Premiers pas d'Andrey Boreyko à Bruxelles

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Pour son premier concert en tant que directeur musical, Andrey Boreyko s'est lancé dans un programme passionnant: le Concerto pour violon et orchestre en ré majeur op.77 de Brahms et la Symphonie fantastique d’Hector Berlioz. C'est le jeune violoniste Sergey Khachatryan (27 ans) qui a assuré la partie violon.Il connait bien la salle Henri Le Boeuf où il a remporté en 2005 le Premier Prix du Concours Reine Elisabeth. D'un lyrisme poignant -quoi qu'en dise Tchaïkovski qui critiquait sévèrement la musique du compositeur allemand-, ce concerto a été exécuté avec beaucoup de brillance, d'éclat lorsqu’il est de mise, et de gaieté dans 3e mouvement, avec la cadence de Joseph Joachim à qui l'œuvre est dédiée. Beaucoup de critiques pour ce concerto, à l'image d'Harold en Italie de Berlioz où l'on considère que la partie concertante n'est pas suffisamment mise en avant. Le violon n'est ici pas toujours l'instrument dominant et Brahms rompt avec l'idée du concerto romantique pour construire une œuvre sur la forme du concerto classique. L'œuvre reste pour autant une pièce majeure du répertoire que l'on aime écouter. Et justement, on appréciera la fraîcheur apportée par le jeune soliste tout autant que les couleurs douces des passages lents. La cadence est parfaitement maitrisée, le dialogue avec l'orchestre semble naturel et le chef parvient à maitriser toutes les masses sonores comme s'il sculptait une œuvre d’art. Le public est chaleureux. En bis, Khachatryan nous a donné le mouvement Furies de la deuxième sonate d'Ysaye, une page d'une grande difficulté. Le violoniste semblait est à l'aise avec l'œuvre et attend le silence complet pour débuter. On apprécie aussi le clin d'œil au Dies Irae repris par Berlioz dans la symphonie.
Après l'entracte, Boreyko démontre sa maîtrise et sa capacité à se faire entendre de l'orchestre. C'est dans cette symphonie que Berlioz, alors âgé de 27 ans, expose son amour et ses états-d‘âmes pour Harriet Smithson qui deviendra sa femme. Boreyko a pensé la structure de l'œuvre avec précision et l’a marquée de touches personnelles intéressantes. On se réjopuit aussi du second mouvement avec sa belle phrase mélodique, et on se souvient de Charles Munch qui en faisait son cheval de Bataille à Boston et à Paris. Le premier mouvement, plus calme nous a été présenté avec douceur et mélancolie tandis que dans les passages plus rapides, la baguette du chef restait très précise. On a également apprécié la sonorité des vents dans le troisième mouvement tandis que le grondement provoqué notamment par les percussions (timbales) était très imagé laissant place à un esprit de pastorale et de solitude. Le quatrième mouvement, marche au supplice qui représente l'artiste dormant après avoir pris de l'opium a été une fois de plus très imagé. Belles phrases de la part des violoncellistes et grande précision chez tous les pupitres. Pour conclure, un Sabbat sombre, fait de bruits curieux, perte de noblesse, bien exécuté par l'ONB.
Un beau partenariat semble se profiler entre l'ONB et son nouveau chef.
Ayrton De Sympelaere
Bruxelles, Bozar, le 12 octobre 2012

 

 

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