Duncan Ward à Genève

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Pour sa saison 2020-21, l’Orchestre de la Suisse Romande avait invité le jeune chef britannique Duncan Ward pour un programme Lully-Britten-Richard Strauss qui devait être présenté au Victoria Hall le 9 décembre 2020. Comme le concert a été annulé, lui a été proposé celui du 9 juillet 2021, donné gratuitement au public genevois pour achever une bien courte série…

Duncan Ward est un chef polyvalent qui collabore régulièrement avec la Deutsche Kammerphilharmonie de Brême et les orchestres symphoniques de Bamberg et de la Radio de Vienne. Il consacre aussi une large part de son activité aux jeunes en dirigeant les étudiants de l’Académie de l’Orchestre Philharmonique de Berlin, de l’ensemble anglais Sinfonia Viva et en investissant ses efforts dans la WAM Foundation qui envoie de jeunes artistes britanniques enseigner la musique classique occidentale dans diverses écoles de l’Inde afin de faire naître des vocations. 

Son programme fait montre de l’éclectisme de ses goûts. Il débute par un Mozart d’abord difficile, celui de la Gran Partita, la Sérénade en si bémol majeur K.361 pour treize instruments à vent soutenus par une contrebasse. Le seul mouvement initial Largo-Molto allegro impressionne par la sonorité profonde de l’introduction qui cède la place à une section rapide pimpante dont les contrastes assouplissent les lignes. Puis interviennent trois des chefs de pupitre de l’OSR. Le trompettiste Stephen Jeandheur est le brillant soliste du célèbre Concerto en mi bémol majeur de Joseph Haydn, dominant avec aisance un tutti beaucoup trop fourni tout en faisant valoir sa virtuosité dans des ‘cadenze’ soigneusement élaborées. Le clarinettiste Michel Westphal propose ensuite la Rhapsodie en si bémol majeur de Claude Debussy. Il tire parti d’un canevas beaucoup plus éthéré pour imprégner les premières mesures d’un halo de mystère que fait disparaître la transition avec ses ‘glissandi’ émoustillants débouchant sur un allegro dont l’apparente exubérance laisse sourdre un cantabile empreint de nostalgie. Svetlin Roussev qui vient d’abandonner sa fonction de premier violon pour entreprendre une carrière de soliste achève ce triptyque concertant en présentant une page à effet de Camille Saint-Saëns, l’Introduction et Rondò capriccioso op.28 qu’il expose dans une sonorité peu grande mais racée qui devient nerveuse dans le passage médian avant de se répandre dans la séquence rhapsodique et la stretta échevelée qui a un impact immédiat sur le public. Le concert s’achève par une page irrésistible, les Danses de Galanta que Zoltán Kodály avait élaborées en 1933 en songeant à l’orchestre tzigane de ce village de Hongrie. Duncan Ward laisse à la clarinette le soin d’en révéler l’atavique nostalgie que la flûte dynamise d’inflexions chaloupées. Ce rythme de ‘verbunkos’ sous-tend ensuite le développement fortement contrasté et la coda effervescente suscitant de délirantes ovations de la part de spectateurs ravis de retrouver la réalité du ‘live’.

Paul-André Demierre

Genève, Victoria Hall, 9 juillet 2021

Crédits photographiques : © Alan Kerr

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