Mots-clé : Julie Robard-Gendre

Falstaff de Verdi à Luxembourg

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Falstaff, l’énorme Falstaff, le perpétuel affamé et assoiffé, toujours en quête de la « bonne idée » qui lui permettra de remettre à flot des finances toujours en péril. Sa dernière trouvaille justement : séduire à la fois les belles et riches Alice Ford et Meg Page. Aussi vite pensé, aussi vite ourdi. Mais le réel… et surtout Shakespeare, qui est le « papa » lointain du bougre, et Arrigo Boito, qui est l’auteur du livret, vont évidemment lui compliquer la tâche. Le dupeur sera finalement dupé mais gardera sa bonne humeur. La vie continue et, comme il le proclame, « le monde entier n’est qu’une farce. L’homme est né bouffon » !

Falstaff est le dernier opéra de Verdi. On connaît l’imposant catalogue de ses terribles et merveilleuses tragédies. Mais voilà qu’en 1893, le vieux monsieur (il a alors 80 ans), au sommet de sa gloire et qui a déjà tout prouvé, se lance un défi : faire rire ! Pari gagnant. Particulièrement grâce à une extraordinaire partition : elle est non seulement comme un récapitulatif transcendé de tout ce qu’il a écrit jusqu’alors, mais il en joue dans de savoureuses auto-citations, des auto-parodies, des détournements. Il va même jusqu’à terminer son opéra par une grande fugue dont la solennité d’écriture est en plus que savoureux contraste avec le message final : « Rira bien qui rira le dernier. Tous sont dupes ». Voilà qui est immensément créatif ! 

Ce Falstaff-là, que Shakespeare et le livret de Boito font vivre au début du XVe siècle, les metteurs en scène l’ont déjà installé dans toutes sortes d’autres époques et milieux. Jusqu’à être, comme je l’ai vu, devenu punk chef de bande punk ! Il est vrai que pareil personnage n’est pas typique d’une époque, il est un tempérament, un énoooorme tempérament.

À Lausanne, une Hélène désopilante, 

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Après avoir ouvert la saison 2019-2020 avec de remarquables Contes d’Hoffmann, l’Opéra de Lausanne affiche, pour les fêtes de fin d’année, La Belle Hélène, afin de commémorer le bicentenaire de la naissance de Jacques Offenbach. Son directeur, Eric Vigié, en commande une nouvelle mise en scène à Michel Fau qui s’entoure d’Emmanuel Charles pour les décors, de Daniel Belugou pour les costumes et de Joël Farbing pour les éclairages. 

Dès le lever de rideau, que de cocasserie avec le temple de Jupin/Jupiter s’encastrant dans les grands boulevards avec leurs immeubles en perspective sur lesquels s’aglutineront les Spartiates en goguette côtoyant une Vénus exhibant ses seins sous ses longs cheveux, un Adonis à peine vêtu d’un pagne, une Léda étreignant son cygne. Hélène fait montre de ses jolis pieds sous une ample crinoline rouge qu’elle troquera contre un truc en plumes à la Zizi Jeanmaire puis un fourreau Chanel noir et blanc sous tiare à aigrettes. Le beau Pâris à crinière blonde arbore la tunique blanche ou bleu ciel, la robe rose d’oracle de Vénus et même les jambières chèvre-pied du satyre se faufilant dans le rêve de la reine en achevant son parcours sous les fanfreluches d’une girl de french cancan, tandis que le décor se métamorphose en rivage de Nauplie avec apparition de la nef en partance pour Cythère. Sous le regard désemparé de Calchas, bardé de rouge sous un impressionnant casque à plumes, le récit mythologique en prend un coup avec la colombe de Vénus se cassant la tête devant les cocottes Parthenis et Loena émoustillant le jeune Oreste devenu preux chevalier, alors que Ménélas, ajustant sa couronne de laurier, enfourche le cheval de Troie pour gagner la Crète.