Mots-clé : Karina Gauvin

 Une compositrice à l’épreuve du réel : « Fausto » de Louise Bertin au Théâtre des Champs-Elysées

par

La valeur des « femmes musiciennes » brille indiscutablement depuis la nuit des temps. Car -on ne le dit jamais- jusqu’au XIXe siècle, les interprètes, hommes et femmes, étaient par définition et en même temps, compositeurs- improvisateurs et enseignants.

La dissociation interprète/auteur s’étant opérée tardivement, il est normal de ne pouvoir identifier de compositrices es qualité qu’à partir des débuts de l’édition et, plus particulièrement, au cours de ce XIXe siècle d’où surgit Louise Bertin présentée également comme poétesse.

Partant du « Faust » de Goethe, elle en modifie l’esprit (plus de chien, ni de cave d’Auerbach, ni de bijoux, miroir ou course à l’abîme) et l’acclimate au goût français, sans excès de philosophie.

Quant au choix du sujet, la compositrice s’inscrit dans l’air du temps. Car Goethe est présent partout. 

Liszt au piano et le ténor Adolphe Nourrit ont déjà fait entendre à Paris les Lieder de Schubert composés sur les poèmes de Goethe.

Les Huit Scènes de Faust de Berlioz ont paru et les peintres, parmi lesquels Delacroix et Ary Scheffer, se sont emparés du mythe gothique tandis que la traduction de Gérard de Nerval date de 1828.

Autre curiosité, Fausto a été traduit en italien (assez littéralement pour ce que l’on peut en juger) puisque cette oeuvre semi-seria en quatre actes était destinée au Théâtre Italien.

Fille du directeur du Journal des Débats (Louis-François Bertin) et en dépit des infirmités laissées par la poliomyélite, la jeune femme fait vite preuve d’autant de dons que de tempérament.

La magnificence de voix au Festival d’Ambronay

par

Le Festival d’Ambronay fête ses 40 ans sous le thème de « musique baroque et métissée ». Pendant quatre week-ends prolongés (du jeudi au dimanche), se succèdent des musiciens et ensembles de renom, tels que Hespèrion XXI et Jordi Savall, Les Arts Florissants et William Christie, Les Correspondances et Sébastien Daucé, Pygmalion et Raphaël Pichon, ou encore Les Talens Lyriques et Christophe Rousset. Un laboratoire d’expériences pratiques et artistiques où la musique baroque et ancienne, ses programmes, allant de la musique médiévale à des créations contemporaines, sont devenus au fil des années de plus en plus variés. Le Festival Eeemerging (un festival dans le Festival, avec six jeunes ensembles de musique ancienne qui présentent le résultat de leurs résidences ; cette année l’ensemble Concerto di Margherita a remporté le prix du public), notamment, fait du Festival d’Ambronay une pépinière de jeunes talents. C’est un rendez-vous annuel baroque incontournable pour les mélomanes, les amateurs et les programmateurs.

La Folie et le « Baroque Lande » d’amour et de passion

Pour le troisième week-end, les trois concerts vocaux dont un opéra étaient tous de très haute volée. Le programme « Eclats de folie » (27 septembre) de Stéphanie d’Oustrac et l’Ensemble Amarillis (qui fête ses 20 ans) se déroule sous forme de récit lyrique ou opéra pastiche. Une fois entrée en scène, la Folie passe par tous les états dans son aventure amoureuse. L’histoire est contée par des pièces instrumentales et vocales de Campra, Marais, Purcell, Haendel…, aux caractères et ambiances fort différents, sans oublier l’irrésistible scène de tempête. Toujours profondément engagée dans son art, Stéphanie d’Oustrac incarne à merveille ce personnage clé du répertoire. Plus le concert avance, plus elle fait preuve d’une expressivité surprenante, avec une belle complicité de l’ensemble Amarillis qui met efficacement en relief l’évolution sentimentale de l’héroïne.

Un chef-d’œuvre à découvrir : ASCANIO

par

Camille Saint-Saëns, ASCANIO, opéra en 5 actes et 7 tableaux. Bernard Richter (Ascanio) Jean-François Lapointe (Benvenuto Cellini) Clémence Tilquin (Colombe d’Estourville) Eve-Maud Hubeaux (Scozzone) Karina Gauvin (la Duchesse d’Etampes) Jean Teitgen (François I er) Mohammed Haidar (un Mendiant) Joé Bertili (Pagolo) Raphaël Hardmeyer (Charles-Quint) Bastien Combe (D’Estourville) Maxence Billiemaz (D’Orbec) Olivia Doutney (une Ursuline) / Chœur de la Haute Ecole de Musique de Genève / Chœur Du Grand-Théâtre de Genève / Orchestre de la Haute Ecole de Musique de Genève / Guillaume Tourniaire. 2017 DDD – 191’17. Présentation en français et en anglais. Livret en français et en anglais. Chanté en français. 3 CD B Records LBM 013.

Transcendant Haendel

par

Karina Gauvin (photo Michael Slobodian)

« Rinaldo » version oratorio
En novembre 1710 Haendel arrive à Londres. En deux semaines il compose « Rinaldo » qui paraît sur la scène du « Queen's Theatre » à Haymarket, le 24 février 1711 pour 15 représentations. Bien entendu -comme c'est l'usage- les deux tiers des arias sont taillées dans des partitions précédentes, « Almira » (1705), « La Resurrezione » (1708), « Agrippina » (1710) et autres pages composées pour l'Italie. Les meilleurs et plus habiles chanteurs sont recrutés pour la circonstance. Deux castrats, deux sopranos, une contra-alto, une basse et deux personnages (disparus dans l'actuelle production : le magicien chrétien et le Hérault).

Une Armide sombre, dramatique

par

© Monika Rittershaus

Armide occupe une place particulière dans l’oeuvre de Gluck. Opéra atypique? Oui, certes. Il est tout d’abord le seul dont la trame ne soit pas mythologique, s’inspirant du merveilleux chrétien de la Jérusalem délivrée du Tasse. Ensuite, cette trame est construite sur un livret datant du siècle précédent : Gluck, en effet, dans un superbe défi (1777), a repris le vieux livret de Quinault pour l’Armide de Lully (1686), geste assurément unique dans l’histoire du théâtre lyrique.