Les 80 ans du  chef d'orchestre Lawrence Foster et récitals à Monte-Carlo

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Figure majeure de la vie musicale monégasque, le chef d’orchestre Lawrence Foster a été directeur musical de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo entre 1980 et 1990. Il est toujours un invité régulier de l’OPMC avec lequel il partage sa passion pour les répertoires qui sortent des sentiers battus. La phalange monégasque ne pouvait manquer de célébrer les 80 ans de l’un de ses plus fidèles hôtes. 

Pour cette occasion, le chef accompagne une légende de la musique : le pianiste autrichien Rudolf Buchbinder dans le Concerto n° 5 de Beethoven. On connaît la passion du pianiste pour Beethoven avec ses multiples intégrales que ce soit des Concertos ou des Sonates. Buchbinder déploie une interprétation  empreinte de sobriété, de naturel, et d’une fidélité notable au texte. Il connaît les moindres recoins de cette partition dont il fait ressortir toutes les nuances magnifiquement secondées par la direction de son fidèle ami Lawrence Foster. Acclamé par le public, le soliste offre un “bis” : un arrangement de valses de Strauss par Alfred Grünfeld, où on retrouve tout le charme viennois.

En seconde partie, le programme offre le From the Diary of Anne Frank du compositeur et chef d'orchestre Michael Tilson-Thomas pour narrateur et orchestre. Inspiré par le célèbre journal intime de la jeune Anne Frank et dédié à l'actrice Audrey Hepburn qui a incarné le rôle dans le film de George Stevens sorti en 1959, cette partition est une commande de l’Unicef. La partition présente beaucoup de réminiscences des œuvres de Leonard Bernstein qui a été le Mentor de Tilson Thomas.  C'est Nicole Foster, la fille de Lawrence Foster et collaboratrice de l’Unicef qui endosse le rôle de narratrice. Le public est très ému par ce moment musical intense qui réunit père et fille à l'occasion de ses 80 ans.

Le concert se termine par la Rhapsodie Roumaine n° 1 de George Enescu. On connaît la dévotion du chef d’orchestre pour l’oeuvre d’Enescu, ce dont témoignent les enregistrements Warner avec l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo  qui restent des références dans la connaissance de l’art du compositeur. Lawrence Foster catalyse ce tourbillon ensorcelant. Le succès public est au rendez-vous de cette partition colorée et festive et une cascade de confettis dorés glisse sur le Maestro.

Dans le cadre de la saison des récitals de l’OPMC, l'Auditorium Rainier III accueille le pianiste  Daniil Trifonov devenu en à peine 10 ans l’une des grandes stars mondiales du piano qui établit sa réputation internationale avec  plus de 150 concerts par an ! Un dangereux marathon physique et mental,  heureusement il a décidé de prendre du recul et nous retrouvons un musicien accompli. 

Trifonov propose un programme autour de Bach. Il commence son récital par la transcription de Brahms de la célèbre Chaconne pour violon seul. Le pianiste nous plonge dès les premières notes dans une gravité saisissante. On croit voir la main de l'archer arpéger les accords. Il tient le piano avec la main droite, sa main gauche voltige d’une extrême à l’autre du piano. On se demande même s'il n'a pas plusieurs mains gauches tant on est  happé à la fois par cette virtuosité inégalable mais aussi par cette sensibilité et cette intelligence musicale hors du commun.

Trifonov enchaîne sans interruption par l'Art de la fugue BWV 1080,  le monument de l'oeuvre de Bach. L’artiste  pourrait continuer tout le programme sans s'arrêter comme il l'a fait ailleurs, mais à Monte-Carlo le public a l'habitude d'avoir un temps d'arrêt. Il fait donc une pause après le “Contrapunctus XII” et il reprend après l'intervalle le “Contrapunctus XII à XIV”.

Magicien des sons, Trifonov présente un toucher unique  à la fois ferme et vigoureux dans les forte sans jamais être agressif, il arrive à faire aussi des pianissimi d'une finesse et d'une délicatesse étonnantes. Pour terminer  le programme du récital il joue le choral Jesus bleibet meine Freude (Jésus que ma joie demeure) dans le merveilleux arrangement pour piano de Myra Hess : le pianiste impose à la salle un silence presque religieux. Une ovation debout récompense le pianiste et  Trifonov revient après plusieurs rappels et nous offre deux bis avec des œuvres méconnues des enfants de Jean-Sébastien Bach.

L’OPMC se plait également à mettre à l’honneur ses musiciens lors de concerts dédiés et on retrouve le Trio Goldberg composé de Liza Kerob, violon supersoliste, de Federico Hood, premier alto et de Thierry Amadi, premier violoncelle.  Pour le concert “Happy Hour Musical”, ils proposent un programme avec des petits chefs-d'œuvre de la musique de chambre qui sont des bijoux scintillants :  le Trio à cordes op.53 n°1 en sol de Haydn et le Divertimento pour trio à cordes K.563 de Mozart, une oeuvre de maturité. Les membres du trio unissent leurs archets pour rendre à ces partitions toute leur richesse insoupçonnée avec un bonheur musical communicatif. 

Monte-Carlo, Auditorium Rainier III, les 20, 27 et 31 octobre 2021 

Carlo Schreiber

Crédits photographiques : JL Neveu / OPMC

 

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