Un enregistrement inédit pour débuter une nouvelle série : Musique en Exil

par

Paul Ben-Haim (1897-1984) : Quatuor avec piano, op.4 - Deux Paysages, op.27 -Canzonetta, op.34 – Improvisation et dance, op.30 - Quintette pour clarinette et cordes, op.31a.
ARC Ensemble
2013 – DDD – 75,05’ – Textes de présentation en anglais, français et allemand – Chandos, CHAN10769

Pour le premier opus de la série « Music in exile », le label Chandos, en collaboration avec l’ARC Ensemble, s’est employé à remettre en avant la musique de chambre de Paul Ben-Haim. Né Frankenburger, Ben-Haim voit le jour à Munich en octobre 1897. Diplômé de l’Académie de musique de Munich en 1920, il devient chef de chœur et Maître de Chapelle de l’opéra d’Augsbourg. Outre ses occupations officielles, Ben-Haim se consacre à la composition et, déjà, fait montre d’un certain goût pour la mixité. Inscrit dans une veine néo-classique, le compositeur n’hésite pas à adjoindre à sa musique des éléments tirés du jazz ou d’inspirations orientales. C’est en 1933, lors de la montée au pouvoir du mouvement nazi, que Paul Ben-Haim, juif par son père, décide de s’exiler en Palestine. S’ouvre alors à lui un monde nouveau dont sa musique ne tardera pas à s’imprégner ; la poésie hébraïque et la musique orientale deviendront d’importantes sources d’inspirations venant enrichir ses compositions.
Ici, le choix est fait de respecter (à l’exception de la canzonetta) l’ordre chronologique et de mettre ainsi en avant l’évolution du langage musical du compositeur. L’écoute débute par le Quatuor avec piano composé entre 1920 et 1921 et dont c’est le premier enregistrement. L’œuvre est sombre, expressive et émotionnellement chargée. Elle s’inscrit dans une esthétique postromantique proche par certains moments de celle exploitée par Mahler dans son propre Quatuor avec piano. L’écoute se poursuit avec les Deux Paysages (1939), parfaite incarnation de l’homme en exil, tiraillé entre son passé et l’ouverture qu’offre une nouvelle terre. Débutant dans la même ambiance, l’oeuvre s’orne d’éléments orientaux et de quelques dissonances, passe du sombre au clair, genèse de la synthèse de deux langages. S’en suivent la Canzonetta (1944) et l’Improvisation et Danse (1939), avant d’arriver au chef-d’œuvre qu’est le Quintette pour clarinette et cordes (1941, révisé en 1965). Cette œuvre -dont le compositeur était lui-même satisfait- démontre la maîtrise parfaite des deux mondes musicaux. La structure y est riche, tirée des structures classiques, le langage est moderne et enrichi à plusieurs niveaux des techniques mélodiques ou rythmiques de la musique du Moyen-Orient. Nous y entendons d’ailleurs une mélodie de la chanteuse Bracha Zephira dont Ben-Haim fut l’arrangeur.
Mais tout ce voyage avec la musique de Ben-Haim n’aurait pu être aussi agréable sans la qualité d’interprétation des musiciens de l’Ensemble ARC (Artists of the Royal Conservatory de Toronto).
Emouvant et riche, cet album propose une découverte (pour le Quatuor avec piano) et offre une version expressive des œuvres de chambre du grand compositeur germano-israélien.
Xavier Falques

Son 9 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 9

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