Une impeccable lecture de la Gran Partita, magnifiée par les souffleurs du Concertgebouworkest

par

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Sérénade « Gran Partita » en si bémol majeur, K. 361/370a. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Huit Variations sur Là ci darem la mano du Don Giovanni de Mozart, WoO 28. Alexei Ogrintchouk, hautbois et direction, membres de l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam. 2019. Livret en anglais, allemand, français.  58’07. SACD BIS-2463

On observera l’intelligence du choix de l’illustration de couverture, Apollon parmi les Bergers d’Heinrich Friedrich Füger (1751-1818) : une huile dont le sujet est celui qui ornait le rideau de scène du Burgtheater de Vienne, où la Gran Partita est supposée avoir connu sa première audition en mars 1784. Le thème arcadien convient bien à cette Sérénade pour vents, un sommet du genre. Et un des plus enregistrés, dans divers styles. Pilotée par de grands maestros mozartiens à la tête d’équipes émanées de orchestres « traditionnels » : Fritz Lehmann, Wilhelm Furtwängler, Otto Klemperer, Ernest Ansermet, Karl Böhm, Herbert von Karajan. Certains ensembles émanés d’orchestre symphoniques : Bläservereinigung Der Wiener Philharmoniker, chez Westminster. Abordée par des ensembles sur instruments anciens : Collegium Aureum (DHM), Amadeus Winds (L’Oiseau-Lyre, avec Christopher Hogwood), Orchestre du 18e Siècle (Philips, avec Frans Brüggen), Harmonie de l’Orchestre des Champs Élysées (Harmonia Mundi, avec Philippe Herreweghe), Octophoros (Accent, avec Barthold Kuijken), Ensemble Zefiro (Astrée). Ou des ensembles sur instruments modernes, spécialisés ou non : London Wind Soloists (Decca), Orchestre Jean-François Paillard (Erato), Consortium Classicum (Emi), Academy of St Martin in the Fields (Philips, avec Neville Marriner), Orchestre de Chambre d’Europe (Teldec)… Liste non exhaustive mais qui dit assez combien la discographie offre déjà un éventaire où chacun trouvera son bonheur.

La version qui nous arrive est signée des souffleurs du prestigieux orchestre d’Amsterdam, sous la conduite de celui qui en avait été nommé premier hautboïste en 2005. Inutile de préciser qu’on ne décèle ni faute de lecture ni faute de goût. Une interprétation fine, virtuose, impeccable, tendue par des tempi ajustés, suffisamment rapides pour émoustiller, suffisamment sentis pour que le flux s’épanouisse. Sauf peut-être dans la section centrale (en double-croches) de la Romance, un peu pressée, quoique dans la norme de ce qu’on entend habituellement, là où la retenue soulignerait le relief dramatique.  Le spectre s’équilibre sans gonfler les cors, les couleurs sont clairettes mais non aigres, les traits sont droits, au point d’assécher un peu les parfums de l’Adagio et du Tema con Variazioni. Sans les saveurs des instruments d’époque, sans personnalité distinctive, cette épure convainc à défaut de soulever un complet enthousiasme. Notre évaluation tient compte de l’abondante concurrence et de l’inévitable priorisation qui incombe au devoir de hiérarchie.

On retrouve Alexei Ogrintchouk en trio avec Nicoline Alt (hautbois) et Miriam Pastor Burgos (cor anglais) dans les Variations que Beethoven broda autour du célèbre air de Don Giovanni : un opus plus rarement enregistré et qui, par sa prestation véloce et fuselée, s’installe comme nouvelle référence, auprès du CD Bläsermusik (Ricercar) et du témoignage des Vents Français (Warner). Voilà qui complète un album très réussi que les mélomanes friands de la Gran Partita pourront dignement ajouter à leur collection. 

Son : 9 Livret : 9 Répertoire : 10 (Mozart) 8 (Beethoven) Interprétation : 8 (Mozart) 9 (Beethoven)

Christophe Steyne

 

 

 

 

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