Tania Giannouli en solo

par

Solo. Tania Giannouli (1977-). Tania Giannouli. 71’50 – 2023 – Livret : anglais. Rattle. D139. 

Je vous ai parlé de la pianiste grecque à l’occasion de sa prestation en trio au Walden Festival cet été à Bruxelles, au même moment où elle publie, auprès du label néo-zélandais Rattle, au programme ambitieux (un choix musical peu soumis aux contraintes commerciales, faisant fi des frontières entre musiques classique, jazz, expérimentale et du monde – pour autant que le musicien crée, pour lui et pour l’art), Solo, un disque qui présente 24 de ses compositions, qu’elle interprète elle-même au piano, enregistrées au Megaron, le Concert Hall d’Athènes.

On y retrouve l’étendue de son inspiration, entre écriture et improvisation ; le regard, souvent intuitif, de Tania Giannouli se pose sur la surface du monde, toutes œillères bannies : ses morceaux, parfois brefs (1’33 pour exposer, dans Metal Snake, une idée résonnante ; 1’13 pour instiller, avec Gecko, trouble, doute et anxiété), parfois plus diserts dans leur développement (Novelette prend le temps d’un conte pour dérouler sa narration pointilliste ; l’intrigant Spiral crée, fait monter, relâche une tension digne du Troisième homme de Graham Greene ; Same Dream, aquatique, transporte sur une plage entre chaud et froid, entre sel et douceur ; Folegandros surgit des entrailles de la terre), témoignent de son habileté à embrasser la palette des émotions humaines, abandonnée et fragile, suggérant à chacun, à partir de ses propres ressentis, ce qui fait la vie de chacun, ses joies, ses peines, ses peurs et ses audaces.

Solo fait cadeau d’une musique lyrique et éclectique, complexe et accessible, à la fois personnelle et universelle, de celles qu’on s’approprie peu à peu, avec une profondeur (et des trouvailles sonores, souvent issues de la préparation du piano) qui, à chaque nouvelle écoute, interloque et suspend le mouvement. « Jouer en solo, dit Giannouli, est […] la chose la plus libératrice qui soit. […] Et pourtant, il n'y a rien de plus exigeant qu'un récital solo. Seule sur scène, on est obligée d'être honnête, de ne rien retenir, de ne rien simuler, de se permettre d'être vulnérable. Ce faisant, si l'on est honnête, on trouve de la force. »

Son : 8 – Livret : 5 – Répertoire : 8 – Interprétation : 8

Chronique réalisée sur base de l'édition digitale.

Bernard Vincken

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