Mots-clé : Giuseppina Bridelli

La Calisto de Cavalli sur les bords de Loire

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Placé sous la direction musicale de Sébastien Daucé, le spectacle avait enchanté le public et divisé la critique du Festival d’Aix-en-Provence en cet été 2025. Coproduit avec les théâtres de Rennes, Caen, Avignon, Luxembourg, le Théâtre des Champs-Elysées à Paris et Angers Nantes Opéra, cette désormais fameuse et attendue Calisto de Francesco Cavalli faisait halte à Nantes et à Angers pour trois représentations.

Créé en 1651 à Venise sur un livret de Giovanni Faustini inspiré des Métamorphoses d’Ovide, l’opéra met en scène les dieux Jupiter et Mercure revenus sur terre pour voir ce qui s’y passe. C’est alors une étonnante combinaison de confusion des sexes et des sentiments dans toutes les directions possibles. Ce mélange de fornications de tous les possibles prête évidemment à toutes sortes d’extravagances scéniques mises en avant dès la redécouverte de ce merveilleux opéra au tout des débuts des années 1970 au Festival de Glyndebourne sous la direction de Raymond Leppard avec des solistes jouant parfaitement la comédie et un orchestre aussi hybride que pléthorique comme on les aimait à une époque non encore « historiquement informée ». Dans la production qui nous occupe, le côté incroyablement scabreux du livret est complètement édulcoré au profit d’une mise en scène assez sérieuse des situations au cours desquelles les errances des dieux sont l’exact miroir de celles des hommes vues à travers une lecture féministe cadrant avec nos préoccupations actuelles. À nous spectateurs de les comprendre en suivant le livret et en se perdant parmi les travestissements physiques et vocaux des différents protagonistes d’une histoire universelle dont les turpitudes viennent nous parler de nous-mêmes.

Au Grand-Théâtre de Genève, un sublime Atys

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Prodigieux spectacle que cet Atys de Jean-Baptiste Lully présenté par le Grand-Théâtre de Genève ! Son directeur, Aviel Cahn, a eu l’idée géniale de susciter une collaboration entre Leonardo Garcia Alarcon et le chorégraphe Angelin Preljocaj qui, pour la première fois dans sa carrière, assume la mise en scène d’un opéra. De cette tragédie lyrique sur un livret de Philippe Quinault, adorée par Louis XIV qui assista à la création à Saint-Germain-en-Laye le 10 janvier 1676, l’on a gardé en mémoire la production de 1987 de Jean-Marie Villégier dirigée par William Christie et reprise en 2011, production historicisante qui, dans son statisme empesé, suggérait l’esthétique théâtrale à la Cour du Roi Soleil.

Ici, tout est mouvement continuel comme dans un opéra-ballet dont la danse est l’élément vital. D’entente avec le directeur musical qui a opéré des coupes drastiques dans cette interminable partition, Angelin Preljocaj modifie le Prologue, hommage délibéré au tout puissant monarque, pour en faire une introduction à la tragédie elle-même. Mais le soir de la première du 27 février, comme dans les représentations ultérieures, Leonardo Garcia Alarcon s’adresse au public en évoquant les terribles événements actuels ; puis il présente l’hymne ukrainien dans un arrangement pour formation baroque qu’il a conçu à l’intention de sa Cappella Mediterranea. 

L’Orfeo de Monteverdi par Alarcón : un éblouissement

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Claudio Monteverdi (1567-1643) : L’Orfeo. Valerio Contaldo (Orfeo), Mariana Florès (La Musica, Euridice), Giuseppina Bridelli (La Messaggiera), Ana Quintans (La Speranza, Proserpina), Alejandro Meerapfel (Plutone), Salvo Vitale (Caronte), Nicholas Scott (Pastore I, Spirito III, Eco), Alessandro Giangrande (Pastore III, Apollo), Carlo Vistoli (Pastore II), Julie Roset (Ninfa), Matteo Bellotto (Pastore IV), Philippe Favette (Spirito) ; Chœur de Chambre de Namur ; Cappella Mediterranea, direction Leonardo García Alarcón. 2020. Notice en français, en anglais et en allemand. Livret en langue originale, avec traductions française et anglaise. 106.21. Un album de deux CD Alpha 720. 

Emouvantes cantates intimes d’Alessandro Scarlatti et Antonio Caldara

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Cantates pour voix seule avec violon. Alessandro Scarlatti (1660-1725) : Dove fuggo ? A che penso ? pour voix, violon et basse continue ; Appena chiudo gli occhi (Il sogno) pour voix, violon et basse continue. Antonio Caldara (1670-1736) : Vicino a un rivoletto pour voix, violon, violoncelle et basse continue ; Innocente cor mio pour voix, violon et basse continue.  Giuseppe Valentini (1681-1753) : Allettamento da camera en ré mineur, op. 8 n° 1 pour violon et basse continue. Giuseppina Bridelli, mezzo-soprano ; Quartetto Vanvitelli. 2020. Notice en anglais, en français et en italien. Textes des cantates en italien, avec traductions anglaise et française. 76.57. Arcana A487.

Ercole amante de Cavalli, une production éblouissante en DVD 

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Francesco Cavalli (1602-1676) : Ercole amante, opéra en un prologue et cinq actes. Nahuel di Pierro (Hercule), Anna Bonitatibus (Junon), Giuseppina Bridelli (Déjanire), Francesca Aspromonte (Iole), Krystian Adam (Hyllus), Eugénie Lefebvre (Pasithea, Clercica, Troisième Grâce), Giulia Semenzato (Vénus, La Beauté), Luca Tittoto (Neptune, Eurytus), Ray Chenez (Le Page), Dominique Visse (Lichas), etc. Chœur et Orchestre Pygmalion, direction Raphaël Pichon. 2019. Notice en anglais et en français. Pas de texte du livret, mais synopsis en anglais et en français. Sous-titres en italien, en anglais, en français, en allemand, en japonais et en coréen. 187.00. Deux DVD Naxos 2. 110679-80. Aussi disponible en Blu Ray.

Un faisceau de détails savoureux : les Noces de Figaro à Nancy

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Avant même qu’elle ne soit représentée, ce qui a d’abord retenu l’attention sur cette production, c’est l’identité de son metteur en scène : James Gray. Avant tout cinéaste reconnu, récompensé immédiatement en 1994 pour son premier film, Little Odessa, salué en 2013 pour The Immigrant, et tout récemment pour Ad Astra avec Brad Pitt. A Nancy, après le Théâtre des Champs-Elysées et avant Luxembourg, il était bien loin, spatio-temporellement, de l’univers de science-fiction de ce dernier film, tout en s’étant lancé un grand défi « spatial » : mettre en scène un opéra, Les Noces de Figaro, une première expérience.

Pari gagnant ! Rien de conceptuel dans son approche. Aucune « révélation » de sous-jacences historico-socio-psychologico-politiques jusqu’à lui ignorées dans l’œuvre de Mozart. Il s’en tient aux mots du librettiste et aux notes du compositeur. Même pas de vidéo chez ce cinéaste ! Rien ne vient distraire notre adhésion immédiate aux péripéties d’une intrigue exaltée par des chants superbes. Il est vrai qu’en procédant ainsi, il nous laisse libres, sans les solliciter, sans les imposer, de nos conclusions quant aux façons de procéder des « puissants » de ce monde-là, qui, humainement hélas, sont encore trop souvent les nôtres, dans leurs abus sexuels et de pouvoir.