Beethoven sous les doigts d’Elisabeth Leonskaja

par

Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Concerto pour piano n°3 en do mineur, op.37 ; Concerto pour piano n°4 en sol majeur, op.58. Elisabeth Leonskaja, piano ; Orchestre National du Capitole de Toulouse, direction Tugan Sokhiev. 2017 et 2018. Livret  en français, allemand et anglais. 73’ Warner Classics. 5054197263095

Née à Tbilissi en 1945, Elisabeth Leonskaja donne son premier concert à l’âge de onze ans. Ancienne élève du prestigieux Conservatoire Tchaïkovski de Moscou, elle est lauréate de plusieurs concours, dont le Concours Reine Elisabeth (CMIREB). Souvent décrite par les médias comme timide, on ne mentionne plus ses remarquables enregistrements tels que ceux des concertos pour piano de Tchaïkovski ou encore de Chopin sous la direction de Vladimir Ashkenazy. 

Après le succès de son dernier album dédié à l’intégrale des Sonates pour piano de Schubert, la pianiste géorgienne revient avec les Concertos pour piano n°3 et 4 de Beethoven, deux incontournables du répertoire. 

Dans le Concerto n°3, Leonskaja reste fidèle à ce qu’on a pu mentionner précédemment, sa modestie. Elle nous livre un Beethoven sobre, loin de tout pathos et caricatures mielleuses. La gamme introductive en do mineur mélodique éclate tel un grondement venant briser la longue introduction orchestrale. Malgré des bruits parasites probablement dus à des microphones pas assez directifs, effet involontaire ou stylistique, il n’en reste pas moins que cela nous assure une plus grande immersion, n’en déplaise à certains. S’ensuit une série d’arpèges en staccato qui, par son exécution lourée, ôte malheureusement une certaine brillance à l’interprétation. Le deuxième mouvement nous offre a contrario une bouffée d’air, avec un thème introductif aéré, posé et délicat. Nous noterons cependant un rondo légèrement (trop) traînant qui, au lieu d’être joué du bout des doigts à l’instar de la pianiste allemande Alice Sara Ott (DGG), provient du fond du clavier et alourdit naturellement les traits fugaces de ce dernier épisode. L’interprétation de ce concerto par Leonskaja se résumerait donc par une certaine droiture pianistique qui, malgré la grande expressivité et générosité de la pianiste, nous confine dans un Beethoven peut-être un peu trop scolaire. 

Le Concerto n°4 est quant à lui sublime. Les traits sont parfaitement exécutés et l’aspect scolaire précédemment mentionné est tout particulièrement apprécié. L’Andante en mi mineur, connu pour son thème austère, mais malgré tout contrasté par la mélodie plaintive du piano, nous tire, sous les doigts de la pianiste géorgienne, entre espoir et mélancolie. Il est joué avec une certaine pudeur, ce qui nous renseigne d’autant plus sur la personnalité de Leonskaja. Nous regretterons justement la brièveté de cet Andante. Nous aurions aimé que le temps se suspende et que les murmures de la pianiste demeurent indéfiniment. L’œuvre se clôture par un Rondo qui, à l’instar du précédent concerto, conserve une allure traînante, mais se révèle tout de même brillant et étincelant. 

Les deux concertos ont été enregistrés avec le chef russe et ancien directeur musical de l’Orchestre National du Capitole de Toulouse, Tugan Sokhiev. Récemment victime de cancel culture après avoir été contraint de choisir entre ses musiciens russes et français, il a préféré démissionner de ses postes de directeur musical du Théâtre Bolchoï (Moscou) et de l’Orchestre National du Capitole (Toulouse, ville jumelle de Kiev). Néanmoins, nous aurons le plaisir de le retrouver avec l’Orchestre toulousain lors des Festivals de Montreux ainsi qu’au Festival Enescu de Bucarest. 

Note globale: 7

Clément Bellenger

Chronique réalisée sur base de l’édition numérique. 

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