Trois en un à l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg
Après avoir accueilli Gautier Capuçon en ouverture de saison, l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg a décidé de mettre la barre encore plus haut, en accueillant non pas un, ni deux mais bien trois solistes durant le même concert ! Liya Petrova, Aurélien Pascal et Alexandre Kantorow nous ont livré une soirée époustouflante durant laquelle virtuosité et musicalité furent les maîtres mots. Les trois musiciens se connaissent bien, ils ont notamment cofondé “Les rencontres musicales de Nîmes” en 2022. Le festival, qui en est donc à sa quatrième édition, fait la part belle à la musique de chambre de toutes les époques.
La soirée a débuté avec le violoncelliste français Aurélien Pascal et les Variations sur un thème rococo op.33 de Tchaïkovsky. Avec une aisance manifeste et une décontraction complète, Aurélien Pascal a démontré toute sa maîtrise de son instrument. En perpétuel dialogue avec les musiciens, il a fait jeu égal avec la puissance de l’orchestre. Le pupitre des bois, très occupé tout au long de la soirée, a livré une belle prestation. Tous les musiciens ont montré une attention de tous les instants envers le soliste, et seuls quelques légers problèmes de nuances sont à déplorer. La communication fut également très visible entre le soliste et le chef Aziz Shokhakimov, très expressif et enjoué comme à son habitude.
Changement d'œuvre, changement de soliste, mais on garde le compositeur avec le Concerto pour violon en ré majeur op.35, interprété avec brio par Liya Petrova. La violoniste et l’orchestre nous ont fait vivre de magnifiques moments, avec bien entendu le thème principal, majestueux, mais aussi la cadence du premier mouvement. Celle-ci fut parfaitement gérée par la violoniste bulgare, dont la gestion des silences et de la tension qu’ils contiennent fut tout à fait à propos. Nous avons à nouveau retrouvé notre pupitre des vents dans le deuxième mouvement, avec encore une fois de très belles interventions, avant de passer au troisième mouvement dans lequel Liya Petrova fit montre de toute sa fougue. Très applaudie par le public, elle a interprété deux bis très contrastés, Funk the String d’Aleksey Igudesman et une sarabande de Bach. Un grand écart stylistique dont le choix peut être discuté, mais force est de constater que le public était conquis !
La deuxième partie a débuté par l’Ouverture No.2 de Louise Farrenc. La sublime œuvre de la compositrice française nous fait regretter qu’elle n’ait jamais composé d’opéra, tant la musique donne vie avec éclat à une série de personnages invisibles sûrement occupés à tisser une quelconque tragédie. Ce fut une très belle interprétation de l’orchestre alsacien, pleine de drame et de tensions.
Pour (presque) clôturer la soirée, nous avons pu entendre le Concerto pour piano No.3 de Prokofiev par Alexandre Kantorow. Au contraire des deux premiers solistes, nous avons parfois manqué de sons face à l’ampleur de l’orchestre. Cela est sans aucun doute dû à un excès d'enthousiasme des musiciens plutôt qu'à une faiblesse sonore du pianiste français qui a démontré toute sa virtuosité et son lyrisme dans les différents moments plus exposés. Très applaudi par le public lui aussi, il nous a offert en bis un extrait d’un arrangement de L’oiseau de Feu de Stravinsky.
Pour finir, après une longue ovation, les trois musiciens sont revenus sur scène pour interpréter le 2ème mouvement du Trio No.1 de Mendelssohn, à la grande joie du public.
Strasbourg, Palais de la Musique et des Congrès, 2 octobre 2025
Alex Quitin,
Crédits photographiques : David Amiot