Mots-clé : Maxime Pascal

Une re-création, une récréation, une distanciation brechtienne et quelques points de vue hélas toujours pertinents

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Le Festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence fête son 75e anniversaire, voilà qui manifeste une magnifique pérennité faite de créations dont beaucoup n’ont pas été oubliées. Cet anniversaire, il en inaugure les festivités de façon originale.

Une re-création !

Au programme, L’Opéra de quat’sous de Brecht-Weill ! Et non pas le Die Dreigroschenoper, la version allemande originellement créée à Berlin en 1928 et que nous aurions vécue avec des surtritres. L’œuvre a été retraduite par Alexandre Pateau, avec des mots, des expressions, des registres de langage d’aujourd’hui. Sans sollicitation, en toute fidélité aux propos originaux. Ce texte nous atteint donc directement.

Mais surtout, ceux qui interprètent cette partition chantée-parlée, ne sont pas des chanteurs qui jouent (et l’on sait combien le plus souvent leur diction est apprêtée), mais bien des comédiens qui ont appris à chanter. Et quels comédiens puisqu’il s’agit de ceux de la Comédie-Française. Sans rien perdre de la précision et de l’énergie de leur jeu, ils ont accompli un travail remarquable. Certains d’entre eux sont époustouflants de vérité vocale. Ils dansent aussi (chorégraphie de Johanna Lemke).

Au cœur de la forêt « Like Flesh » de Cordelia Lynn

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C’est à une originale, étrange, belle et pertinente expérience lyrique que Cordelia Lynn, la librettiste, Sivan Eldar, la compositrice, Maxime Pascal, le chef d’orchestre, et Sylvia Costa, la metteure en scène, nous ont invités avec leur Like Flesh auparavant créé à l’Opéra de Lille, et justement récompensé du prix FEDORA pour l’Opéra 2021.

C’est doublement que cet opéra de chambre bien d’aujourd’hui nous emmène au cœur de la forêt, dans sa thématique et dans ses moyens musicaux et scénographiques.

Une femme a suivi son mari, un bûcheron, dans la forêt. Elle s’étiole dans cette vie qui n’est que destruction, abattage encore et encore, soumission aux façons d’être suicidaires de nos sociétés. Le surgissement d’une étudiante, qui va l’aimer, précipite sa destinée : elle se métamorphose en arbre. La voilà désormais au cœur de la forêt.

La partition de Sivan Eldar, interprétée en direct dans la fosse par des membres de l’Orchestre de l’Opéra national de Lorraine et traitée informatiquement grâce à Augustin Muller de l’IRCAM est telle que nous aussi, les spectateurs, nous voilà désormais au cœur de la forêt. 

Une soixantaine de haut-parleurs ont en effet été disséminés dans la salle, sous les fauteuils, immergeant le public dans des sonorités mouvantes, pareilles aux bruissements, aux souffles, aux balancements des arbres dans une forêt. Fascinante expérience sonore qui, de spectateurs distanciés, nous métamorphose en témoins impliqués.