Martin James Bartlett, apothéose de la danse
Le pianiste Martin James Bartlett consacre un album à des œuvres françaises réunies sous le thème de la danse. Sous ses doigts, Rameau, Ravel, Couperin, Debussy et Hahn, virevoltent dans une chorégraphie musicale stylée, cultivée et éclatante. A l’occasion de la parution de cet album majeur (Warner), Crescendo-Magazine est heureux de s’entretenir avec ce brillant musicien aussi créatif que fédérateur.
Pourquoi avez-vous décidé de consacrer un album aux partitions de danse française ? La danse reflète-t-elle l'esprit français ?
Pour moi, la danse est l'une des racines de toute la musique classique. Ce flux essentiel, ce mouvement, ascension et ce sens de la collaboration multiple que l'on trouve dans la danse sont également présents dans toute la musique. En tant qu'amateur de ballet, je voulais explorer davantage cette forme d'art et le monde français de la danse est rempli à ras bord de musique absolument exquise.
Comment avez-vous sélectionné les partitions, compte tenu de leur grande diversité, de Rameau et Couperin à Debussy et Ravel ?
Les deux premières œuvres que j'ai explorées sont la Gavotte et la Double de Rameau ainsi que La Valse de Ravel. J'ai adoré les programmer en récital, en commençant par le baroque et en terminant par cette valse d'avant-garde si contrastée ! Cela m'a amené à réfléchir à toute la belle musique française entre les deux, et m'a conduit en particulier au monde merveilleux de l'impressionnisme musical. Je voulais également faire le lien entre l'ère baroque et le XXe siècle et j'ai trouvé que le Tombeau de Couperin de Ravel convenait parfaitement. L'œuvre fusionne admirablement ces époques et ces styles musicaux totalement différents et crée un contour harmonieux tout au long de l'album.
Est-ce un peu provocateur, à l'heure de l'authenticité fondamentaliste du texte, de jouer Rameau et Couperin sur un piano contemporain ?
J'ai toujours été d'avis que les développements instrumentaux, du clavecin au piano à queue de concert d'aujourd'hui, auraient été bien accueillis et auraient inspiré les compositeurs. Nous savons, grâce à de nombreuses lettres et communications, que de nombreux musiciens souhaitaient faire avancer le processus de conception et d'ingénierie des instruments. Cependant, même en gardant cela à l'esprit, je tiens à rester aussi fidèle que possible à l'instrument pour lequel il a été conçu à l'origine. Dans le cas du Rameau en particulier, j'ai recherché de nombreux enregistrements de clavecin et j'ai essayé d'intégrer un peu de ce monde sonore dans cet enregistrement, tout en utilisant les avantages de la richesse sonore qu'un instrument moderne peut offrir.
Avec Alexandre Tharaud, vous interprétez les rares Décrets indolents du hasard de Reynaldo Hahn. Comment avez-vous découvert cette partition ?
J'avais déjà interprété quelques chansons de Hahn et son écriture me plaisait beaucoup, mais c'est Alexandre lui-même qui m'a fait découvrir ces œuvres stupéfiantes. Lorsque j'ai commencé à concevoir ce projet d'enregistrement, je lui ai demandé conseil et il m'a orienté vers ce merveilleux univers sonore. Je savais aussi que je voulais enregistrer avec lui en tant que collaborateur et je suis ravi que cela ait été possible !