Mots-clé : Violeta Urmana

Elektra à Munich

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Après un Trouvère de Verdi extrêmement obscur, l’opéra de Bavière, dans le cadre de son Festival annuel, donne une reprise de l’exécution de 1997 aux couleurs fauves d’Elektra de Richard Strauss. Le metteur en scène Herbert Wernicke, qui conçut également l’éclairage  et les costumes, choisit d’illustrer par ce moyen la psychologie à vif de l’œuvre. C’est donc avec des jaunes, rouges et bleu plus sauvages les uns que les autres, et sous la lame d’un panneau s’ouvrant en diagonal, que le drame a lieu. 

Les vêtements ne sont pas moins éclatants que le décor. Salomé, habitée par la mort et tenant sa hache constamment en main, est toute de noire, debout sur son cercle blanc, quasi immuable comme une pierre tombal ; Chrysothemis, pleine de vie, elle, et souhaitant enfanter, évolue dans sa robe blanche : Chlytemnestre, aux rêves sanguins, ayant assassiné son premier mari, sort du fond écarlate sur un escalier de la même couleur,  dans sa parure rouge vif avec une cape brodée d’or .

Plus tard, l’ayant abandonnée, Electre s’en servira pour essayer de convaincre sa sœur de tuer leurs parents avec elle, et Oreste s’en drapera tel un empereur romain.

La scène voisine ainsi avec des tableaux d’art abstrait ou des Nicolas de Staël. Le manque de survitrage nonobstant est cependant regrettable. Le traitement que Richard Strauss inflige à la langue, rend la compréhension des dialogues malaisée, y compris pour un germanophones, et tous les spectateurs ne sont pas forcément germanophones de surcroît.

L’orchestre de l’opéra de Munich, sous la direction de Vladimir Jurowski est remarquable de pénétration, de force et de feu avec ses accents, ses aigus et pics acérés. Trop peut être même, mordant sur les chanteurs, et rendant l’exécution à la limite de la version de chef, il en fait presque perdre de vue la valeur des interprètes. 

C’est qu’ils sont remarquables également. Les personnages principaux, une belle cohésion les unit dans un esprit de troupe. Et que ce soit Elena Pankratova en Electre, qui donne à son timbre irisé une sécheresse de rasoirs, Vida Miknevičiūtė en Chrysothemis au chant non moins aigu mais plus mélodieux, ou Violeta Urmana en Clytemnestre, avec sa voix tendue de douleurs, les joutes entre la mère et la sœur avec cet abîme de désir assassin, qu’est Electre, révèlent bien la noirceur de l’opéra.

L’Oreste de Károly Szemerédi est sans doute le rôle masculin le plus réussi. Le désamour de Strauss pour les ténors exigent des interprètes d’une qualité extrême. Et il incarne un Oreste, à la voix ferme, grave et dure comme sa stature. Un Oreste à faire peur de sécheresse, comme sa sœur. 

Siegfried et Crépuscule des dieux d’un Ring d’anthologie à Berlin

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Revenir à Berlin pour assister aux deux derniers volets de l’intégrale du Ring au Staatsoper de Berlin près de dix-huit mois après avoir vu les deux premiers et être directement pris par la magie de la musique et l’ingénieuse (mais pas invariablement réussie, nous le verrons) mise en scène de Dmitri Tcherniakov, c’est là le signe non seulement de la magie que peut exercer le théâtre musical mais aussi du fait que nous avons affaire ici à une production ambitieuse et d’une qualité vocale et musicale peu commune. 

Le début de Siegfried nous plonge dans l’appartement qui fut celui qu’occupaient Hunding et Sieglinde dans La Walkyrie, et qui accueille maintenant le rusé Mime qui désespère de parvenir à forger à nouveau la mythique épée Nothung, et son pupille Siegfried qui prend ici l’apparence d’un adolescent capricieux et boudeur, invariablement vêtu d’un survêtement de sport bleu d’une célèbre marque aux trois bandes. Inutile de dire qu’il ne manifeste aucune gratitude envers son père nourricier (dont les motifs, nous le savons, ne sont pas entièrement désintéressés). Quand apparaît Wotan -sous la forme d’un Wanderer qui n’arbore bien sûr ni bandeau ni grand chapeau- il pénètre dans le coquet appartement dont nous parlions sous les traits d’un pensionné à casquette. (Il est d’ailleurs utile de rappeler ici que dans la conception de Tcherniakov, tous les héros prennent de l’âge à mesure que le cycle avance : Mime est passablement décati et Alberich apparaîtra bientôt en vieillard étique avançant péniblement à l’aide d’un cadre de marche.) C’est là qu’à lieu la fameuse Wissenswette où Mime et Wotan se posent réciproquement trois questions en mettant leur tête en jeu. Malheureusement, ce moment hautement dramatique prend ici la forme d’un petit conciliabule dont Tcherniakov n’estime pas utile de souligner la portée dramatique, même si la réponse à la troisième question posée par Wotan et à laquelle Mime est incapable de répondre est que c’est Siegfried qui forgera l’épée et fera périr son tuteur. Comme il n’y a pas de forge chez Mime, Siegfried rassemble d’abord ses jouets en tas sur le bureau de Mime et, avant de le démolir à coups de masse, y met le feu en allumant d’abord des ours en peluches dont les flammes se communiquent aux autres jouets. On ne sait pas trop comment, mais de cet étonnant autodafé  émergera la Nothung nouvellement forgée des débris de l’originale. Ici, Wotan -dont on sent qu’il est en train de piteusement perdre le contrôle de son royaume- apparaîtra brièvement derrière une vitre.

Pauvres femmes, femmes talentueuses :  Mese Mariano d’Umberto Giordano et Suor Angelica de Giacomo Puccini 

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Pour la plupart des spectateurs, le programme proposé leur vaut une découverte : celle du Mese Mariano d’Umberto Giordano. Une œuvre inconnue dans les ouvrages de référence (ne la cherchez pas dans les « Mille et un opéras » de Piotr Kaminski, elle n’y est pas ; et Wikipedia n’en parle, et brièvement, qu’en anglais). Elle ne sera d’ailleurs représentée, nous apprend Operabase, nulle part ailleurs qu’à Liège cette saison. C’est un opéra en un acte d’une petite quarantaine de minutes.

Quant à Suor Angelica de Giacomo Puccini (composant Il Trittico - Le Triptyque avec Il Tabarro et Gianni Schicchi), également opéra en un acte, elle est mieux connue. Quoique. A peine dix productions all over the world cette saison (Rigoletto sera à l’affiche de 169 maisons en Allemagne !). On la retrouvera cependant à La Monnaie, avec les deux autres, ce qui est rare, en mars prochain.

Pourquoi cette programmation ? C’est qu’il s’agit d’une histoire de femmes, de pauvres femmes, si l’on considère les tristes héroïnes des deux œuvres, des femmes talentueuses si l’on considère les artisanes et interprètes de ce spectacle.

Les deux œuvres nous présentent deux filles-mères, Carmela et Angelica, obligées d’abandonner leur enfant, dépossédées du « fruit de leur chair ». Deux œuvres typiques du vérisme, un mouvement lyrique marqué par le naturalisme, dont Cavalleria Rusticana de Mascagni et Pagliacci de Leoncavallo sont les modèles.

Belle reprise vocale du Trouvère à Liège

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Reprise d'un spectacle de 2011, où brillaient dans les rôles-phares Fabio Armiliato et Daniella Dessi, dirigés par Paolo Arrivabeni. Distribution totalement différente bien sûr, en 2018, cette fois sous la direction, tout aussi experte, de Daniel Oren, mais dans la même mise en scène conventionnelle de Stefano Vizioli. Décors noirs, murailles sombres, banales tapisseries rouges ou bleues, tout est triste dans cette mise en scène.

La Scala de Milan partenaire de l'Expo 2015

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Pour la première fois dans son histoire la Scala de Milan présente une activité quasi non interrompue de mai jusqu’à novembre pour donner la possibilité aux visiteurs de l’Expo Milano 2015 de découvrir une des maisons d’opéra les plus célèbres du monde. Le programme comprends des spectacles d’opéra, de ballet et des concerts avec des interprètes internationaux. Pour l’opéra c’est surtout le répertoire italien qui est à l’affiche avec des œuvres de Rossini, Donizetti, Puccini et Verdi, reprises et nouvelle productions.