Un Anglais à Paris : John Wilson dirige des musiques de film

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Ce mercredi 13 novembre, la Philharmonie de Paris déroulait le tapis rouge et titrait « Hollywood Rhapsody » : un filage de thèmes majeurs du grand écran, avec dans le rôle-titre du chef d'orchestre le très british John Wilson. Cette soirée méritait un coup de projecteur : car loin des ciné-concerts qui rediffusent nos blockbusters modernes, ici, c’est au son des grands monuments d’Hollywood que le public venait rêver.

Et on peut dire qu’il y en avait pour tous les goûts. D’abord, les incontournables roulements de tambour de la Fanfare de la Twentieth Century Fox (Alfred Newman) ; puis ceux de la Kings Row Fanfare (Erich Wolfgang Korngold), qui cédèrent leur place au thème de Star Wars, composé (faut-il le rappeler ?) par John Williams -leur juxtaposition n'ayant rien d'un hasard, puisque Korngold a de toute évidence inspiré Williams. L’homorythmie de l’Orchestre de Paris était grisante, et le lyrisme des cordes parfaitement dosé. On eut ensuite droit à quelques minutes de glamour hollywoodien avec Laura (David Raksin), puis, pour contraster, à l’angoissante Suite pour cordes issue de Psychose (Bernard Herrmann). Cette partition, vous la connaissez bien. Plus stridente, plus pesante que les morceaux précédents -et cette attente insoutenable de l’instant fatidique. La douche, le rideau… vous savez. Ici encore, une maîtrise délectable de la masse orchestrale, notamment dans la gestion des pianissimo. Heureusement, Korngold revint nous libérer de notre angoisse avec une ravissante suite tirée des Aventures de Robin des Bois (pas celles de Kevin Costner), où se mêlent l’amour et les armes, le grandiloquent et le grandiose. 

Après l'entracte, l’Orchestre de Paris attaqua avec le thème très syncopé et enlevé des Grands Espaces de Jerome Moross, puis une Suite tirée d’Autant en emporte le vent (BO signée Max Steiner). Inutile de vous dire que cette puissante partition sut nous donner quelques nouveaux frissons. John Wilson nous emmena sur une autre Suite, celle d'Une place au soleil (Franz Waxman) : une atmosphère suspendue, celle des crépuscules du siècle dernier, avec ici plusieurs envolées claironnantes d’un saxophone -sublime. On eut enfin droit à un délicieux « medley » de Tom et Jerry, basé sur la partition de Scott Bradley, mais arrangé par Peter Morris et ... John Wilson lui-même. Le résultat est franchement tordant, les jeux de timbre se démultiplient partout sur scène, le tuilage des pupitres est soigné, et les percussionnistes rivalisent de bruitages et de cascades expertes pour reproduire en live les effets sonores du cartoon. Un succès franc auprès du public -double-succès même pour John Wilson, qui en plus d’être un arrangeur brillant, est un chef élégant, pétillant, au geste net et efficace.
Cette soirée justement, il fallut la conclure, avec la fameuse « Parade of the Charioteers » de Ben Hur (signée Miklós Rózsa), et son boléro martial, emphatique. Petit rappel arraché par le public, puis clap de fin. On coupe les caméras, on remballe, déjà nostalgique mais ragaillardi pour la fin de semaine, des images de la princesse Léia et de l’Ouest américain dans la tête. Il n'aura manqué que les pop-corns.

Paris, Philharmonie, 13 novembre 2024

Léon Luchart

Crédits photographiques : Sim Canetty-Clarke

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