Temps d’Arménie avec  Laurence Mekhitarian

par

La pianiste Laurence Mekhitarian fait paraître, chez Cyprès, un premier album intitulé Temps d'Arménie. Ce disque très personnel met en miroir des oeuvres de Vardapet Komitas avec des créations des compositeurs Claude Ledoux, Jean-Luc Fafchamps et Jean-Pierre Deleuze. Crescendo-Magazine s'entretient avec la pianiste pour évoquer la genèse de ce projet.

Il s’agit de votre premier album, qu’est-ce qui vous a poussé à franchir le pas d'un premier disque en solo ? 

J’ai assuré la création des pièces qui figurent sur cet album et je souhaitais en garder une trace et rendre hommage aux compositeurs qui les ont écrites à ma demande. 

L’album est titré “Temps d'Arménie”. Quel sens ce titre revêt-il pour vous ? 

Je cherchais un titre concis et évocateur,  il m’a été soufflé par des amis proches. Ses renvois sont multiples : le temps musical qui associe œuvres contemporaines et musique traditionnelle, les échanges et les voyages en Arménie partagés avec les compositeurs ; l’histoire millénaire d’un pays et de sa diaspora. Temps de mémoire et de silence. Tant et tant…

Quand on regarde le programme, à l’exception de Vardapet Komitas, les compositeurs programmés ne sont pas arméniens, mais belges. Comment avez-vous conçu ce programme ? 

Le programme s’est construit sur plusieurs années. Entre 2015 et 2018, Claude Ledoux, Jean-Luc Fafchamps et Jean-Pierre Deleuze m’ont écrit des pièces en lien avec l’Arménie, mon pays d’origine.  Avec enthousiasme, ils ont développé chacun des visions très personnelles du pays qui m’ont profondément émue. J’ai créé ces pièces en Arménie lors des Festivals Crossroads entre 2017 et 2019 en présence des compositeurs qui m’ont accompagnée là-bas à tour de rôle. La présence de Komitas, figure incontournable de la musique arménienne, m’a semblé indispensable. Celle du duduk, grâce à la belle inspiration de Jean-Luc Fafchamps, a ajouté à cet enregistrement une perspective sonore liée très intimement à la culture arménienne.

En quoi, cet écho contemporain, avec des compositeurs de la Fédération Wallonie-Bruxelles, est-il  important pour vous ? 

J’ai souvent intégré du répertoire contemporain dans mes programmes de concert. Et j’ai créé un atelier de musique contemporaine dans le cadre de mes cours en académie. J’ai proposé il y a plus de dix ans à Claude Ledoux puis à Jean-Luc Fafchamps d’écrire des pièces pour les jeunes afin de les familiariser avec le langage contemporain.

En 2015, année de commémoration du centenaire du génocide arménien, j’ai ressenti le besoin d’établir un lien entre la Belgique et l’Arménie en réalisant un concert avec des œuvres de jeunes compositeurs arméniens et c’est à cette occasion que j’ai demandé à Claude Ledoux s’il souhaitait s’associer à ce projet avec une nouvelle création. Le premier pas était franchi !

On connaît encore fort mal les œuvres de Vardapet Komitas. Qu’est-ce qui vous attire chez ce compositeur, quelles sont ses caractéristiques ? 

Je joue les œuvres de Komitas depuis très longtemps. Elles ne sont pas nombreuses pour le piano seul et ont été enregistrées magnifiquement, notamment par Lusine Grigoryan. On joue trois notes de Komitas et on est transporté dans un temps et un espace sonores inouïs. J’aime la concentration, la précision, la pureté, la richesse de son écriture pour le piano qui évoque les timbres et les caractéristiques de jeu des instruments traditionnels. 

Les recherches très pointues réalisées par Komitas avant le génocide de 1915 ont permis la conservation d’une large part du patrimoine musical arménien, lui donnant une visibilité internationale. Ici j’ai tenu à joindre Quatre mélodies très connues du répertoire traditionnel, dans des transcriptions récentes pour piano seul de Villy Sargsyan, pianiste et professeur à Erevan. Ces transcriptions ont conservé l’essence de l’écriture de Komitas et ont été publiées récemment. 

Est-ce que vous avez déjà en plan un nouvel album ? 

Je suis profondément touchée par l’accueil qu’a reçu ce premier album. Cela m’encourage bien sûr à réaliser d’autres enregistrements. J’ai deux projets qui me tiennent particulièrement à cœur en lien avec deux personnalités du monde musical que j’ai eu la chance de côtoyer de nombreuses années. Je pourrai vous en dire davantage très prochainement.

A écouter : Temps d’Arménie, piano : Laurence Mekhitarian. 1 CD Cyprès. CYP4660

CYP4660 | Temps d’Arménie | Laurence Mekhitarian

Crédits photographiques : Hervé Blieck

Propos recueillis par Pierre-Jean Tribot

Vos commentaires

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.