Christophe Delporte, Astoria et la Misa Tango 

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Virtuose de l’accordéon et du bandonéon, notre compatriote Christophe Delporte est le fondateur de l’Ensemble Astoria qui se consacre au tango. En compagnie des New Baroque Times Voices, Astoria nous ravit avec un nouvel album nommé  Misa Tango. 

Votre nouvel album se nomme Misa Tango. Pouvez-vous nous en expliquer le concept ? 

Léonardo Anglani (le pianiste d’Astoria) et moi-même avons été sollicités par une excellente chorale amateure et un petit orchestre pour interpréter la Misa Tango (Misa a Buenos Aires) de Martín Palmeri. (Pour quelques concerts en Belgique). Lors de la première répétition et dès les premières notes, nous avons eu la même idée…….. pourquoi ne pas arranger la MisaTango pour Astoria ?

Depuis 18 ans (et 6 albums), Astoria interprète exclusivement la musique d’Astor Piazzolla ! Mais pourquoi ne pas faire un petit pas de côté ? Après tout, Martín Palmeri est également un compositeur Argentin et surtout l’univers « Misa Tango » nous invite naturellement à penser à Astor Piazzolla.  En tous cas, nous y avons vu (et entendu) une passerelle évidente entre ces deux compositeurs.

Cet album propose des œuvres de Piazzolla dont nous célébrons le centenaire. Pour vous qui avez consacré au tango et à ce compositeur plusieurs albums, pourquoi sa musique nous touche-t-elle toujours autant ? 

La musique d’Astor Piazzolla est une musique vivante, vibrante, qui parle d’amour, de douleur, d’espoir et de mélancolie et qui vous emporte dans un maelström de sensations. C’est un réel plaisir que de parcourir tous ces sentiments et surtout de les transmettre au public. 

La Misa Tango de Martín Palmeri s’est imposée rapidement au répertoire. Pourquoi avez-vous souhaité la proposer en écho à des œuvres de Piazzolla ? 

Je pense avoir répondu à cette question lors de ma première réponse.

A écouter cette œuvre, elle me semble illustrer l'idée d'un art total ? Partagez-vous cette impression ? 

Misa Tango est une messe chorale (traditionnelle) sur des sonorités de tango. Elle est composée sur les mêmes mouvements qu’une messe en latin classique, à laquelle se mêlent les harmoniques et les rythmes syncopés du tango. Jennifer Scavuzzo (la chanteuse d’Astoria) est spécialisée dans le chant pop/rock au contraire du New Baroque Times Voices qui est composé de chanteurs professionnels « classique » (issus des choeurs de la Monnaie, du Chœur de chambre Namur, ….)

Martín Palmeri  introduit en outre l’instrument emblématique du tango, le bandonéon, l’accordéon dans le cas de notre enregistrement et des instruments « classiques » comme le piano, le violon ou le violoncelle. Notre enregistrement audio à également fait l’objet d’une captation vidéo ou nous avons fait appel à un couple de danseurs de tango. (De la danse dans une messe……)

Donc, je pense en effet qu’on peut parler d’art total…. Ou en tout cas, de pluridisciplinarité ou de mélange de styles.

Le Tango, comme beaucoup de musiques semble sonner avec évidence, mais il n’en reste pas moins un style difficile à restituer. Quels sont les écueils à éviter ? 

Je pense, en tous cas pour des musiciens classiques, qu’il ne faut pas tomber dans le piège d’une musique « facile » à jouer. Astor Piazzolla écrivait 99% des notes/informations sur la partition, ce qui est relativement pratique pour des musiciens « lecteurs » issus du monde classique.Il ne suffit pas de « jouer », il faut comprendre l’univers tango, s’en être imprégné, respirer tango. Le tango, c’est avant tout une religion, un état d’esprit. 

L’Ensemble Astoria a été fondé en 2004, il va bientôt célébrer ses 20 ans. Quels sont vos prochains défis ? 

Le prochain album/projet s’appellera Seasons (enregistrements prévus fin 2022). Nous allons jouer/enregistrer les 4 saisons d’Astor Piazzolla (Las Cuatro Estaciones Porteña : Verano Porteño, Otoño Porteño, Invierno Porteño, Primavera Porteña) associées à  Four seasons  de Michel Lysight (Oryx, Falling trees, Berkeley Rose Garden, Cruelest Days). Il s’agit d’une pièce que Michel Lysight a écrit pour l’ensemble.  Nous y associerons  : trois nouveaux titres d'Astor Piazzolla : Vayamos al diablo, Milonga del toréador et Hay une niña en el Alba. Je suis également heureux de vous annoncer que le 1er mai 2022, notre l’ensemble sera associé à la Camerata de l’IMEP  (Institut Supérieur de musique et de pédagogie de Namur) afin de  proposer un concert avec 12 saisons (Vivaldi, Piazzolla, Lysight ). C’est un projet qui nous est cher car 4 d’entre nous sont professeurs à l’IMEP.

La période que nous traversons est très sombre pour la Culture. Comment avez-vous personnellement (et avec l'ensemble) géré ces temps difficiles ? 

Comme vous le constatez, les projets sont bien présents pour Astoria et quelque part, cette pandémie m’aura permis de préparer et peaufiner les nouveaux arrangements. Je dirais néanmoins que le plus difficile durant cette période aura été le manque de perspectives et bien sûr les annulations de concerts qui tombaient  les unes après les autres. Un sentiment d’impuissance et de révolte à la fois mélangé avec la gravité d’une pandémie mondiale. Enfin, espérons que le plus dur soit bien derrière nous….. et pour longtemps !

Le site de l'ensemble Astoria : www.e-astoria.com

  • A écouter : 

Martín Palmeri (1965 - ) : Misa a Buenos Aires ; Astor Piazzolla (1921 - 1992) :  Milonga CarriegueraSoledadMilonga en Ay Menor. The New Baroque Times Voices ; Astoria, direction : Philipp Gérard (Palmer). 1 CD Antartica Records 2021 AR 026.

 

Propos recueillis par Pierre-Jean Tribot

Crédits photographiques : DR

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