelle génération. La formation, parmi les plus réputées d’Europe, a pour mission d’accompagner de jeunes musiciens vers les métiers d’orchestre, sous la tutelle de membres issus des plus grands ensembles français. À la baguette, Kristiina Poska, leur nouvelle directrice musicale depuis janvier 2025. Trois œuvres sont au programme : Recto de Yan Maresz, le Concerto pour piano n° 2 en fa majeur de Chostakovitch et, pour conclure la soirée, la suite symphonique Schéhérazade de Rimski-Korsakov. Le pianiste français Alexandre Tharaud est le soliste invité.

Le concert s’ouvre avec Recto de Yan Maresz. Commandé et créé en 2003 par les Ballets de Monte-Carlo, il constitue le premier mouvement d’une œuvre pour orchestre et électronique intitulée D’une rive à l’autre. Cette pièce, qui suscite l’intérêt manifeste de la cheffe estonienne, explore différents niveaux de polyrythmie ainsi que la perception du temps musical, jouant également sur l’alternance équilibre/déséquilibre. L’OFJ se distingue par une exécution ciselée et précise, nourrie d’effets marquants : pizzicatos Bartók, glissandi puissants des trombones… Kristiina Poska dirige avec clarté et rigueur, offrant une mise en bouche solide pour cette ouverture de soirée. Le compositeur Yan Maresz, présent dans la salle, monte sur scène pour recevoir les applaudissements du public et féliciter les musiciens et leur cheffe.

Place ensuite au Concerto pour piano n° 2 de Chostakovitch. Le premier mouvement, Allegro, s’ouvre avec les bois, immédiatement mis en avant par l’écriture du compositeur. Alexandre Tharaud rejoint l’orchestre avec un premier thème aux accents de marche, tandis que le second thème permet à l’OFJ et au soliste de déployer un lyrisme maîtrisé. Le célèbre Andante suspend le temps : l’élégance du jeu de Tharaud et la chaleur de l’orchestre créent un véritable moment de grâce, notamment grâce au son délicat des cordes. Le dernier mouvement, Allegro, conclut le concerto dans une atmosphère vive et entraînante. L’orchestre se montre à l’écoute, attentif, et accompagne le soliste avec finesse dans un répertoire souvent plus délicat qu’il n’y paraît. Le public salue chaleureusement cette première partie de la soirée. En bis, Tharaud nous propose  une sublime et délicate version de son arrangement du deuxième mouvement, Siciliano, de la Sonate pour flûte de Bach, BWV 1031.

Après l’entracte, place à une œuvre phare du répertoire symphonique russe : Schéhérazade de Rimski-Korsakov. Entrons directement dans le vif du sujet. L’OFJ livre une très belle interprétation de cette partition redoutable, dont les traits d’orchestre figurent parmi les plus exigeants du répertoire, que ce soit pour les cordes, les vents ou même la percussion.

Il convient d’abord de saluer plusieurs individualités. Nicolas Debart, violon solo, réalise avec brio les nombreux solos qui lui sont confiés, alliant maîtrise technique et musicalité. La qualité des autres chefs d’attaque mérite également d’être soulignée, notamment celle du premier violoncelle, remarquable dans ses interventions solistes. Mention spéciale, enfin, aux vents et à leurs solistes : leurs nombreux passages, souvent délicats, sont interprétés avec une justesse et une assurance remarquables.

Mais ces qualités individuelles ne suffiraient pas sans l’excellence collective de l’ensemble. L’orchestre fait preuve d’une homogénéité et d’une cohésion particulièrement convaincantes. La synergie entre les pupitres est manifeste, aussi agréable à observer qu’à entendre. Les cordes jouent avec un engagement constant. Les bois se distinguent par la précision de leurs interventions et l’élégance de leurs solos. Les cuivres apportent éclat et relief sans jamais forcer le trait. Les percussionnistes interviennent avec une précision millimétrée, tandis que la harpiste, parfaitement audible, enchante par la délicatesse de ses arabesques.

Il faut également souligner le travail remarquable de Kristiina Poska, qui unifie l’ensemble et insuffle une énergie communicative à cet orchestre composé de jeunes talents au seuil de leur carrière.

Après de longs applaudissements et une standing ovation amplement méritée, l’Orchestre Français des Jeunes et sa cheffe Kristiina Poska offrent une interprétation virevoltante de l’ouverture Candide de Bernstein avant de clôturer la soirée par leur traditionnelle « banda ».

Bruxelles, Bozar, le 10 décembre 2025

Thimothée Grandjean

Crédits photographiques : DR

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