Mots-clé : Aude Extrémo

Offenbach et sa Vie parisienne originelle : une version délirante sur DVD

par

Jacques Offenbach (1819-1880) : La Vie parisienne, opérette en cinq actes. Version originelle complète. Jodie Devos (Gabrielle), Rodolphe Briand (Gardefeu), Marc Mauillon (Bobinet), Franck Leguérinel (Le Baron de Gondremarck), Sandrine Buendia (La Baronne de Gondremarck), Aude Extrémo (Métella) ; Chœur de chambre de Namur ; Les Musiciens du Louvre, direction Romain Dumas. 2021. Notice et synopsis en anglais et en français. Sous-titres en français, en anglais, en allemand, en japonais et en coréen. 178’00’. Deux DVD Naxos 2.110753-54. Aussi disponible en Blu Ray. 

Une histoire de panneaux : « Tristan et Isolde » de Richard Wagner à Nancy

par

Tristan und Isolde de Richard Wagner ne cesse de fasciner. La preuve encore ces jours-ci avec une production reprise à l’Opéra de Paris, une autre à venir au Grand Théâtre de Luxembourg, et une autre encore en avril prochain à l’Opéra des Flandres. Et celle tout juste créée à l’Opéra National de Lorraine.

Le défi est d’importance pour un metteur en scène : comment faire preuve de créativité pour pareil chef d'œuvre ? A Paris, Peter Sellars et Bill Viola immergent le spectateur dans un univers scénique austère éclairé de (superbes) vidéos qui renvoient à un au-delà de perpétuelle réitération aux connotations bouddhistes. A Luxembourg, Simon Stone, lui, matérialisera le propos dans une approche plus que réaliste : yacht de luxe pour le premier acte, bureau en Open Space pour le deuxième, déambulation en métro parisien (oui, oui) pour le troisième. Intemporalité chez l’un, contemporanéité chez l’autre. Ouverture, focalisation.

A Nancy, Tiago Rodrigues (un metteur en scène portugais reconnu pour ses créations théâtrales et qui est le nouveau patron du Festival d’Avignon) adopte un point de vue inattendu. C’est un peu comme si, réagissant aux stéréotypes suscités par l’œuvre de Wagner, il avait cherché une façon d’en tenir compte tout en faisant vivre l’œuvre.

Quand le rideau se lève, nous découvrons un vaste local dans lequel des archives sont entassées. Les archives de l’histoire de Tristan et Isolde. Une histoire sans cesse reprise, qui a balisé le temps. Avant que la première note ne s’élève, deux personnages font leur entrée sur le plateau, une femme et un homme, que Rodrigues qualifie de « traducteurs ». 

La Vestale enflamme les Champs-Élysées

par

Napoléon Bonaparte a cinq ans lorsque Gaspare Spontini voit le jour près d’Ancône en 1774. Au moment où les troupes françaises mènent la Première campagne d’Italie, le musicien part étudier à Naples et, sous la houlette de Piccini, compose plusieurs opéras bien accueillis sur les scènes ultramontaines.  

Tandis qu’à Paris le Premier Consul réordonne les institutions, fait jouer Polyeute et ériger la colonne Trajane, Spontini s’installe comme professeur de chant, adopte la nationalité française et cherche à faire représenter ses opéras comiques avec plus ou moins de réussite jusqu’à ce que la protection de Joséphine devenue Impératrice permette la création triomphale de sa Tragédie lyrique, La Vestale, en 1807.  

En dépit de son titre au parfum de version latine et d’une intrigue linéaire -une vierge amoureuse condamnée à mort pour avoir laissé s’éteindre le feu sacré de la déesse Vesta est sauvée in extremis par la foudre qui rallume le foyer-  la partition prend l’auditeur à contrepied.  

À la Monnaie, Castellucci réduit en cendres la Jeanne d’Arc au bûcher de Claudel-Honegger

par

Composée en 1935 à l’instigation de la danseuse, actrice et mécène russe Ida Rubinstein, Jeanne d’Arc au bûcher demeure, avec Le Roi David, l’œuvre lyrique la plus célèbre et la plus jouée d’Arthur Honegger. Fruit de sa première collaboration avec Paul Claudel, cet oratorio dramatique en onze scènes et un prologue (créée à la Monnaie dans sa version intégrale en 1946) retrace, à rebours, la vie tristement écourtée de la Pucelle d’Orléans, depuis la première scène, qui prend place au seuil de l’échafaud, jusqu’à la dernière, qui referme la boucle en revenant au bûcher de Rouen. 

L’alchimie de deux grands talents 

L’esprit de l’œuvre est celui du "jeu populaire" ou "mystère" médiéval. Véritable "cathédrale en puissance faisant voisiner le chapiteau et la gargouille", comme l’a si joliment dit Harry Halbreich, le livret de Claudel dont se saisit Honegger permit au compositeur suisse de ciseler une partition aux couleurs les plus contrastées, mêlant de véritables chansons populaires ("Voulez-vous manger des cesses" et "Trimazô"), des fanfares et carillons et des airs aux accents jazzy à des chants grégoriens et des thèmes lyriques exaltant la Foi, l’Amour et l’Espérance. Au chant, Honegger ne confie que les parties visionnaires du texte -celui que prononcent la Vierge Marie, sainte Catherine et sainte Marguerite ; ne font exception que quelques interventions burlesques de Cauchon, l’évêque de Beauvais, alias Porcus, qui préside au procès de la jeune Lorraine. Dans la fosse, le compositeur se taille un orchestre sur mesure, remplaçant les cors par trois saxophones et la harpe par deux pianos et un célesta; sans oublier d’y convier les ondes Martenot, si chères à son cœur, auxquelles il délègue l’un des thèmes cycliques de l’œuvre.