Djansug Kakhidze à Tbilissi

par

Volume 1 : Sergei Rachmaninov (1873-1943) : Symphonie n°2 en mi mineur, Op. 27 – Gustav Holst (1874-1934) : Les Planètes
Tbilissi Symphony Orchestra, Djansug Kakhidze
2015/1997-DDD-cd1 : 57’50, cd2 : 53’37-textes de présentation en anglais et géorgien-Cugate Classics-CGC001-2

51gqJFzG6dLVolume 2 : Piotr Illich Tchaïkovski (1840-1893) : Symphonie n°4 en fa mineur, Op. 36, Symphonie n°5 en mi mineur, Op. 64, Capriccio Italien, Op. 45 – Modest Moussorgski/Orchestration Ravel (1839-1881) : Tableaux d’une exposition
Tbilissi Symphony Orchestra, Djansug Kakhidze
2015/1997-DDD-cd1 : 76’59, cd2 : 63’28-textes de présentation en anglais et géorgien-Cugate Classics-CGC002-2

51CUlOU1B1LVolume 3 : Piotr Illich Tchaïkovski (1840-1893) : Symphonie n°6 en si mineur, Op. 74 – Nikolaï Rimski-Korsakov (1844-1908) : Capriccio Espagnol, Op. 34 – Igor Stravinsky (1882-1971) : L’Oiseau de feu (1917), Le Sacre du printemps
Tbilissi Symphony Orchestra, Djansug Kakhidze
2015/1997-DDD-cd1 : 62’12, cd2 : 59’08-textes de présentation en anglais et géorgien-Cugate Classics-CGC003-2

A l’occasion des 80 ans de la naissance du chef d’orchestre Djansug Kakhidze, le label Cugate Classic réédite en trois volumes non moins de dix œuvres exécutées et enregistrées par le Tbilissi Symphony Orchestra en 1997. Décédé en 2002, Kakhidze est né à Tbilissi, en Géorgie, en 1935. Diplômé en direction d’orchestre et d’opéra du Tbilissi State Conservatory, le jeune chef d’orchestre prend très rapidement la direction de nombreux ensembles réputés principalement en Géorgie, ce qui ne l’empêchera pas de voyager à l’international, notamment en Pologne, en France, en Italie, aux Pays-Bas, en Grèce, aux Etats-Unis, à la tête d’ensembles tels que le St. Petersburg Philharmonic Orchestra, le Moscow Philharmonic Academic Symphony Orchestra, le Boston Symphony Orchestra, l’Orchestre de Paris ou encore le Gewandhaus Symphony Orchestra Leipzig… Proche de la pratique vocale, il fonde en 1957 l’ensemble vocal masculin « Schvidkasta », ensemble qui lui permettra d’obtenir deux Médailles d’or, l’une au Sixième World Festival of Youth and Students à Moscou, et l’autre à l’occasion de l’Exposition Universelle de Bruxelles. Malgré son passage en Pologne, Kakhidze demeure un fervent patriote et un combattant infatigable pour la culture de son pays. En tant que directeur artistique du Georgian State Symphony Orchestra, il permet à l’ensemble d’atteindre son plus haut niveau de maturité en développant notamment un long travail sur le répertoire tout en produisant de nombreux concerts, toujours couronnés de succès, en Union Soviétique et à l’étranger. Il fonde une nouvelle salle symphonique dont l’acoustique est telle que le Centre pour la musique et la culture de Tbilissi s’y installe, et créé en 1993 un nouvel orchestre : le Tbilissi Symphony Orchestra avec lequel il enregistre pas moins de 150 enregistrements pour des labels prestigieux. La même année, le Centre, en collaboration avec l’orchestre, fonde le Festival International « l’Automne à Tbilissi » où se côtoient tant des musiques classiques que jazz et folk à travers des concerts où se distinguent de nombreux invités dont la réputation internationale n’est plus à faire. Derrière ce parcours impressionnant dominé par la pratique musicale classique, un autre volet, et non pas des moindres, émerge de la vie artistique du chef : la musique de film. En plus de diriger la plupart des bandes originales des films de son pays, Kakhidze signe aussi, en tant que compositeur, la musique de plusieurs métrages.
Pour cette série hommage de trois doubles disques, l’auditeur retrouvera dix œuvres enregistrées en 1997 au Centre pour la musique et la culture de Tbilissi. Tant dans Tchaïkovski que dans Stravinsky ou Holst, on retrouve un chef investi, n’hésitant pas à articuler parfois d’une manière inhabituelle, prouvant ainsi que des multitudes d’interprétations sont possibles et respectables. Dans la Symphonie n°4 de Tchaïkovski, on appréciera notamment la fougue du dernier mouvement avec une qualité de cordes irréprochable et une balance idéale entre elles, les percussions et l’harmonie, mais aussi le côté très réfléchi et intérieur du second mouvement. Si les tempi sont relativement peu allants dans Les Tableaux d’une Exposition, la coloration des changements harmoniques mais aussi la grande maîtrise de la masse orchestrale, notamment dans les différentes « Promenades » qui lient les pièces entre elles avec fluidité sont à souligner. Autres sommets de la littérature musicale : les Cinquième et Sixième Symphonies de Tchaïkovski. Sans doute les pièces les plus abouties de ces enregistrements, elles ne souffrent à aucun moment d’un pathos langoureux mais offrent au contraire une direction rudement bien menée, tant dans la construction des phrases que dans la compréhension de la structure générale en affichant parfois même une forme de pudeur, comme dans la Symphonie n°2 de Rachmaninov. La suite de l’Oiseau de Feu bénéficie ici d’une lecture expressive et éclairée, non dénuée d’un certain charme, notamment dans les différents soli de la « Ronde des Princesses » contre la fureur rythmique et percutante de la « Danse infernale du roi Kastchei ». Une énergie toute aussi performante s’installe dans le Sacre du Printemps que Kakhidze semble maîtriser à la perfection tant les valeurs de notes et les effets sonores sont respectés. Bien sûr, quelques fragilités plus techniques cette fois se font entendre, notamment dans l’harmonie (« Bydlo » des Tableaux par exemple), mais elles ne viennent pas perturber le regard profond d’un chef précis et amoureux de la musique.
Voilà une série hommage réussie, passionnante, avec un regard sur un homme pas nécessairement connu du grand public et qui a pourtant contribué de manière magistrale à l’évolution de la musique.
Ayrton Desimpelaere

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