Bruckner expérimental ? 

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Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonie n°1 en Ut Mineur (version de 1891-Edition Brosche BSW1/2) ;  Scherzo (1865). Bruckner Orchester Linz, direction Markus Poschner. 2024. Livret en anglais et allemand. 52’01’’. Capriccio. C8094

Dans le cadre de son intégrale complète des différentes éditions des symphonies de Bruckner, Markus Poschner et son orchestre Bruckner de Linz nous avaient déjà proposé une excellente Symphonie n°1 dans sa version “de Linz” originale de 1866-1868 ; ce même tandem nous présente la version de 1891 ! Plus de 20 ans plus tard, Bruckner remet le matériau sur le métier et propose donc une nouvelle version dont la première au concert fut donnée sous la direction de Hans Richter au pupitre du Philharmonie de Vienne, dédiée à l’Université de Vienne dont le compositeur avait été élevé au titre de docteur Honoris Causa. 

Cette“version de Vienne”, telle qu’elle est appelée, est parsemée de retouches avec une nouvelle fin. La différence est flagrante entre une version de Linz, plutôt altière et conquérante et cette version viennoise, plus verticale, plus massive de trait. C’est presque une oeuvre hybride avec des expérimentations orchestrales et une rugosité plus travaillée. La partition pose de sacrés défis aux chefs qui doivent veiller à unifier et donner une cohésion à ce langage musical parfois étonnant, d’ailleurs peu de chefs s’y confrontent... Markus Poschner sait trouver le ton juste, préservant une dynamique mais mettant en avant la radicalité des choix de Bruckner. Cela étant, cette édition est plutôt un approfondissement de l’art du compositeur. 

En complément, les artistes proposent le bref Scherzo de 1865, initialement envisagé pour se fondre dans la Symphonie n°1, mais que Bruckner décida, après un voyage à Munich où il entendit la première de Tristan et Isolde, de retirer et de composer un nouveau morceau tout en gardant le trio. Ce Scherzo respire Schubert et Brahms par une légèreté dansante presque paysanne. Il séduit par sa fraîcheur et son naturel alors qu’il dénote par son rythme irrégulier assez original.  Markus Poschner est excellent trouvant le ton juste pour rendre justice à ce court morceau. 

Un disque encore très intéressant, de haut vol artistique, qui complète notre connaissance de Bruckner.

Son : 9 – Livret : 10 – Répertoire : 9 – Interprétation : 10

Pierre-Jean Tribot

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