Daniel Barenboim à la française 

par

César Franck (1822–1890) Symphonie en ré mineur CFF 130 ; Gabriel Fauré (1845–1924) Pelléas et Mélisande, op. 80 - Suite pour orchestre d’après la musique de scène pour la pièce de théâtre de Maeterlinck. Berliner Philharmoniker, Direction : Daniel Barenboim. 2023. Livret en anglais et allemand. 64’. DGG 00028948667345

DGG fait paraître la bande son d’une série de concerts du légendaire Daniel Barenboim avec les Berliner Philharmoniker capté live sur la scène de la Philharmonie de Berlin en juin 2023. De César Franck, le musicien avait déjà gravé tant la Symphonie en ré mineur que les poèmes symphoniques lors de son passage à la tête de l’Orchestre de Paris pour DGG. Ces gravures de la fin des années 1970 se perdaient dans le ventre mou de la discographie. Plus de 40 ans après, le vénérable chef remet la Symphonie de Franck sur le métier.

La Symphonie de Franck est  une partition à la fois de sensibilité latine et germanique à l’image de sa ville de Liège natale située aux frontières de ces deux mondes. Elle supporte tant une approche à la française, altière et conquérante, qu'une approche plus germanique, marquée par des tempi lents et une puissance de base. Daniel Barenboim penche désormais du second côté. Son Franck est lent, très lent, très très lent même. Rien que sur le premier mouvement, Barenboim dépasse les vingt minutes là où ses confrères sont bien plus rapides, parfois aux frontières du quart-d'heure. La lenteur n’est pas rédhibitoire, à l’image de Sergiu Celibidache, cependant, le ton se fait ici pesant. Si le mouvement lent est bien mené et sublimé par les pupitres des Berlinois, l’Allegro non troppo conclusif est ici bien lourd et plombé par sa massivité néo-brucknérienne. Certes, l’orchestre joue superbement, faisant preuve d’une ampleur dynamique sous les effets parfois facile du chef dans les fortissimos.  

On ne retient donc pas cette interprétation décevante. Cependant, il faut noter que les trois derniers enregistrements de cette symphonie et malgré l’année César Franck 2022 sont à mettre aux crédits de phalanges germaniques : le RSB Berlin et Jean-Luc Tingaud chez Naxos et le HR-Sinfonieorchester avec Alain Altinoglu chez Alpha. Prix citron donc pour les orchestres français, alors que c’est la Société des concerts du Conservatoire qui avait donné la première mondiale de la partition et que cette symphonie était un cheval de bataille des phalanges hexagonales il y a encore à peine 20 ans ! 

Heureusement le complément nous redonne le sourire avec une lecture aérée et poétique de la suite Pelléas et Mélisande de Gabriel Fauré. La finesse du trait, la beauté des textures et la palette des nuances composent une interprétation indubitablement majeure magnifiée par un orchestre en état de grâce.  

Son : 10  Livret : 8  Répertoire : 10 Interprétation : 5 (Franck) - 10 (Fauré)

Pierre-Jean Tribot

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