Mots-clé : Erich Kleiber

Carlos Kleiber, l’unique 

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Crescendo magazine remet en ligne cet article rédigé en 2004 par Bernard Postiau à l'occasion du décès du grand chef.

Né à Berlin en 1930, il passe son enfance en Argentine où son père, le célèbre Erich, se réfugie en 1935 pour fuir la peste brune. Malgré les tentatives de ce dernier pour décourager son fils dans sa volonté de poursuivre une carrière musicale, le jeune homme, après un parcours assez tortueux, termine des études au Conservatoire de Buenos Aires. Il mettra longtemps à sortir de l’ombre et à se forger un prénom.

Dans les années 50-60, il suit patiemment la carrière d’un vrai Kapellmeister, répétiteur tout d’abord, puis présidant aux destinées d’orchestres relativement modestes: Opéras de Düsseldorf, Zürich et, enfin, Stuttgart. A la fin des années 60, il est un chef très apprécié mais pas encore "légendaire". Son choix de devenir chef invité, surtout à Munich à partir de 1968, ainsi que la sortie fracassante de son premier enregistrement de studio -ce fameux Freischütz de 1973 qui a fait couler tant d’encre- vont définitivement infléchir sa carrière -et sa notoriété- et le propulser au plus haut niveau. Désormais, chacun de ses concerts sera un événement relaté par la presse mondiale. Pourtant, très vite, il limite ses apparitions publiques, ne se produisant qu’à intervalles de plus en plus espacés et, de surcroît, n’offrant au mélomane que peu l’occasion de l’entendre sur disque. La rareté de ses prestations a certainement beaucoup joué dans la fabrication de cette sorte de mythe qui l’entoure désormais: un chef génial et inaccessible. Plus pragmatiquement, il ne pouvait concevoir un concert sans un nombre incalculable de répétitions au cours desquelles il s’investissait totalement et qui le laissaient physiquement épuisé. La gestation était longue et parfois fastidieuse, mais le résultat, aux dires des témoins, frôlait à chaque fois le miracle. Il n’est pas étonnant, dès lors, que les organisateurs de concert se soient arrachés ce chef hors du commun, qu’ils tentaient de séduire quoi qu’il dût leur en coûter... car ses cachets étaient invariablement élevés.

George Szell, comme un diamant 

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Le chef d’orchestre George Szell est décédé il y a 50 ans. Alors que Warner réédite un coffret reprenant ses enregistrements, cette partition est l’occasion de parcourir la vie de ce chef d’orchestre réputé pour son niveau d’exigence qui déboucha sur la notoriété du Cleveland Orchestra dont il fut le plus important Directeur musical. 

György Széll voit le jour à Budapest en 1897 dans une famille où la musique est présente au plus haut niveau. La légende veut qu’il développe  très rapidement des aptitudes musicales et à l’âge de 2 ans et demi, l’enfant aurait donné des petites tapes au poignet de sa mère, dès qu’il aurait entendu des fausses notes du piano joué par sa génitrice. A l’âge de neuf ans, il déménage avec ses parents à Vienne et il commence à suivre des cours. Parmi ses professeurs, on note les noms des compositeurs Max Reger et Eusebius Mandyczewski, un ami de Brahms, ainsi que du pianiste Richard Robert, disciple de Bruckner, qui fut l’enseignant de Rudolf Serkin et Clara Haskil. Le jeune Szell est un enfant prodige qui met Vienne à ses pieds et, à l’âge de onze ans, il entreprend un tour d’Europe. La presse anglaise en pâmoison le qualifie de « nouveau Mozart ». Il joue des pièces du répertoire mais aussi ses propres compositions. Pour ses quatorze ans, la prestigieuse maison d’édition Universal de Vienne lui offre un contrat d’exclusivité de 10 ans. A seize ans, il dirige déjà des orchestres et un an plus tard, il est invité à monter au pupitre du Philharmonique de Berlin. Il se fait remarquer par Richard Strauss, qui est stupéfait par la maîtrise de l’adolescent ! Jugez du peu : Szell dirige lors de concert berlinois le poème symphonique Till L’espiègle du compositeur allemand. Si l’oeuvre est désormais un classique, elle était en 1914 une redoutable partition de musique contemporaine et un défi technique pour le chef et l’orchestre. Strauss prend alors George Szell sous son aile et le fait engager à l’Opéra Royal de la Cour de Berlin comme répétiteur, puis assistant. La confiance de Strauss est telle qu’il lui confie les répétitions en vue du premier enregistrement mondial de son poème symphonique Don Juan ! Lors de la session, Strauss est en retard et le jeune chef se retrouve à diriger la première partie de l’enregistrement de l'œuvre. Strauss s’étant rendormi, il arrive au studio avec une heure de retard. Du fait de la technique d'enregistrement d’alors, il est impossible de graver à nouveau, mais Strauss est si satisfait du résultat qu’il accepte que ce demi enregistrement lui soit crédité. La technique de bâton du grand compositeur ainsi que son sens de la clarté dans la gestion de la masse orchestrale et des phrasés eurent une influence sur les conceptions musicales de George Szell. Strauss resta, tout au long de sa vie, attentif à la carrière de son protégé. 

Beethoven à Amsterdam, au coeur du travail éditorial 

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L’Orchestre Royal du Concertgebouw d’Amsterdam honore l’année Beethoven avec un magistral coffret d’enregistrements historiques des symphonies sous des baguettes aussi légendaires que virtuoses : Leonard Bernstein, Nikolaus Harnoncourt, Carlos Kleiber. L’orchestre amstellodamois est également l’un des orchestres les plus actifs au niveau éditorial via son propre label. Crescendo a voulu en savoir plus et entrer au coeur du fonctionnement de ce pan de l’activité de la légendaire phalange hollandaise. Rencontre avec Lodewijk Collette, responsable éditorial et Daniël Esser, ancien violoncelliste de l’orchestre et conseiller sur ces parutions. 

L'Orchestre Royal du Concertgebouw d'Amsterdam (RCOA) fait paraître un coffret historique avec neuf chefs d'orchestre différents dans les 9 symphonies de Beethoven. Comment l'ADN du Concertgebouw est-il lié aux symphonies de Beethoven ? 

Il existe une ligne -assez directe- entre l’Orchestre Royal du Concertgebouw d’Amsterdam et Beethoven via son chef d'orchestre Willem Mengelberg. Il a reçu des leçons de direction d'orchestre de Franz Wüllner (1832 - 1902). Ce musicien très influent avait lui-même appris son idiome et son univers avec Anton Schindler (1810-1856), l'apprenti et le secrétaire de Beethoven (et aussi son premier et peu fiable biographe). Mengelberg a utilisé ces connaissances, qui consistaient en annotations de Wüllner, reportées dans ses propres partitions. Ce qui a eu une influence directe sur ses propres interprétations de Beethoven. Cela a donné lieu à de nombreux cycles de Beethoven au cours de sa carrière de chef d'orchestre et, plus tard, sous la direction des générations suivantes de chefs d'orchestre du Concertgebouw, ce lien s’est poursuivi. 

Erich Kleiber et Jean Martinon, deux légendes réunies

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Erich Kleiber et Jean Martinon - Les enregistrements 78 tours Decca. Georg Friedrich Haendel (1685-1759) : Bérénice, opéra HWV 38, acte 2 (extrait : Andante larghetto). Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Symphonie n° 40 en sol mineur, K. 550. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Symphonie n° 6 en fa majeur, op. 68 « Pastorale ». Josef Strauss (1827-1870) : Sphärenklänge, valse op. 235. Johann Strauss fils (1825-1899) : Der Zigeunerbaron, ouverture. Antonín Dvořák (1841-1904) : « Carnaval », ouverture op. 92. Piotr Ilyitch Tchaïkovski (1840-1893) : La Pucelle d’Orléans, opéra TH 6, acte 1 (extrait : air « Adieu, forêts »). Emmanuel Chabrier (1841-1894) : Suite pastorale pour orchestre. Maurice Ravel (1875-1937) : Le tombeau de Couperin pour orchestre, M. 68. Eugenia Zareska, mezzo-soprano. London Philharmonic Orchestra, direction : Erich Kleiber, Jean Martinon. Enregistré entre le 13 mai 1947 et le 25 avril 1949 au Kingsway Hall, Londres. Édition 2019. Livret en anglais. 2 h 7 min. Double CD Decca « Eloquence » 4829386.