Anna Caterina Antonacci en récital à La Monnaie.

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La saison des récitals de chant à la Monnaie nous apportait l’une des grandes chanteuses de notre époque dans un programme d’une rare intelligence qui explorait un axe franco-italien : Ottorino Respighi, Martucci, Nadia Boulanger et Ernest Chausson. Même si Anna Caterina Antonacci n’est pas l’une des plus présentes sur la scène bruxelloise (ses apparitions s’y limitaient alors à trois récitals et trois opéras en version de concert), elle avait drainé un public érudit et concentré.

En première partie, la chanteuse proposait un parcours fort en contrastes avec les beautés ensorceleuses de Respighi et Martucci proposés en perspective avec une sélection de mélodies de Nadia Boulanger. On retient surtout les voluptés mélodieuses des trois extraits de La Canzone dei Ricordi, cycle majeur de Martucci, qui baignent dans un onirisme musical très fin de siècle. Le changement est un peu brusque avec Nadia Boulanger pour qui la musique est purement au service du texte et à accompagner la prosodie : le ton est naturellement plus sec et ne cherche pas les arabesques méditerranéennes comme chez Respighi ou Martucci. Le timbre d’Anna Caterina Antonacci n’est plus aussi impactant qu’il le fut, mais la finesse musicale et l’intelligence du texte restent des caractéristiques de cette fabuleuse artiste qui a toujours aimé étonner son public et le faire sortir de sa zone de confort. Le pianiste Donald Sulzen, accompagnateur régulier de la soprano, attire l’attention par sa flexibilité et sa sensibilité.

En seconde partie, le duo est rejoint par le quatuor de La Monnaie (Saténik Khourdoian et Femke Sonnen, violons ; Yves Cortvrint, alto et Sébastien Walnier, violoncelle) pour interpréter la version “de chambre” du Poème de l’amour et de la Mer d’Ernest Chausson. On est ici sur des sommets musicaux, tant le ton de la chanteuse est superlatif et elle est merveilleusement accompagnée par des musiciens à la justesse stylistique sur le fil. Notons que cette version en petit effectif renforce la noirceur dramatique de ce chef d’oeuvre. Une très grande soirée

Pierre-Jean Tribot

Bruxelles, Théâtre Royal de La Monnaie, 22 décembre 2018.

Crédits photographiques : B.Ealovaga

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