Beatrice Berrut au sommet de la sensibilité

par

Franz Liszt (1811-1886) : La lugubre gondola I et II, S. 200 – Trois Odes funèbres, S. 112 – Bagatelle sans tonalité, S. 216a – Deux Csárdas, S. 225 – Csárdas, S. 224 – Trauervorspiel und Trauermarsch, S. 206 – Am Grabe Richard Wagners pour piano seul, S. 202. Beatrice Berrut, piano. 2021 -Textes de présentation en français et anglais - -77’47- Printemps des Arts de Monte-Carlo PRI035

En 2017 dans ces pages, nous évoquions à propos du disque « Metanoia » un « programme alliant délicatesse, intériorité, poésie et virtuosité ». Quatre années plus tard, qu’il est agréable de découvrir un programme tout aussi poignant et bouleversant. Plus encore, quel bonheur de voir une ascension si fulgurante vers les sommets chez la pianiste suisse Beatrice Berrut dans ce nouveau disque simplement nommé : « Liszt ». Dans quelques-unes des œuvres de vieillesse de Liszt (1860-1885), Beatrice Berrut nous transporte dans un monde d’une force intérieure hallucinante captée par un sentiment d’introspection et d’élévation permanent. Cette sensibilité transfigurée pourrait-elle être, notamment, le fruit d’un passage régulier de la pianiste à la direction d’orchestres de maisons d’opéras ? Cette vocation n’est pas si anodine dans le processus créatif, elle ouvre à bien des égards le champ des possibles. Beatrice Berrut respire, fait vibrer chaque notes en les reliant d’une manière naturelle et poétique tout en apportant une résonance au silence qu’elle entretient avec habileté. 

De la délicatesse des mélopées sombres de La lugubre gondola I, d’où s’émancipe une mélodie juste soutenue, à l’esprit légèrement plus pétillant des Csárdas, Beatrice Berrut ne tente à aucun moment de forcer la poésie de ce répertoire. Elle lui apporte juste ce qu’il faut d’expression jusqu’à l’indicible douceur émouvante de son épilogue (Am Grabe Richard Wagners). Il faut avouer que l’instrument employé ici  (Bösendorfer 280 Vienna Concert) est remarquable à bien des égards : graves somptueux, médium rond et généreux, aigus feutrés. Dans un répertoire finalement très épuré, éloigné de certains ouvrages plus expansifs, un répertoire où il n’est toujours aisé et naturel de s’y retrouver tant le squelette architectural pose des questions, Beatrice Berrut fait preuve de profondeur et de lucidité. Une lecture saisissante qui, malgré la tonalité funèbre de sa thématique, fait un bien fou et nous élève à chaque instant. Un véritable coup de maître.

Son 10 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 10

Ayrton Desimpelaere

Béatrice Berrut magnifie Liszt 

 

 

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