Jean Muller signe le quatrième volet de son intégrale des Sonates de Mozart

par

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Intégrale des sonates pour piano, volume 4 : Sonate en si bémol majeur K. 333, en fa majeur K. 533/494 et en do majeur K. 309. 2016/17. Jean Miller, piano/  Notice en allemand et en anglais. 62.58. Hänssler Classic HC22013. 

Lorsque le premier volet de cette intégrale des sonates de Mozart est paru, Patrice Lieberman en signalait, le 5 juin 2019, la technique maîtrisée, la clarté et l’équilibre, l’approche très réfléchie et la sobriété. Deux albums sont venus s’ajouter en 2020 et en 2021, avant le présent, quatrième de la série, dont l’enregistrement a été effectué en deux fois, à savoir en août 2016 et en janvier 2017, dans le Grand Auditorium du Conservatoire de la ville de Luxembourg, institution où enseigne Jean Muller. Les mêmes caractéristiques, signalées par notre collègue, vont se retrouver dans les trois sonates ici proposées. 

Né à Luxembourg dans une famille de musiciens (le père est pianiste et la mère altiste), Jean Muller (°1979) étudie le piano au Conservatoire de la capitale grand-ducale dans la classe de Marie-José Hengesch. Il se perfectionne à Bruxelles, Munich, Paris et Riga, auprès d’Eugène Moguilevsky, Gerhard Oppitz, Eugène Indjic ou Michael Schäfer et reçoit aussi des conseils d’Anne Queffélec et de Leon Fleisher. Il remporte des concours internationaux, notamment, en 2004, le Concours Poulenc qui se déroule en Limousin. La discographie de Jean Muller, chez Membran, Polymnie, Soupir, Turtle Records ou Hänssler Classic, comporte notamment des enregistrements de pages de Chopin, Liszt, Brahms, Prokofiev ou Ligeti, les Variations Goldberg de Bach ou une intégrale des sonates de Beethoven. 

Le programme s’ouvre sur la Sonate K. 333, composée en l’année 1783, sans doute à Linz, selon de récentes recherches du musicologue Alan Tyson qui a souligné les affinités de climat de cette page avec la symphonie du même titre. Dès le début de l’Allegro initial, une irrésistible finesse irrigue un mouvement à la fois teinté de lumière et plein d’entrain. L’admirable Andante cantabile, voilé de pureté, comporte sa part de drame, tandis que le volubile Allegretto grazioso, virevoltant et plein de sève, conclut des moments de grâce. Jean Muller sert cette sonate avec la clarté et l’équilibre qui lui sont coutumiers. Sa manière d’aborder l’esprit mozartien est tout à fait convaincante.

Elle l’est tout autant dans la Sonate K. 533/494, œuvre que Mozart a écrite en deux temps, si l’on peut dire, puisque les deux premiers mouvements datent de janvier 1788, alors que le Rondo final ajouté a été composé en juin 1786. On se régale avec un Allegro bien contrasté, suivi par un Andante émouvant dont la partie centrale semble frémir sous l’effet d’une douleur pleine de tension. Le Rondo vient un peu à contretemps de cet état d’âme, mais il use d’un tempo modéré qui prépare avec subtilité une coda étourdissante. Jean Muller fait ici la démonstration d’une technique sans reproche et d’une sensibilité qui sait se mettre au diapason des climats de cette sonate de vastes dimensions.

Le programme est complété par la K. 309, composée à Mannheim en novembre 1777. L’énergique légèreté, qui se développe dans un Allegro con spirito qui ne manque pas d’émotion, fait place à la gravité de l’Andante un poco adagio et à ses enjolivements. Un Rondeau (sic) Allegretto grazioso clôture la sonate dans un élan de gaieté. On constate à quel point Jean Muller, au-delà du contrôle et de la mesure, adapte son jeu aux diverses nuances et aux variations d’atmosphère.

Voilà donc vingt sonates gravées par le pianiste luxembourgeois, avec un bonheur qui se renouvelle à chaque fois. L’élasticité de son jeu, servie par une prise de son aérée, fait de cette audition des instants bienvenus où se mélangent la fluidité et la fraîcheur, la volubilité et l’articulation. Une intégrale de notre temps qui mérite sa place sur les meilleurs rayons mozartiens.

Son : 9  Notice : 8  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Jean Lacroix

Vos commentaires

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.