Chostakovitch en puissance orchestrale avec Jaap van Zweden

par

Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n°5 en ré mineur ; Symphonie n°9 en Mi bémol majeur. Hong Kong Philharmonic Orchestra, direction : Jaap van Zweden. 2022. Livret en anglais. 67’10’’ Naxos 8.57459. 

Quelques mois après une Symphonie n°10 de belle facture, Jaap van Zweden et ses musiciens du Hong Kong Philharmonic nous proposent une couplage classique des Symphonies n°5 et n°9. 

En matière de Symphonie n°5, Jaap van Zweden signe ici son deuxième enregistrement après un premier réalisé il y a une quinzaine d'années lors de son bref passage à la direction musicale de l’Orchestre philharmonique royal des Flandres (un disque Ambroisie). Pour ce nouvel essai, le chef néerlandais impose une lecture de pure puissance orchestrale qui avance comme un rouleau compresseur. Point de creusement émotionnel comme avec Sanderling (Berlin Classics), d’acuité comme avec Mravinsky (Melodiya ou Warner) et Kondrashin (Melodiya), de transe dyionisaque façon Bernstein (Sony) ou de pureté instrumentale brute de Wigglesworth (bis), mais un rouleau compresseur qui avance inexorablement. Les mouvements d’introduction et de conclusion supportent assez bien ce traitement du fait de leur pure virtuosité d’autant que Jaap van Zweden surjoue les climax, à l'inverse les mouvements centraux manquant d’ironie et de profondeur.  La prise de son, fort matte et au spectre rétréci, renforce cette impression de bloc compact orchestral. 

La Symphonie n°9 est également traitée dans une optique de pure d’ampleur symphonique et le chef tente de lui insuffler une gravité et une puissance d’impact que l’on ne lui associe pas de prime abord. La direction se veut toute aussi unilatérale mais passe à côté du second degré et de l’ironie de cette œuvre d’anti-propagande triomphaliste après la fin de la Grande guerre patriotique. On est ici loin de la mécanique implacable de Petrenko (BPO) ou Kitaenko (Capriccio). Certes, le chef va au bout de ses idées, mais on passe à côté du message de la partition et certains passages saturent en matière de puissance dynamique avec des pupitres poussés à leurs paroxysmes des nuances. 

Le Hong Kong Philharmonic Orchestra se montre valeureux et engagé, même si le traitement instrumental favorise le bloc compact des pupitres au détriment des individualités. Les amateurs de direction, en mode démonstration de puissance, pourront aimer le parti pris, crânement assumé, de Jaap van Zweden. Les autres en resteront aux références citées.

Son : 7 – Livret : 8 – Répertoire : 10 – Interprétation : 7

Pierre-Jean Tribot

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