John Wilson, un nouveau regard sur Daphnis et Chloé de Ravel 

par

Maurice Ravel (1875-1917) : Daphnis et Chloé, M.57. Sinfonia of London Chorus, Sinfonia of London, direction : John Wilson.  2022. Livret en anglais, allemand et français. 54’00. Chandos CHSA 5327. 

En matière de Daphnis et Chloé de Maurice Ravel, il y bien une problématique centrale : celle des centaines de fautes qui n’avaient jamais été corrigées depuis la première édition de la partition. Tous les chefs d’orchestre qui se confrontent à ce chef d'œuvre se repassent des listes de corrections à appliquer et certaines de ces listes, comme celle établie par Pierre Boulez, sont presque “légendaires”. 

En 2020, pendant le confinement pandémique, le chef d’orchestre John Wilson a amorcé un travail de fond pour proposer une édition révisée expurgée de ces erreurs. Sur base des sources, dont le manuscrit original ou la partition de la réduction piano/choeur, il a pu proposer le travail “qui reflétait le mieux les décisions finales du compositeur” comme il l’indique dans la notice de présentation. En effet, différentes modifications avaient également été apportées par Ravel au moment des répétitions. Ces dernières avaient été reportées sur les parties séparées mais pas reprises dans la partition de chef. John Wilson livre donc en première son travail au pupitre de ses musiciens londoniens.

La réussite de ce nouvel enregistrement est indéniable. En premier lieu, il faut saluer la performance de l’incroyable Sinfonia of London dont l’engagement est sans faille : puissance et éclat dans les tuttis, richesse de couleurs et finesse et élégance dans les solistes. Le Sinfonia of London Chorus est quant à lui d’une idéale homogénéité avec ce qu’il faut de flexibilité à la fois dans la transparence des timbres que dans la puissance de la projection. 

La baguette de John Wilson travaille le texte et on redécouvre cette œuvre. La texture instrumentale sonne allégée avec une plus grande mobilité de la masse orchestrale. La lisibilité des pupitres est exceptionnelle et rend encore plus impactants les contrastes et les césures narratives de ce ballet. Le geste compositionnel de Ravel, sa force et son génie sont ici magnifiés. Bien évidemment, la prise de son Chandos, techniquement superlative, nous place au cœur de cette interprétation magistrale qui fait date. 

Alors bien évidemment, la discographie de Daphnis et Chloé est bardée de références d’Ansermet (Decca) à François-Xavier Roth (HM) en passant par Pierre Boulez (DGG), mais cette version, unique par le regard qu’elle nous permet de retrouver sur ce chef d’oeuvre, est une pierre angulaire. 

Pierre-Jean Tribot   

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