Giuseppe Sammartini, une poignée de sonates pour flûte dans une sage lecture d’agrément

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Giuseppe Sammartini (1695-1750) : Sonates en sol majeur, ré mineur, ré majeur, sol mineur, fa majeur Sibley no 25, 20, 17, 14, 27. Tamar Lalo, flûte à bec. Daniel Oyarzabal, clavecin, orgue. Josetxu Obregón, violoncelle. Eyal Street, basson. Ismael Campanero, violone. Jadran Duncumb, luth. Novembre 2021. Livret en anglais, allemand, espagnol. TT 60’01. Pan Classics PC 10443

Né à Milan d’un père français, Alexis Saint-Martin qui lui enseigna le hautbois, Giuseppe Sammartini en devint un des plus grands virtuoses de l’époque. Le frère aîné de Giovanni Battista, un des précurseurs de la symphonie classique, brilla dans les orchestres londoniens dès 1729, avant d’être employé auprès du Prince de Galles (1736) jusqu’à sa mort, ses dernières années ouvrant une large place à la composition. Il jouait aussi de la flûte, pour laquelle il écrivit une trentaine de pièces avec basse continue, laissant supposer qu’elles datent d’avant son départ pour l’Angleterre, où d’ailleurs l’instrument déclinait au profit de la traversière. La majorité d’entre elles se destinent à la tessiture d’alto, expliquant la tonalité dominante de fa majeur, même si des aires moins attendues sont explorées (ré majeur).

Dans un second volume consacré aux Sonates, Andreas Böhlen puisait au fonds de la Sibley Music Library de l’Eastman School de Rochester (USA). Le disque de Tamar Lalo partage trois sonates (no 14, 17 et 20 dans ce catalogue) avec celui de son confrère allemand, dont la notice était également signée de David Lasocki. Celle-ci mentionnait aussi les recherches de Benoit Laurent, qui a défendu en 2021 à l’Université libre de Bruxelles sa dissertation doctorale, laquelle parmi ses investigations a pu établir que Giuseppe Sammartini émargeait pour la saison 1728-1729 au Théâtre de La Monnaie.

À l’instar du trio réuni autour d’Andreas Böhlen, le continuo recourt ici à clavecin, violoncelle et luth, mais s’adjoint aussi le renfort du basson d’Eyal Street (sonate 20, 25, 27) et le violone d’Ismael Campanero (sonate 25). Dans la Sonate en ré majeur, l’orgue de Daniel Oyarzabal se tait dans l’andante central, laissant respirer cette sicilienne à 12/8 sur les pizzicati de Josetxu Obregón et l’écheveau pincé par Jadran Duncumb. On ne peut rien vous dire de la facture des instruments employés, non précisée dans le livret, pas même pour la soliste. En ce CD, la musicienne israélienne se distingue par son souffle voluptueux, son tracé élégant, sa sensibilité introvertie.

Hormis quelques étapes où elle fend l’armure (final de la Sonate en sol majeur), son interprétation tend cependant à lisser la variété de ces pages dont l’imagination et le caractère imprévisible se trouvent tiédis. Le haut volume sonore de la gravure ne saurait masquer que les audaces mélodiques, rythmiques, harmoniques se voient édulcorées. Pourquoi s’en tenir à une telle prudence expressive ? Le charme de l’ample adagio de la Sonate en sol mineur, le premier andante de la Sonate en fa majeur ne mériteraient-ils un relief plus animé ? Au-delà du parcours d’agrément sagement cultivé par l’équipe, dont le bon goût n’est jamais pris en défaut, ces œuvres ne réclament-elles pas un surcroît de tempérament ? 

Son : 8 – Livret : 8,5 – Répertoire : 9 – Interprétation : 7,5

Christophe Steyne

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