Musique de chambre de prestige à Monte-Carlo

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Le public monégasque préfère généralement la musique symphonique à la musique de chambre, pourtant  L'affiche annonçant la venue du légendaire violoniste Gidon Kremer et du prodigieux pianiste Mikhaïl Pletnev a attiré beaucoup de monde.

Le concert débute avec la Sonate KV 304 de Mozart et l’interprétation des deux artistes permet de ressentir l'immense chagrin de Mozart lors de la composition de cette oeuvre, suite au décès de sa mère. Ce n’est pas seulement que la musique est dans une tonalité mineure, on saisit toute la solitude et l'angoisse de Mozart. Kremer la joue avec une toute petite sonorité, comme un souffle venant de l'au-delà. C'est terriblement mélancolique et poignant. Deuil et réconfort composent ce  Mozart céleste. Le génial Pletnev joue sa partie dans le même esprit et fait sonner l'immense Kawai comme un clavecin. Cette version est très différente de celle qu'on a l'habitude d'entendre.

La Sonate op.162 D.574 "Grand Duo" de Schubert est un cheval de bataille de Kremer. On ne peut pas oublier sa version, désormais légendaire, avec Valery Afanassiev parue chez Deutsche Grammophon. Il la joue désormais de façon plus intimiste. Pletnev est un merveilleux partenaire et leur interprétation est élégante, vivante et inspirante. On a l'impression d'être invité chez eux à la maison. 

La violoncelliste Giedrė Dirvanauskaitė rejoint la scène pour le Trio pour piano en la mineur, op. 50, « à la mémoire d’un grand artiste”  de Tchaïkovski. L’interprétation est ici décevante. Gidon Kremer n’est pas sous son meilleur jour :  la projection est limitée, les attaques ne sonnent pas, il n'y a qu'un vibrato assez pénible. Giedrė Dirvanauskaitė  est excellente d’autant plus que la partie de violoncelle est très exigeante. De son côté Mikhaïl Pletnev atteint les sommets de l'art pianistique.  Ses doigts ont cette sensibilité insondable qui transforme le plus banal arpège en coulée de finesses pures. Cependant on ressort déçu par cette lecture inégale. Le public est divisé. Les artistes offrent en bis un arrangement du Lied de Schubert Du bist die Ruh, D.776. , un moment magique qui laisse un bon souvenir final de ce concert.

Monte-Carlo, Auditorium Rainier III, Dimanche 12 Novembre 2023  

Carlo Screiber 

Crédits photographiques : Angie Kremer Photography

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