Mots-clé : Ekaterina Semenchuk

Adriana Lecouvreur en lévitation à l’Opéra de Paris

par

Salle comble pour la reprise d’Adriana Lecouvreur dans la mise en scène de David Mc Vicar (2012) coproduite avec le Covent Garden, le Liceu, le Staatsoper et le San Francisco Opéra.

La nouvelle distribution parisienne de 2020 comprenant Anna Netrebko avait été reportée en raison de la pandémie. Autant dire qu’elle était très attendue. À juste titre.

Qu’ajouter sur l’envoûtant legato, sur cette houle crépusculaire d’où émerge la ligne de chant, épurée, frôlant l’impalpable, pour se régénérer d’elle même dans l’orbe de sa course ? Car il n’est pas seulement question ici d’« aigus filés », base du bel canto, mais de cette sensation d’apesanteur qui permet de concevoir la fascination exercée par un Farinelli sur les rois et les foules. Son air d’entrée Io son l’umile ancella du I met la salle en lévitation jusqu’au Poveri fiori final d’une émotion indicible.

Seize ans se sont écoulés depuis l’apparition sur cette même scène de la soprano caucasienne dans le rôle de Giuletta aux côtés du Roméo de Joyce di Donato (Capuleti et Montecchi). Le chemin parcouru révèle un accomplissement belcantiste -et pas seulement technique- mais aussi dramatique et féminin, exceptionnel.

Le deuxième atout de cette magnifique soirée nous vient du « Revival director » (un titre nouveau), Justin Way. Le metteur en scène australien parvient à concilier la distance du temps avec des éléments hétérogènes pour en obtenir un tout cohérent et original.

L'Opéra de Monte-Carlo commence sa saison avec la Messa da Requiem de Verdi

par

L'Opéra de Monte-Carlo ouvre sa saison 2023-2024 avec le Requiem de Verdi donné au Grimaldi Forum. Ce concert de prestige devait être dirigé par Daniel Barenboïm, mais le légendaire musicien a dû hélas annuler sa venue du fait de ses problèmes de santé. C'est Kazuki Yamada, directeur musical et artistique de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo qui a accepté, grâce à un revirement de dernière minute dans son emploi du temps, de reprendre le flambeau de ce concert très attendu. 

Le Requiem de Verdi peut être vu comme une sorte d'opéra religieux donnant une vision romantique de la mort, plus que comme une messe pour le repos de l'âme. Le scénario diabolique où l'homme a beaucoup de raisons d'être jugé et la destruction de cette merveilleuse planète. Ce requiem romantique et lyrique est impressionnant avec les sublimes voix bien harmonisées de l'excellent chœur de l'Opéra de Monte-Carlo. Le chœur est magnifiquement préparé par  Stefano Visconti. Les quatre brillants solistes chantent de manière superlative. La soprano lettone Marina Rebeka a une voix puissante et lumineuse. La mezzo-soprano biélorusse Ekaterina Semenchuk  est réputée pour les rôles verdiens et possède un timbre de voix intense et chaleureux. Le baryténor Michael Spyres donne une performance extraordinaire. Sa voix est pleine d'émotion pure avec une technique et une sensibilité prodigieuse. La basse Ildar Abdrazakov, souffrant, a cédé sa place au baryton-basse uruguayen Erwin Schrott qui séduit par sa  voix étincelante. 

Entre rêve et réalité : Sadko de Rimski-Korsakov vu par Tcherniakov

par

Rimsky-Korsakov : Sadko, opéra en sept tableaux. Nazhmiddin Mavlyanov (Sadko), Aida Garifullina (Volkhova), Ekaterina Semenchuk (Lubava), Yuri Minenko (Nezhala), Stanislav Trifomov (Le Tsar de l’océan), Mikhail Petrenko (Sifflet), Maxim Paster (Fifre), Dmitry Ulianov (Le marchand viking), Alexey Nekludov (Le marchand indien), Andrey Zhilikhovsky (Le marchand vénitien), Sergey Murzaev (Vision du vieux guerrier/Guide), etc. Chœurs et Orchestre du Théâtre Bolshoï, direction Timur Zangiev. 2020. Notice en anglais, en français et en allemand (pas de livret, mais synopsis). Sous-titres en anglais, en français, en allemand, en espagnol, en coréen et en japonais. 186.00. Un double DVD Bel Air BAC188. Disponible aussi en Blu Ray. 

Les Troyens : Tcherniakov / Berlioz : 1 à 0

par

Les Troyens, opéra en cinq actes, relate la prise de Troie, l’arrivée des vaincus à Carthage et les amours de Didon et Énée. Le rideau s’ouvre sur une famille de dictateurs, Beyrouth en cendres puis les pensionnaires d’un centre psychiatrique de réhabilitation ; tous unis par la démence, celle de Cassandre, Didon, Énée, leur suite… Une parabole de notre monde ? Peut-être. Mais dès lors les émotions sincères et délicates, les passions, la grandeur morale sont balayées par la dérision. Or c’est justement ce qu’il y a de plus beau, de plus bouleversant et d’unique dans la musique de Berlioz : un engagement total de lui-même, une vitalité exacerbée, une tendresse aussi. Qui culminent dans le duo O nuit d’ivresse et d’extase infinie succédant à une Chasse royale, orage et clair de lune des plus shakespeariens (Acte IV).