Scarlatti père et fils dans un récital entremêlé de cantates et sonates

par

Scarlatti Father and Son Cantatas & sonatas. Alessandro Scarlatti (1660-1725) : Andate o miei sospiri H. 53 & 54 ; Qui dove alfin m’assido H. 618 ; Farfalla che s’aggira H. 256. Domenico Scarlatti (1685-1757) : Sonates K. 25, 67, 108, 109, 450, 466. Tenta la Fuga. Alice Duport-Percier, soprano. Petr Skalka, violoncelle. Dirk Börner, clavecin. Livret en allemand, anglais, français. Novembre 2021. TT 73’53. Prospero PROSP0066

Même si les quelque six cents cantates d’Alessandro Scarlatti, que le livret estime « trop mélancoliques et trop savantes » pour le grand public, restent un cœur à prendre et un univers à exhumer, la discographie en esquisse un portrait à la touche au gré des parutions. Un album de Lucile Richardot et Philippe Grisvard a encore récemment contribué à alimenter le puzzle. Le présent CD en propose quatre dont Farfalla che s’aggira annoncée en « world premiere recording », et les deux Andate o miei sospiri (con idea humana / inhumana) sur un texte du compositeur et pédagogue Francesco Gasparini, qui fut un des professeurs de Domenico. 

Baptisé « Tenta la Fuga » selon une aria du H. 256, le trio de musiciens aborde son projet avec une dose d’initiative : ajoutant ici une fughetta (Andate o miei sospiri H. 53), laissant là préluder le violoncelle sur la trame de la sonate K. 109, ou ajoutant une troisième voix au clavecin (Qui dove alfin m’assido). Bref une intéressante mise en perspective, complétée par quelques sonates du fils qui entendent introduire ou prolonger le spectre expressif des cantates. Le terne clavecin ne vole certes pas la vedette au chant mais éteint hélas les couleurs, et apparait désespérément frêle et fade dans les pages à découvert. Combien falot dans l’Andante moderato K. 466 en fa mineur. Le fougueux simili-tango de l’Allegrissimo K. 450 (réécouter par exemple Pierre Hantaï dans sa formidable anthologie chez Astrée) se voit ici étouffé, étiré comme une morne et exsangue chorégraphie.

« Tous deux sont inimaginables l’un sans l’autre » cite la notice. Mais était-ce bien nécessaire de convier le fils pour le soumettre en insipide caudataire des cantates du père ? Quitte à tordre le cou et le bras à l’idiome des partitions, les pièces solistes s’intègrent du moins avec homogénéité dans le ton intimiste qui s’écoule de ce récital, auquel la voix pleine et clairette d’Alice Duport-Percier apporte tension et relief, à défaut d’une bouleversante caractérisation. On doit avouer qu’une acoustique quelconque conduit malencontreusement à déprécier ce programme a priori attachant mais quelque peu ingrat à l’écoute. On attend les trois valeureux artistes dans une réalisation plus avenante.

Christophe Steyne

Son : 6-8 – Livret : 9,5 – Répertoire : 9 – Interprétation : 6,5

Vos commentaires

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.