Mahler par Kubelik, une intégrale pionnière

par

Gustav Mahler (1860-1911) : 10 symphonies. Symphonieorchester der Bayerischen Rundfunk, Rafael Kubelik. ADD-1967/1970-Texte de présentation en : allemand, anglais et français. 10 CD/1 Blu-Ray Audio. DGG. 483 5656.

DGG réédite dans un petit coffret l’intégrale Mahler par Rafael Kubelik enregistrée entre 1967 et 1970. Il ne s’agit pas tant d’un évènement tant ce coffret figure régulièrement au catalogue des rééditions (et il vient juste d’être réédité dans le cadre d’un gros coffret intégral des enregistrements du chef pour DGG...quand la cohérence éditoriale du label jaune pose question...) que d’une manière opportune de réécouter cette intégrale pionnière et un peu négligée.

Pour apprécier ce coffret  sa juste valeur, il faut se replacer dans le contexte mahlérien des années 1960. Le compositeur n’est pas encore, loin s’en faut, la star des programmes qu’il est désormais devenu ! Mais cette décennie est doublement importante : elle voit le passage de la génération des mahlériens historiques, parfois disciples du compositeur  (Otto Klemperer, Bruno Walter, Carl Schuricht, Jascha Horenstein, Dimitri Mitropoulos) à une nouvelle génération de champions de Mahler : Leonard Bernstein, Georg Solti, Bernard Haitink et Rafael Kubelik. Alors que nous sommes au début du “revival” mahlérien, ces quatre chefs gravent des intégrales pionnières tant enregistrer une “intégrale” complète des symphonies n’allait pas encore de soi au début des années 1960. Même des disciples du compositeur comme Klemperer et Walter ne se consacraient qu’à une sélection de ses symphonies !

Dès lors, enregistrée sur une période assez courte, cette intégrale est celle d’un défricheur. Le Mahler de Kubelik est “frais” et “direct” : les tempi sont rapides et la restitution du message mahlérien vise plus à l’impact global qu’à l’analyse microscopique des détails de l’orchestration (défaut hélas rédhibitoire chez tant de chefs actuels qui surjouent chaque note pour s’écouter diriger !). Certes cela manque parfois de profondeur ou de force dramaturgique (principalement dans les symphonies n°3, n°5, n°6 et n°9), mais la vision unilatérale de cette direction galvanise les symphonies n°1, n°2, n°4, n°7 et n°8 (cette dernière portée par un souffle épique et une superbe distribution vocale). Un autre aspect passionnant est de comparer l’orchestre symphonique de la Radio bavaroise dans ces enregistrements avec ceux très récents de Mariss Jansons. Loin de l’actuel fini instrumental démonstratif et exemplaire qui fait de cette phalange l’une des toutes meilleures du monde, le rendu instrumental est ici plus râpeux et acide. Les pupitres sont moins léchés et brillants, mais ce côté abrasif et “paysan” sied parfaitement à cette vision de Mahler : en particulier dans les symphonies n°1 et n°4. Pour qui est trop habitué aux versions lisses et policées des années 1990-2000, ce Mahler sera une révélation !

Dès lors, il faut chérir ce coffret. Replacé dans son contexte, il a pour lui la cohérence de la vision de Kubelik et il ne comporte aucune faiblesse. Il est ainsi supérieur aux intégrales contemporaines de Solti (Decca) et Bernstein (Sony), mais doit s’incliner devant Haitink (Philips) mieux enregistré et avec un orchestre du Concertgebouw plus affûté.

Comme les récentes rééditions DGG, le coffret propose en complément des CD, toutes les symphonies sur un Blu-Ray Audio. Notons qu’il faut un équipement de grande qualité pour tirer profit de cette édition.

Son 8 – Livret 8 – Répertoire 10 – Interprétation 9

 

    

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