Karol Szymanowski, 140 ans

par

Le compositeur, pianiste et musicographe polonais Karol Szymanowski est né le  à Tymochivka (alors en Russie, aujourd'hui en Ukraine) et décédé le  à Lausanne.

Rappel pour les plus jeunes
Karol Maciej Szymanowski naît dans une riche famille noble, à Tymoshivka, aux confins est de l'ancienne Pologne, portant le blason Korwin-Ślepowron, ce qui lui permet par la suite de vivre dans un confortable isolement, favorable à sa personnalité et sa création. Boiteux à la suite d'un accident dans sa petite enfance, timide de nature, il grandit au sein d'un environnement familial ouvert sur le monde artistique, ses frères et sœurs faisant tous de la musique, de la peinture ou de la poésie. Très tôt, il est initié au piano (dès l’âge de 7 ans). Entrant en 1901 au Conservatoire de Varsovie, il y bénéficie de l'enseignement d'un des plus illustres maîtres de l'époque en la personne de Zygmunt Noskowski. C'est là qu'il rencontre notamment Arthur Rubinstein, qui servira beaucoup sa musique, mais également des musiciens qui formeront avec lui peu de temps après le groupe « Jeune Pologne en musique » : Apolinary Szeluto, Grzegorz Fitelberg et Ludomir Różycki. Protégés par le prince Władysław Lubomirski, Szymanowski et ses partenaires donnent vie à leurs idéaux avant-gardistes dans une Pologne encore très marquée par l'œuvre conservatrice de compositeurs tels que Józef Elsner, Stanisław Moniuszko, Władysław Zeleński et Zygmunt Noskowski. Leur musique se veut en ce sens contemporaine, résolument européenne et occidentale.

Épris de culture austro-allemande, Szymanowski effectue de longs séjours à Vienne et en Allemagne où il rencontre de grands succès notamment avec sa Symphonie no 2 op. 19 et sa Sonate no 2 op. 21. Il s'oriente par la suite vers de nouvelles voies esthétiques.

Cherchant à s'enrichir de la découverte de contrées toujours plus mirobolantes, Szymanowski réalise de nombreux périples au cours des années 1908-1914. Il séjourne en Italie et en Afrique du Nord, voyages qui l'influencent notamment dans l'écriture du livret de son opéra Le Roi Roger (Roger de Hauteville de Sicile ), mais également en France. Cette fascination pour l'Orient et la culture méditerranéenne se retrouve également dans sa nouvelle Efebos où il décrit ses amours masculines et notamment son amour pour le jeune Boris Kochno. Selon le musicologue anglo-parsi Kaikhosru Shapurji Sorabji (Mi contra fa London, 1947) sa Symphonie no 3 Chant de la nuit réussit à pénétrer et à évoquer l'essence même de l'art persan -chose sans doute unique dans la musique occidentale.

Par ailleurs, l'apport de Szymanowski à la musique pour violon est immense : ses Mythes et son Concerto no 1 constituent la plus grande révolution dans ce domaine depuis Paganini selon le grand musicologue allemand, Hans Heinz Stuckenschmidt. Emile Vuillermoz le qualifie de "Debussy polonais".

Il donne plusieurs concerts aux États-Unis, où Pierre Monteux dirige l'une de ses symphonies à Boston, et à Paris, où il rencontre les célébrités musicales de l’époque (Maurice Ravel, Alfred Cortot…). Il préfère cependant rentrer par patriotisme dans son pays natal plutôt que de poursuivre ses voyages. En 1931 il devient l'un de membres d'honneur de la Société internationale de musique contemporaine à côté de Richard Strauss, Igor Stravinsky, Maurice Ravel, Bela Bartok et Manuel de Falla. Il étudie dès lors le folklore musical local et s’en inspire dans de nombreuses œuvres, en particulier dans son ballet pantomime Harnasie donné à l'Opéra de Prague (1935) puis à l'Opéra de Paris (1936). Reconnu par les édiles, il obtient le poste de directeur du Conservatoire de Varsovie jusqu’à sa démission en 1932 survenue en raison de désaccords de fond, essentiellement dus à sa promotion des créations artistiques nouvelles aux dépens de celles d'essence classique.

Au cours de ses années d’enseignement, Szymanowski sacrifie sa carrière de compositeur. Parmi ses élèves, figurent Michał Kondracki, Bolesław Szabelski, Zygmunt Mycielski et Piotr Perkowski. Lorsqu'il quitte définitivement ses fonctions officielles, il peut de nouveau se consacrer à la composition, avec notamment la création de sa 4e Symphonie et du Concerto pour violon no 2.

Tuberculeux depuis son plus jeune âge, il meurt le  à Lausanne, à l'âge de 54 ans. Son corps repose au Panthéon de Grands Polonais, à l'église Saint-Michel-et-Saint-Stanislas de Skałka, à Cracovie.

On distingue traditionnellement trois périodes créatrices dans son existence. Sa première période est marquée par le romantisme et plus particulièrement par l'empreinte de Frédéric Chopin dont il ne cessera de se revendiquer durant toute sa vie ; une deuxième période courant jusqu’à la révolution russe, résolument éclectique et durant laquelle il entre en contact avec des compositeurs comme Claude Debussy, Maurice Ravel et Igor Stravinsky, mais aussi avec le monde oriental et mythologique; et une dernière période enfin qui renoue avec ses propres racines, en l'occurrence la musique populaire polonaise. Il a été également un grand écrivain, musicologue et essayiste. En 2018 ont paru en français ses Écrits sur la musique (éd. Symétrie, Lyon) traduits par Christophe Jeżewski et Claude-Henry du Bord.

Karol Szymanovski a été honoré de plusieurs titres :

  • Docteur honoris causa de l'Université Jagellon de Cracovie (1930)
  • Membre d'honneur de la Société internationale de musique contemporaine (1931)
  • Membre d'honneur de la Regia Accademia di Santa Cecilia de Rome (1933)
  • Croix de commandeur de l'ordre Polonia Restituta (1934)
  • Laurier d'Or de l'Académie des Lettres Polonaise (1935)
  • Grand-Croix de l'ordre Polonia Restituta (à titre posthume)

Les commentaires sont clos.