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Les Chorégraphes de Diaghilev (3) : Serge Lifar

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Sans doute faudra-t-il attendre un certain nombre d'années pour que, les passions s'étant calmées et certaines personnes ayant disparu du devant de la scène, on puisse sereinement considérer le travail de Serge Lifar, non seulement à l'Opéra de Paris où il régna pendant près de trente ans, mais dans le monde du spectacle.

Aujourd'hui, huit ans après sa mort (désormais 34 ans car cet article a été rédigé en 1994), nous devons nous en tenir à un certain nombre d'évidences. D'abord, c'est grâce à Serge Lifar que l'image de Serge de Diaghilev est demeurée si présente dans la mémoire de notre temps. Son goût et son sens inné de collectionneur lui ont permis d'être non seulement le témoin -le dernier, le plus jeune- d'une épopée qui a bouleversé la sensibilité européenne et l'esthétique du spectacle durant près de vingt ans -de 1909 à 1929- mais encore d'être à même de le prouver, par son travail, ses livres et ses conférences, grâce à tout ce qu'il avait amassé comme souvenirs. 

Ballets russes (2) : Diaghilev du "Monde de l'Art" aux ballets russes

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L'activité de Diaghilev et l'héritage esthétique qu'il a suscité sont tellement liés aux Ballets Russes à Paris que l'on en vient souvent à ignorer ou à minimiser le chemin qu'il a parcouru auparavant dans son propre pays. Et s'il est exact que malgré la portée exceptionnelle de son entreprise parisienne, son activité de mécène et d'organisateur a été une alternance de succès et de revers de fortune, il s'avère que les scintillements de son étoile autant que ses éclipses épisodiques l'ont accompagné depuis ses débuts.

Arrivé à Saint-Pétersbourg en 1890 à l'âge de 18 ans après une enfance passée en majeure partie dans la ville de Perm, aux avant-postes de l'Oural le jeune Diaghilev est déjà passionné de théâtre et de musique. Il prend des cours de chant et s'essaie même à la composition. Las, ses débuts créatifs sont étouffés dans l'oeuf par le verdict sans merci que lui décerne Rimski-Korsakov. Il ne deviendra jamais musicien. Mais simultanément la rencontre avec un groupe de peintres, dont font partie Alexandre Benois, Léon Baskt, Konstantin Somov -futurs grands noms des Ballets Russes- et esthéticiens comme Filosofov (son cousin) et Nouvel, l'aiguille sur une nouvelle orientation esthétique. C'est dans le domaine de la critique d'art et de l'organisation artistique que se formera la personnalité de Diaghilev. Plusieurs voyages en Europe en 1890-95 lui ont permis de parfaire sa culture artistique. A partir de 1896, il publie dans Les Nouvelles et le Journal de la Bourse de Saint-Pétersbourg des articles sur des expositions de peinture, tout particulièrement sur le groupe de "peintres ambulants" (peredvijnki) dont font partie Vasnetsov, Répine et Sourikov. 

Tchaïkovski et le ballet

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Il est impossible aujourd'hui de penser au ballet classique sans penser à Tchaïkovski. La popularité permanente de ses trois grands ballets, Le Lac des Cygnes, La Belle au Bois Dormant et Casse Noisette est due avant tout à la haute qualité de sa musique, dans une mesure bien plus grande que pour tout autre ballet du dix-neuvième siècle.

Grâce aux vertus dramatiques et lyriques de cette musique, chorégraphes et danseurs purent s'épanouir dans des conditions sans précédent (comparables seulement à celles de l'ère de Diaghilev par la suite), fixant pour les générations à venir de nouvelles normes de qualité artistique et technique dans le domaine du ballet classique.

Pour apprécier à quel point ces normes ont été enrichies par la musique de Tchaïkovski, il n'est que de remonter en arrière et d'imaginer ce qu'était la musique de ballet au dix-neuvième siècle avant son arrivée. Bien que la danse ait occupé une place importante dans l'Opéra de cette époque, elle ne servait généralement pas à faire avancer l'action. Considérés comme une interruption au milieu du drame, les divertissements tenaient un peu la place des sorbets glacés entre les plats copieux, voire indigestes, d'un long banquet.

La musique de ballet, même des compositeurs les plus prestigieux, comme Berlioz, Wagner ou Verdi, n'atteint jamais au niveau de qualité du reste de leurs opéras. Comme l'écrivait un critique à propos de Delibes, il est "... très difficile d'écrire pour la danse avec un peu de goût artistique ou de style... M. Delibes a réussi à éviter la banalité."