Hommage musical à David Hockney par Pavel Kolesnikov et Samson Tsoy à la Fondation Louis Vuitton

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À l’occasion de l’exposition David Hockney 25 (9 avril - 31 août), la Fondation Louis Vuitton a proposé deux soirées musicales exceptionnelles. Les pianistes Pavel Kolesnikov et Samson Tsoy y rendent hommage à l’artiste britannique à travers deux programmes riches et colorés, inspirés de sa vie et de son œuvre.

Le premier concert, le 12 avril, célèbre le printemps et Wagner. Comme les tableaux éclatants de Hockney, les musiciens apparaissent en costumes vifs. La valse Frühlingsstimmen de Johann Strauss II, dans la version pour deux pianos de Willy Rehberg, dévoile une étonnante profondeur. Leur interprétation révèle une musique dite « légère » avec une densité joyeuse, reflet d’un printemps régénérateur.

Suit Le Sacre du Printemps, dans sa version originale pour piano à quatre mains — un clin d’œil au décor conçu par Hockney pour le Metropolitan Opera de New York en 1981. Les deux pianistes maîtrisent parfaitement les croisements de bras complexes, livrant une lecture envoûtante, percussive et subtilement sauvage.

Après l’entracte, un extrait du film Wagner Drive de Hockney est projeté : quatre amis (dont le peintre au volant) sillonnent une route de collines californiennes sur fond de musique wagnérienne. Ce moment cinématographique trouve un écho lumineux dans Short Ride in a Fast Machine de John Adams (transcrit par Preben Antonsen), prolongeant l’impression de voyage en voiture.

Le programme se poursuit avec trois Wesendonck-Lieder de Wagner (Der Engel, Träume, Im Treibhaus), entrecoupés des ouvertures du Vaisseau fantôme (arrangement de Debussy) et de La Walkyrie (transcription de Hermann Behn). La voix d’Elena Stikhina, ample et veloutée, s’y déploie avec naturel et émotion. Le duo de pianistes fait rayonner la palette orchestrale à travers une expressivité subtilement dosée.

Pour conclure le programme, Stikhina chante La Mort d’amour d’Isolde, sur une transcription pour deux pianos réarrangée par Kolesnikov à partir de celle de Liszt. Une intensité opératique s’en dégage avec profondeur dans l’émission naturelle d’Elena Stikhina. En bis, Morgen de R. Strauss, dans un souffle de grâce infinie.

Le 13 avril, place à la théâtralité, en écho au travail de Hockney comme décorateur d’opéra (La Flûte enchantée et The Rake’s Progress pour Glyndebourne en 1978 et en 1975 , Parade pour Metropolitan Opera en 1981). Le programme mêle Ravel (Ma Mère l’Oye, Rapsodie espagnole) et Britten (Cabaret Songs) dans un esprit libre et inventif. Dans Ravel, rejoints par les percussionnistes Colin Currie et Owen Gunnell, les pianistes explorent une riche palette de timbres : dans Le Jardin féérique, les effets sonores émerveillent, tandis que la Rapsodie espagnole culmine avec une Feria festive rythmée par les castagnettes.

Les extraits de The Rake’s Progress et des Cabaret Songs donnent au ténor Nicky Spence l’occasion d’un véritable jeu de scène. Gestes, regards et voix, solaire et souple, forment un tout expressif qui séduit les spectateurs. Elena Stikhina, de son côté, apporte son timbre chaleureux et raffiné aux diverses pièces, avec l’un ou l’autre des pianistes, ou les deux, pour un accompagnement d’une constante inventivité.

L’éclectisme musical trouve un écho dans les costumes des musiciens, changeant à chaque partie, comme un clin d’œil à l’univers visuel de Hockney.

Deux soirées d’une rare intensité, où musique, art visuel et théâtralité se rencontrent avec brio — une expérience qu’on espère voir renouvelée.

12 et 13 avril, Auditorium de la Fondation Louis Vuitton, Paris

Victoria Okada

Crédit photographique © Fondation Louis Vuitton / Gaël Cornier

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