Luminescences et vertiges
Dimitri CHOSTAKOVITCH (1906-1975)
Quatuor à cordes n° 3 op. 73–Quatuor à cordes n° 5 op. 92– Quatuor à cordes n° 7 op. 108
St. Petersburg String Quartet
ADD–2015–73’ 37’’–Texte de présentation en anglais–CUGATE Classics CGC 007 2
N’en déplaise aux principaux hérauts de Darmstadt (inutile de citer leur nom), à leur émules et à leurs thuriféraires, les quinze quatuors de Dimitri Chostakovitch forment un des plus beaux pans de la musique de chambre du XXe siècle et, sans nul doute, un des cycles de quatuor à cordes les plus aboutis de toute l’histoire de la musique. Ce qu’il y a d’extraordinaire avec eux, c’est qu’ils possèdent presque un caractère symphonique, au point qu’on a souvent l’impression en les écoutant, et en se laissant griser par la forte émotion qu’ils provoquent, d’être en présence de symphonies en miniature. Ou, plus précisément, de symphonies écrites pour quatre instruments. Le Quatuor à cordes n° 5 en si bémol majeur, achevé en 1952 et dédié au Quatuor Beethoven, en constitue un exemple très frappant, non seulement parce qu’il dure une trentaine de minutes, mais en outre parce que ses effets dramatiques sont constamment appuyés.
Il va sans dire que chacun des quinze quatuors de Dimitri Chostakovitch est une œuvre en soi. Mais chacun d’entre eux contient aussi en général des accords, des thèmes et des passages plus ou moins longs, qui rappellent d’autres pièces élaborées à peu près à la même époque, que ce soit justement des symphonies, des concertos ou des musiques de film. Et c’est un peu comme si toutes ces réminiscences traduisaient les obsessions les plus profondes du compositeur russe (soviétique ?), dont tous les témoignages s’accordent à dire qu’il était un écorché vif, un tourmenté, un être paradoxal et, parfois, franchement insupportable.
Les trois quatuors réunis sur ce disque sont autant de luminescences musicales – des vertiges sonores. Et le St. Petersburg String Quartet (fondé en 1985 et baptisé alors Leningrad Quartet) les interprète avec une énergie communicative.
Jean-Baptiste Baronian
Son 9 – Livret 6 – Répertoire 10 – Interprétation 9