Francesco Piemontesi, l'intelligence musicale

par

Francesco Piemontesi © Marco Borggreve

Wolfgang Amadeus Mozart : Sonate pour piano, KV 533/494
Ludwig van Beethoven : Sonate pour piano n° 30, op. 109
György Ligeti : Cordes vides (Etudes pour piano I), Entrelacs (Etudes pour piano II)
Claude Debussy : Des pas sur la neige (12 Préludes, livre I), La Danse de Puck (12 Préludes pour piano, livre I)
Franz Schubert : Sonate pour piano, D 958
Du heut de ses 30 ans, Francesco Piemontesi vient de nous offrir un récital au programme très exigeant. On se souvient de son éclatant 3e Prix au Concours Reine Elisabeth (2007) et, ce soir, il atteint un niveau de perfection subjuguant. Sa Sonate de Mozart est d'une grande simplicité et d'une confondante évidence, son toucher est sans manière, aérien, chantant. Un son tout à fait mozartien. Mais qu'est-ce qu'un son mozartien ? La simplicité de rigueur, la rondeur dans l'attaque de la touche et une grande vocalité dans les lignes mélodiques. Piemontesi ne tombe jamais dans l'affèterie et conduit sans cesse la mélodie. L'auditeur comprend parfaitement où le compositeur voulait l'amener. Ce jeune pianiste suisse-italien comprend parfaitement la musique et la fait comprendre aisément. Le mouvement lent est joué dans la tendresse et nous fait regretter qu’elle ne soit pas donnée plus souvent. Le récital se poursuit avec la grande Sonate op. 109 de Beethoven. D'emblée, Piemontesi modifie l’approche de l’instrument et offre un son très différent. Dès les premières notes, on saisit le bond dans le temps. L'instrument pour lequel cette oeuvre fut écrite n'est plus le même, et la manière de s'exprimer non plus. Nous sommes plongés dans les tourments beethovéniens et le deuxième mouvement conjugue poigne et vitalité. Le dernier mouvement (thème et variations) est un des moments forts de ce concert : le public est attentif à cette musique qui nous porte à l'état de grâce quand elle est bien jouée comme ce soir. Francesco Piemontesi chante la vraie virtuosité : science des voix, connaissance approfondie de l'esprit beethovénien et grande générosité dans l'émotion. Il sait où il va et il donne en permanence l'impression que la musique naît sous ses doigts à l'instant même où il la joue. Après la pause, deux Études de Ligeti parfaitement maîtrisées, claires, bien construites et d'un grand soin du son. Même chose pour les deux Préludes de Debussy et la tension est à son comble dans Des pas sur la neige. Piemontesi impose naturellement au public une écoute sereine et silencieuse. En bis, deux autres Préludes de Debussy dont Feux d'artifice, très impressionnants de clarté et de facilité, presque sans pédale forte. 
Un récital mémorable et un programme sans complaisance.
François Mardirossian
Bruxelles, Conservatoire Royal, le 28 avril 2014

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