Le Journal

Jean Sibelius, 65 ans

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Le compositeur Jean Sibelius (Johan Sibelius en finnois), né le  à Tavastehus, dans le Grand-Duché de Finlande, est mort le  à Järvenpää, près d'Helsinki.  Il est, avec Johan Ludvig Runeberg, l'un des Finlandais qui symbolisent le mieux la naissance de l'identité nationale finlandaise.

Jean Sibelius est le fils du médecin Christian Gustaf Sibelius et de Maria Charlotta Sibelius née Borg. Le nom de famille provient de la succession Sibbe en Uusimaa qui était détenue par son arrière grand-père paternel. Le père de Sibelius est mort du typhus en , laissant des dettes importantes. En conséquence, la mère de Jean qui était de nouveau enceinte, a dû vendre leurs biens et aller avec sa famille dans la maison de Katarina Borg, sa mère veuve, qui vivait également à Hämeenlinna.

Sibelius a été par conséquent élevé dans un environnement féminin, la seule influence masculine venant de son oncle, Pehr Ferdinand Sibelius, qui était intéressé par la musique, surtout le violon. C'est cet oncle qui a donné au garçon un violon quand il était âgé de dix ans, et qui plus tard, l'a encouragé à maintenir son intérêt pour la composition. Pour Sibelius, l'oncle Pehr non seulement a pris la place d'un père, mais d'un conseiller musical. En 1870, le tout jeune Jean reçoit ses premières leçons de piano d'une tante, Julia Sibelius. C'est au contact de son oncle Pehr, violoniste amateur, qu'il découvre l'instrument pour lequel il écrira un célèbre concerto et de nombreuses pièces avec orchestre, le violon. À dix ans il écrit au piano sa première œuvre Gouttes d'eau. En 1876, dans un contexte politico-social qui promeut la culture finnoise, ses parents l'inscrivent dans une école où les cours sont en finnois. Il poursuit ensuite sa scolarité au lycée normal de Hämeenlinna jusqu'en 1885.

C'est pendant cette période, vers 1880, qu'il entreprend d'étudier sérieusement la musique. Il prend ses premiers cours de violon avec le chef de la musique militaire Gustav Leander ; ayant acquis une certaine technique, il se met à jouer de la musique de chambre avec son frère et sa sœur et dès 1883 s'essaie à la composition avec un trio.

Il fait une rencontre importante avec le virtuose du piano Ferruccio Busoni qui impressionne tant Sibelius qu'il renonce définitivement à l'idée de devenir un jour soliste virtuose du violon. Étudiant en droit peu studieux à l'Université impériale Alexandre d'Helsingfors, il s'inscrit à l'institut de musique de Martin Wegelius (qui sera rebaptisé Académie Sibelius en 1939) en classe de violon où il suit les cours de Mitrofan Vassiliev. Sibelius dès lors se tourne définitivement vers sa passion, la musique. Il compose sa première œuvre d'importance, un quatuor en la mineur qui récolte un succès certain lors d'un concert public.

Il travaille aussi l'harmonie avec Wegelius, mais faute de classe d'orchestration, Sibelius reste encore cantonné dans un environnement de musique de chambre. Il se rend à Berlin pour étudier avec Albert Becker de 1889 à 1890 ; il a l'occasion d'écouter les concerts du grand chef d'orchestre allemand Hans von Bülow qui joue Richard Strauss et Antonín Dvořák ; dans cette ville, qu'il trouve trop bruyante, il compose un quintette pour piano et cordes. De retour en Finlande, il écrit son quatuor à cordes en si bémol majeur. L'année suivante, il part pour Vienne pour travailler avec Karl Goldmark de 1890 à 1891.

Il sollicite une entrevue avec Brahms qui ne répond pas. C'est la révélation de la musique d'Anton Bruckner, avec sa 3e symphonie, qui sera le fait marquant de ce voyage. L'année 1890 marque un tournant dans sa vie de compositeur. Il compose ses premières œuvres pour orchestre : une simple ouverture, certes imparfaite, mais avec « beaucoup de bonnes choses » selon l'avis de son professeur et une scène de ballet. Il s'intéresse de plus en plus aux mythes et légendes finlandaises comme le Kalevala écrit par Elias Lönnrot et s'oriente dès lors de plus en plus vers un art authentiquement finlandais dans ses racines et ses références nationales, « tout ce qui est finlandais m'est donc sacré, le monde primitif finlandais a pénétré ma chair et mon cœur » écrit-il à Aino.

Il travaille à sa première composition symphonique Kullervo. Il échoue à devenir violoniste dans l'Orchestre Philharmonique de Vienne. De retour à Helsingfors en 1892, il épouse Aino Järnefelt et compose ses premiers Lieder. L'année suivante, il écrit son premier poème symphonique En saga teinté de couleurs d'Islande, quelques pièces pour piano dont la Sonate en fa majeur op. 12 et des impromptus.

C'est à cette époque que se manifeste un penchant pour la boisson. En 1893, il s'attelle à un projet d'opéra La Construction du bateau dont le livret s'inspire du Kalevala. « Trop lyrique, pas assez dramatique » jugeront certains, le projet sera abandonné. Il écrit une musique de scène Karelia en hommage à la Carélie, province peu industrialisée et sauvage, berceau de nombreux chants populaires. En 1894, il se rend à Bayreuth pour écouter la musique de Richard Wagner : le choc artistique est fort. Subjugué par Parsifal et Tristan et Isolde, il est dans un premier temps conquis par le génie wagnérien puis s'en détache pour finalement se rapprocher de l'univers musical de Franz Liszt tel qu'il se traduit dans la Faust-Symphonie. En 1895, de retour en Finlande, après un détour par l'Italie, il compose une œuvre orchestrale d’envergure, la suite Lemminkäinen op. 22 dont l'une des parties, « Le Cygne de Tuonela », devait connaître un succès immense.

En 1896, il compose le seul opéra de sa carrière, en un acte, La Jeune Fille dans la tour qui ne sera joué que trois fois à Helsingfors. Bien que plébiscité, il échoue à obtenir le poste de professeur de musique à l'Université d'Helsingfors à la suite de l'intervention du chef d'orchestre finlandais Robert Kajanus auprès de l'administrateur russe à Saint-Pétersbourg. Le commentaire du jury ne laisse aucun doute à ce sujet : « en la personne de Sibelius est donné à notre pays un musicien dont le riche talent dépasse tout ce que notre musique a pu produire jusqu'ici »11. En 1897, il compose la musique de scène pour la pièce le Roi Christian II.

De retour à Berlin au printemps 1898, il signe un contrat avec le célèbre éditeur allemand Breitkopf & Härtel. En août, le tsar Nicolas II publie le Manifeste de février qui prive le grand-duché de Finlande de tout droit à l'autonomie. En réaction, Sibelius compose le Chant des Athéniens dans lequel la Russie est comparée aux Perses primitifs de l'Antiquité.

En 1899, il fait jouer sa 1e symphonie op. 39 qui reçoit un accueil triomphal. Sa musique opère pour la première fois une synthèse réussie entre son style « primitif » et les exigences de la symphonie postromantique. La police tsariste accentuant sa répression en instaurant la censure et en supprimant des journaux, la riposte s'organise autour d'une Célébration pour la presse, spectacle chorégraphique pour lequel Sibelius écrit une musique de scène en 7 tableaux. Afin de présenter une musique emblématique de la Finlande à l'exposition universelle de 1900, Sibelius en reprend des extraits pour composer Finlandia. Début 1901, il s'installe avec sa famille en Italie où il travaille sa 2e symphonie op. 43. Il fait la rencontre d'Antonín Dvořák et de Richard Strauss au festival de Heidelberg. La rencontre est des plus amicales, Sibelius note « il s'est montré très aimable et m'a parlé de ses œuvres avec la plus grande franchise ».

L'année suivante, en 1902, l'exécution de la deuxième symphonie obtient un vrai triomphe public. Puis il s’attelle à l'une de ses œuvres emblématiques, son Concerto pour violon et orchestre op. 47, enchaîne avec une musique de scène Kuolema (la mort), qui contient la célèbre « Valse triste ». En 1903 pour échapper à l'atmosphère pesante de la capitale, il se fait construire une villa au nord d'Helsinki qu'il baptise du nom de sa femme Ainola et où il s'installe définitivement avec sa famille quelques mois plus tard. Ses problèmes avec l'alcool ne s'estompent pas. Il confie à son frère Christian « tu vois, mon penchant pour la boisson a des racines très profondes et très dangereuses ». En , il dirige son concerto pour violon qui reçoit initialement un accueil public plutôt chaleureux mais devant le peu de succès rencontré lors des représentations suivantes, Sibelius décide de le réviser. Le Grand-duché de Finlande, qui appartient à l'Empire russe depuis 1809, est, à partir de 1898, sous la coupe autoritaire du gouverneur général du duché, le général russe Nikolaï Bobrikov dont les pouvoirs en 1903 ont pris une forme absolutiste. En juin, ce dernier est assassiné par un jeune patriote finlandais Eugen Schauman pour lequel Sibelius écrira en 1909 une marche funèbre In memoriam.

Sa deuxième symphonie suscite à Berlin l'année suivante des réactions plutôt contrastées tandis que sa nouvelle composition Pelléas et Mélisande d'après Maurice Maeterlinck rencontre un franc succès. C'est l'heure de la découverte des œuvres de ses contemporains. Il s'émerveille devant la musique de Claude Debussy, se passionne pour Arnold Schönberg, s'enthousiasme pour le grand orchestre de Richard Strauss. En octobre, son concerto pour violon dans sa version définitive est donné à Berlin avec Richard Strauss à la direction. Si la critique est favorable, l'accueil du public est en revanche plutôt réservé. Il enchaîne avec une nouvelle œuvre inspirée du KalevalaLa Fille de Pohjola op. 49 suivie en 1907 de la 3e symphonie qui ne suscite pas d'enthousiasme populaire.

Sa rencontre amicale avec Gustav Mahler, qui apprécie sa musique, met en lumière deux visions de la musique radicalement différentes. Pour Gustav Mahler, la musique doit embrasser tout l'univers, pour Sibelius en revanche, cela doit être le dépouillement, l'ascèse, l'expression rigoureuse de l'essentiel, l'art du non-dit et de l'aphorisme. En 1908, Sibelius, qui se remet difficilement d'une opération pour un cancer à la gorge, entame l'écriture d'un nouveau poème symphonique Chevauchée nocturne et lever de soleil puis termine l'année suivante son quatuor à cordes en ré mineur Voces intimae, œuvre d'un caractère sombre et douloureux.

L'année 1910 verra naître une œuvre maîtresse de la musique moderne, fascinante et intemporelle, la quatrième symphonie op. 63, achevée en 1911. Partout où elle est jouée, c'est la réserve, l'incompréhension et même l'hostilité. En septembre, il achève une suite d'orchestre Scènes historiques où il reprend des thèmes d'une musique composée en 1899 en l'honneur de la presse finnoise. Il se rend à Berlin puis à Paris où sa musique reste encore peu jouée.

De retour chez lui en Finlande, il traverse une période de dépression; mais le printemps suivant, il se remet promptement à la tâche en terminant L'Amant, chanson pour cordes et timbales, et en travaillant sur la suite Scènes historiques II. Accablé depuis longtemps par les soucis financiers, il reçoit avec intérêt de l'Académie de musique de Vienne l'offre pour un poste de professeur de composition. Finalement, il y renonce préférant se consacrer entièrement à l'écriture musicale.

Il n'a pas moins de deux symphonies en chantier, la cinquième et la sixième symphonie. Le , sont données en première audition les Scènes historiques, c'est un grand succès. Trois sonatines pour piano verront le jour peu après puis il part pour l'Angleterre où, en octobre, il dirige sa quatrième symphonie qui reçoit un accueil des plus enthousiastes.

À Helsingfors, en 1913, est joué son nouveau poème symphonique le Barde qui récolte les éloges tandis que sa quatrième symphonie, boudée par les Viennois et l'Amérique, est en revanche acclamée par le public finlandais. Durant l'été, il compose un ouvrage ambitieux de longue durée, une symphonie lyrique Luonnotar (fille de la nature) pour soprano et orchestre ; de la même année date Scaramouche écrit pour le Théâtre royal du Danemark.

Au printemps 1914, il se rend aux États-Unis à l'invitation de Horatio Parker qui lui commande une nouvelle œuvre pour le festival de musique de Norfolk les Océanides, c'est enfin le succès sans réserves et la reconnaissance outre-atlantique du « génie sibélien ». Consécration suprême, il est fait docteur honoris causa de l'Université Yale. Un projet de grande tournée américaine est envisagé mais l'attentat à Sarajevo sonne le glas de la paix en Europe. C'est la Première Guerre mondiale et pour Jean Sibelius, quatre années d'isolement et de solitude.

Un voyage à Göteborg en 1915 sera l'une des rares occasions pour Sibelius de renouer le contact avec le monde extérieur et son public. Il travaille ardemment sur sa cinquième symphonie et c'est en apercevant des cygnes voguer sur un étang qu'il trouve, tout exalté par sa découverte, le thème du finale. Le , sa fille aînée Eva donne naissance à une petite fille, et l'auteur de En saga devient grand-père. Le , il note dans son journal : « je suis si pauvre, si pauvre que je suis obligé d'écrire de petites pièces. »

Le , la représentation de la cinquième symphonie à la Bourse d'Helsingfors donne lieu à une soirée des plus officielles où Sibelius est unanimement reconnu comme le porte-flambeau de la musique finlandaise. À la suite de la défection américaine, les soucis d'argent s'aggravent et des amis parmi lesquels la chanteuse Ida Ekman organisent dans l'urgence une grande collecte nationale à son profit. Durant l'été 1916, il retravaille la cinquième symphonie et à sa première audition à Helsinki les critiques sont si vives qu'il décide de la réécrire ; entretemps il compose une musique pour la pièce de théâtre Everyman. Son penchant pour la boisson crée de telles tensions avec son épouse Aino qu'il envisage le divorce, mais en 1917, les bruits de la Révolution russe et les espoirs de liberté qu'elle fait naître pour les Finlandais occupent dès lors tous les esprits. À l'actif du compositeur s'ajoutent Humoresques et un cycle de mélodies op. 88.

La situation politique finlandaise se dramatise : les Gardes rouges pro-soviétiques sont prêts à en découdre avec les Gardes blancs nationalistes. Pour Sibelius, en composant une musique sur un texte de Heikki Nurmio, Jääkärien marssi (la Marche des chasseurs), la cause est entendue : la Finlande. Les événements se précipitent. Le , le gouvernement de Kerenski à Moscou est renversé par un coup d'État communiste, les Soviets prennent le pouvoir et deviennent les nouveaux maîtres de l'Empire russe. Alors que le  la Finlande annonce au nouveau pouvoir des Soviets sa volonté d'indépendance, le Parlement finlandais déclare être seul dépositaire du pouvoir suprême sur le pays. Le , la Finlande est officiellement indépendante.

Le , Sibelius écrit : « je suis malade et incapable de travailler, mais dans ma tête, j'ai la cinquième et sixième symphonie ». Déprimé, il pense un temps au suicide mais se ravise en pensant à Aino et aux enfants. En , les Gardes rouges s'emparent du pouvoir ; la censure est installée ; des troupes nationalistes ont attaqué des garnisons rouges, c'est la guerre civile, Sibelius est placé en résidence surveillée puis se réfugie chez son frère. C'est le temps du rationnement et Sibelius perd beaucoup de poids.

En , les Gardes rouges sont vaincus, après les réjouissances de la liberté retrouvée, en ce printemps Sibelius s'active toujours sur la cinquième symphonie qui ne cesse d'être remaniée. Fin avril, après d'incessantes retouches et révisions, la symphonie est enfin achevée. En , il part avec Aino au Danemark et au retour, sa cantate Sang Jordens est donnée à la nouvelle Académie d'Åbo. En novembre, est jouée la cinquième symphonie, c'est le triomphe. Il s'empresse dès lors d'écrire la sixième symphonie. En 1920, il compose la Valse lyrique et durant l'été, dirige ses œuvres à la première foire industrielle de Finlande.

Reconnu dans la sphère anglo-saxonne comme l'un des compositeurs majeurs de ce début de siècle, les offres affluent. La Eastman School of Music aux États-Unis lui propose un poste de professeur et Londres le sollicite pour être chef d'orchestre invité. Il accepte cette dernière offre. Sur le plan matériel, pour ses cinquante-cinq ans, quelques patrons finlandais lui font un don de 19 000 marks. L'année suivante, il se rend à Berlin pour régler quelques menus détails de contrat avec son éditeur Breitkopf & Hartel puis fait une tournée réussie en Grande-Bretagne en y dirigeant ses grandes compositions. Il s'offre quelques moments de détente avec des amis en Norvège ; les concerts qu'il y donne sont chaudement salués, puis il rentre en Finlande.

Il compose, il dirige, participe à quelques soirées bien arrosées. Pour Sibelius, c'est un cycle perpétuel. Il termine la Valse chevaleresque au printemps 1920, il apprend que son frère Christian est atteint d'un mal incurable qui finalement l'emporte le .

En 1922, il devient franc-maçon et compose de la musique rituelle pour ses « frères » de loge. Il est un des membres fondateurs de la loge maçonnique « Suomi no 1 », il devient grand-organiste de la Grande Loge de Finlande. Il compose neuf pièces vocales et instrumentales assemblées sous le titre de Masonic Ritual Music op.133.

En décembre, on lui commande une Cantate de Noël, il décide en relisant des brouillons d'écrire un quatuor à cordes qu'il intitule Andante Festivo. En 1938, il en tire un arrangement pour cordes et timbales. Début 1923, la sixième symphonie est enfin achevée et jouée devant un parterre d'auditeurs et de critiques conquis, il se rend à Stockholm où il est ovationné puis se rend à Rome où, amoindri et fatigué, il reçoit un accueil plutôt mitigé. En revanche, à Göteborg, il est acclamé par le public suédois.

Sibelius travaille à sa 7e  symphonie. Pour calmer ses mains tremblantes, il boit, suivant en cela les avis des médecins. Il achève la partition de sa symphonie au printemps 1924, qu'il dirige à Stockholm avec succès. Il apprend avec douleur la nouvelle de la mort de Ferrucio Busoni, puis après une tournée au Danemark, le tremblement de ses mains le force à envisager de mettre un terme à la direction d'orchestre.

À l'automne, il compose la Fantaisie symphonique. En 1925, l'éditeur Hansen et le Théâtre Royal danois sollicitent Sibelius pour une musique d'accompagnement de la pièce la Tempête de William Shakespeare. Il y travaille activement et la première audition est présentée au printemps 1926. À l'occasion de ses soixante ans, est organisée une collecte nationale qui rapporte 275 000 marks à Sibelius, ajoutée à cela une pension d'État de 100 000 marks ; Sibelius est désormais à l'abri du besoin.

Au début de l'année 1926, l'Orchestre Philharmonique de New York lui passe commande d'un poème symphonique d'une vingtaine de minutes. Ayant accepté, il part pour Rome afin de s'y consacrer. À l'automne, la commande est bouclée et elle s'appellera Tapiola. On la joue à New York où elle reçoit un accueil mitigé de la part des critiques. Début 1927, il écrit sa Massonic Ritual Music op. 113 (musique maçonnique) Pendant l'été, il met la touche finale à sa musique de scène pour La Tempête.

Il ne cesse pas de composer et en 1930, il produit une œuvre pour chœur d'hommes et piano, Fate Carélie. En 1931, il écrit une pièce pour deux pianos et une pièce pour orgue, Surusoitto. Son travail sur la symphonie progresse mais il est victime d'une grave attaque de pleurésie pulmonaire. On essaie une nouvelle thérapie qui manque de lui coûter la vie. Il récupère, mais n'a plus envie de composer quoi que ce soit. Il écrit au futur créateur de la symphonie, Serge Koussevitzky, que celle-ci est toujours à l’ouvrage et qu'elle sera achevée en 1932. Mais en , nouveau message dans lequel il annonce laconiquement au chef d'orchestre : « Pas de symphonie cette année. »

En 1933, la symphonie se fait toujours attendre. Pourtant, il confie à un ami qu'elle est sur le point d'être terminée. Il remet un feuillet de 23 pages à son copiste pour la transcription, puis plus rien. Il se consacre désormais à la révision de ses anciennes compositions et les fait éditer. En 1939, il écrit une nouvelle version de la Suite Lemminkäinen. En , il retrouve la baguette de chef d'orchestre pour diriger l'orchestre symphonique de la radio de Finlande.

En 1940, Martti Paavola, invité chez Sibelius, aperçoit dans un coffre laissé ouvert des partitions. Le conflit mondial est l’occasion pour l'Allemagne nazie de renforcer ses liens culturels avec la Finlande au point que sur une requête du ministre des Affaires étrangères finlandais, Goebbels, ministre de la propagande, décide de créer la « Société Sibelius » en Allemagne. Dans un message de remerciement radiodiffusé, Sibelius évoque l'Allemagne comme « la terre glorieuse de musique ». Il condamne un an plus tard dans son journal intime la politique raciale menée par le régime hitlérien. En 1942, il écrit des arrangements sur des chants de Noël. Sibelius ne renonce pas à terminer la huitième symphonie. En , il avoue à de nombreuses reprises avoir achevé la huitième symphonie, mais qu'à chaque fois, insatisfait, il a tout jeté au feu.

Il compose en 1946 deux pièces de musique rituelle maçonnique Veljesvirsi et Ylistyshymni pour chant et harmonium, qui sont ses toutes dernières compositions originales. En 1948, il réorchestre Skidspårt ensamt ett (une piste de ski solitaire) pour récitant, harpe et cordes. Ses contacts avec le monde extérieur peu à peu se raréfient sauf à l'occasion d'un festival de musique les semaines Sibelius à Helsinki au cours duquel il reçoit à Ainola quelques invités de marque comme les violonistes Yehudi Menuhin, Isaac Stern, les chefs d'orchestre Eugene Ormandy ou bien Thomas Beecham. À l'occasion de ses 85 ans, en , le Président finlandais Juho Kusti Paasikivi lui fait l'honneur de se rendre en visite officielle chez lui à Ainola. En 1951 il écrit un arrangement de son op. 91b Marssi partiolaisten pour deux voix de femme et piano et en 1954, à l'âge de 89 ans, il réarrange un cantique de Noël Julvisa pour chœur d'enfants et pendant l'été 1957, il dicte à Jussi Jalas la musique d'un arrangement sur Valitus kullervon pour baryton et orchestre. Le , Jean Sibelius se retire définitivement dans le silence après une vie entière consacrée à composer de la musique.

 

Herbert Blomstedt est de retour

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De l'Orchestre Philharmonique Royal de Stockholm : Herbert Blomstedt est arrivé pour les répétitions de la 3e symphonie de Honegger et de la 4e de Brahms pour le concert de mercredi et jeudi.
Herbert Blomstedt, âgé de 95 ans, avait supendu ses activités depuis qu'il a fait une chute en juin.
Après Stockholm, il se rendra à la Philharmonie de Berlin.

Deux oeuvres nouvelles pour les funérailles de la Reine Elisabeth

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La maîtresse de musique de la Reine, Judith Weir, et le compositeur écossais James MacMillan ont écrit de nouvelles œuvres pour les funérailles de la Reine.

Judith Weir déclare : Pour ce service funèbre, l'Abbaye de Westminster m'a demandé de mettre en musique les sept premiers versets du psaume 42, "Comme le cerf désire les ruisseaux, ainsi mon âme se languit de toi, ô Dieu". Les mots et la musique parlent d'abord de la grande tristesse de l'âme et de sa soif d'être rassurée par Dieu ;
mais au fur et à mesure que le psaume progresse, l'humeur devient plus calme et plus résolue, pour culminer dans la consolation, avec les mots "Mets-toi à l'aise".

James MacMillan, un fervent catholique romain, dit : Je suis honoré que mon hymne Who shall separate us, commandé pour cet événement, soit chanté lors de la cérémonie. 
Qui nous séparera de l'amour du Christ ? Ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les principautés, ni les pouvoirs, ni les choses présentes, ni les choses à venir, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu, qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur. Alléluia ! Amen.

Le Prix de la musique classique de la ville de Münster à trois jeunes ensembles

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Trois ensembles ont remporté cette année le prix de musique classique de la ville de Münster. Cette distinction, pour laquelle les premiers du concours fédéral "Jugend musiziert" pouvaient se porter candidats, est dotée d'un montant total de 6.000 euros ; le prix est attribué à parts égales aux lauréats.

19 jeunes musiciens étaient en lice, sept ensembles, du duo au quintette avec piano, qui s'étaient auparavant qualifiés pour participer au concours fédéral "Jugend musiziert" de cette année à Oldenburg. Les ensembles gagnants ont convaincu la commission de sélection par leur niveau musical constamment élevé. Les frères et sœurs Helene (violon), Albrecht (violoncelle) et Wilhelmine (piano) Freytag de Borsdorf ont été récompensés pour leur interprétation du Trio n°1 en ré mineur op. 49, Gesine Rotzoll (clarinette, Leipzig) et Viktor Satler (piano, Weimar) pour la sonate n° 2 en mi bémol majeur op. 120,2 de Johannes Brahms, ainsi que la violoniste Miriam Hutterer (Fribourg) pour la sonate n° 4 en la mineur op. 23 de Ludwig van Beethoven.

Le prix de musique classique de la ville de Münster s'adresse aux lauréats du concours fédéral "Jugend musiziert" et existe depuis 1989. Contrairement aux concours organisés aux niveaux régional, provincial et fédéral, les jeunes interprètes doivent jouer à Münster une œuvre en plusieurs mouvements de l'époque classique et montrer qu'ils sont capables d'interpréter une telle œuvre en plusieurs mouvements de manière cohérente. Le concours pour le prix de musique classique a permis de découvrir très tôt de nombreux musiciens de renommée internationale et a contribué à leur développement artistique grâce à l'argent du prix et à l'engagement pour des concerts : Alexej Gorlatch, piano (2005), Christoph Eß, cor (2003), Igor Levit, piano (2002), Claudius Müller, cor (2001), Violetta Kammerlocher, piano (2001), Christoph Altstaedt, piano (2000), Martin Helmchen, piano (1998), Konstanze von Gutzeit, violoncelle (1997), Herbert Schuch, piano (1994) ou Manuel von der Nahmer, violoncelle (1989), pour n'en citer que quelques-uns.

Alexandra Segal remporte le concours George Enescu

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La pianiste israelienne Alexandra Segal [Israël] a remporté le Premier Prix de la section piano du concours George Enescu de Bucarest, dont la phase finale a eu lieu hier, dimanche, au célèbre Athénée roumain.
Le Deuxième Prix a été attribué au Roumain George Todică et le Troisième Prix à Chun Lam U (Hong Kong, Chine).
La Fondation culturelle Erbiceanu a également décerné un prix d'une valeur de 2500 euros au pianiste roumain le mieux classé, George Todică.

Robert Casadesus, 50 ans

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Le pianiste et compositeur français Robert Casadesus, né le  à Paris 9e est décédé le  à Paris 14e.

Petit-fils de Luis, patriarche de la famille Casadesus originaire d'Espagne, Robert Casadesus est un des pianistes les plus importants du xxe siècle, représentant de la « tradition française » de la clarté et du « bon goût ».
Il entre au Conservatoire de Paris où il travaille avec Louis Diémer et où il remporte un 1er prix de piano en 1913. En 1918, il est appelé au service militaire. En 1919, il obtient un 1er prix d'harmonie dans la classe de Xavier Leroux. Il donne son premier récital en 1917. Il devient en 1922 l'ami de Maurice Ravel. Son répertoire, qui va de Wolfgang Amadeus Mozart à Olivier Messiaen, comprend tous les compositeurs francophones, mais aussi, par exemple, Béla Bartók, dont il est très tôt un interprète de choix.

Il joue souvent en duo avec Zino Francescatti, avec lequel il réalise des enregistrements marquants des sonates pour violon et piano de Beethoven.

Il épouse en 1921 Gabrielle L'Hôte (Gaby Casadesus), avec laquelle il donne des récitals à deux pianos ou à quatre mains. Ils auront une fille (Thérèse) et deux fils, Guy et Jean, ce dernier lui aussi pianiste, avec lequel ils formeront un trio pour l'interprétation de concertos pour trois pianos.

En 1935 il est nommé professeur au Conservatoire américain de Fontainebleau, dont il devient directeur en 1946.

Aux États-Unis, il sera célébré, et jouera sous la direction de grands chefs, notamment George Szell dont il est le pianiste préféré.

En 1972, son fils Jean meurt dans un accident de voiture. Il s'éteindra à son tour, probablement de chagrin, quelques mois plus tard.

Ses créations en tant qu'interprète :

  • Fantaisie pour piano et orchestre de Gabriel Fauré (1921)
  • Sonate pour alto et piano d'Arthur Honegger (1920), avec Henri Casadesus,
  • Sonatine V, alla francese, op.22 de Maurice Emmanuel (1925), dont il est le dédicataire,
  • Sonate pour violon et piano de Guy Ropartz (1927) avec Georges Enesco,
  • Trois pièces pour piano op. 49, d'Albert Roussel (1934), dont il est le dédicataire.

Arthur Honegger lui a dédié la dernière de ses Sept Pièces brèves (1920).

L'Espagne pleure une de ses grandes sopranos

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La soprano espagnole Ana María Sánchez est décédée à Elda ce samedi, à l'âge de 63 ans, des suites d'un cancer.Le maire d'Elda, Rubén Alfaro, a déploré la perte de l'une des figures artistiques les plus grandes et les plus importante, déclarant qu'elle nous laisse un grand vide en raison de ses qualités hmaines, de sa pertinence artistique et de l'amour et de la passion qu'elle avait pour Elda".

Ana María Sánchez a étudié le chant au Conservatorio Superior de Música Óscar Esplá à Alicante avec la soprano Dolores Pérez. Elle entre ensuite à l'Escuela Superior de Canto de Madrid où elle étudie avec Miguel Zanetti et obtient le Premio Extraordinario de fin de Carrera. Elle a fait ses débuts à Palma de Majorque avec l'opéra Nabucco de Verdi en 1994. Après son succès la même année dans le rôle de Mathilde dans Guillaume Tell au Teatro San Carlos de Lisbonne, elle reçoit de nombreuses invitations à se produire dans différents opéras. Elle a combiné ses représentations d'opéra avec des concerts et des récitals de musique de chambre et d'oratorio, notamment le Stabat Mater et le Te Deum d'Antonín Dvořák, la Neuvième Symphonie de Beethoven, La Mort de Cléopâtre de Berlioz, Les Quatre Derniers Chants de Strauss, le Gloria de Vivaldi, La Crèche de Pau Casals, ainsi que de nombreux concerts de musique espagnole. Tout au long de sa carrière, elle a chanté sur les principales scènes espagnoles telles que le Liceo de Barcelone, la Maestranza de Séville, le Real de Madrid, le Campoamor d'Oviedo et d'importants théâtres et auditoriums européens, dont l'Opéra de Zurich, le Staatsoper de Hambourg, le Bayerische Staatsoper de Munich, Deutsche Oper de Berlin, Opéra de Dresde, Festpielhaus de Salzbourg, Opéra du Rhin de Strasbourg, Opéra de Marseille, Maggio Musicale fiorentino, La Fenice de Venise, Teatro San Carlo de Lisbonne, brillant dans le répertoire verdien, bellinien et donizettien, et faisant d'importantes incursions dans le répertoire espagnol.

Elle a participé à des festivals tels que Ravenne, Wiesbaden, la Quincena Donostiarra de San Sebastián, le festival international de Santander, le festival international de musique des îles Canaries, le festival international de musique et de danse de Grenade, le festival de Peralada, etc. Elle a interprété les rôles titres d'Adriana Lecouvreur, Norma, Tosca, Anna Bolena, Lucrezia Borgia, Aida, Gernika, María del Carmen, Ildegonda, ainsi que Mathilde dans Guillaume Tell, Donna Anna dans Don Giovanni, Leonora di Vargas dans La forza del destino, Leonora di Sesé dans Il trovatore, Elisabetta di Valois dans Don Carlo, Amelia dans Un ballo in maschera, Liù dans Turandot, Rosario dans Goyescas, Rosa dans Maror, Salud dans La vida breve, Lore dans Zigor, Lady Clifford dans Henry Clifford, Chrysotemis dans Elektra, Abigaille dans Nabucco, Desdemona dans Otello, Elisabeth dans Roberto Devereux, Marguerite dans Mefistofele, Elisabeth dans Tannhäuser, Anna dans Le Villi, Valentine dans Les Huguenots, Sita dans Le roi de Lahore, Bruja/Blanca dans La Bruja, Rosa dans Juan José, Maria dans Roger de Flor, etc.

En février 2005, elle a été nommée Académica Numeraria de la Real Academia de Bellas Artes de San Carlos de Valencia. En 2009, Sa Majesté le Roi Juan Carlos Ier lui a décerné l'Encomienda de Número de la Real Orden del Mérito Civil qui lui a été remise lors d'une cérémonie organisée au Palais royal de Madrid le 2 juin 2009.

Laetitia Casta en Clara Haskil

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Sous le titre "Clara Haskil, prélude et fugue", l'Opéra de Montpellier programme, le 5 octobre, un spectacle de théâtre musical avec l'actrice Laetitia Casta qui incarnera la grande pianiste roumaine Clara Haskil.
Le texte, de Serge Kribus, est mis en scène par Safy Nebbú et le piano est joué par Isil Bengi. Son ami Charlie Chaplin a confié un jour qu'il n'avait rencontré que trois génies dans sa vie : Einstein, Churchill et Clara Haskil. Elle était l'une des plus grandes pianistes du XXe siècle. Une simple jeune fille roumaine qui s'est consacrée, avec un seul doigt, à reproduire au piano une mélodie de Schumann jouée par sa mère. Soixante ans plus tard, après d'innombrables épreuves, elle est enfin reconnue à sa juste valeur, donne de nombreux concerts et voyage dans le monde entier.
Serge Kribus était fasciné par le mystère lumineux de Clara. Il s'est penché sur les archives, a fait des recherches minutieuses, moins pour résoudre l'énigme que pour rêver un portrait sur scène de cette femme étrange qui fut pour tant d'auditeurs une source de joie incomparable, explique le théâtre dans la présentation du spectacle.

Concours Enescu, les finalistes de la section piano

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Les trois finalistes de la section piano du Concours George Enescu 2022 ont été départagés vendredi soir par le jury d'experts, en présence du directeur artistique du Concours et Festival International George Enescu, le chef d'orchestre Cristian Măcelaru. Les trois jeunes musiciens d'Israël, de Roumanie et de Hong Kong (Chine) interpréteront des œuvres de Prokofiev, Beethoven et Schumann lors de la finale du Concours qui aura lieu le 18 septembre à 18h00 à l'Athénée roumain.
Au cours de la finale, les lauréats de la section composition seront également annoncés, y compris le prix de l'originalité, décerné pour la première fois lors de cette édition du concours.

Les demi-finales du Concours international " George Enescu " 2022, section piano, ont eu lieu les 15 et 16 septembre, à l'Athénée roumain de Bucarest, en présence du directeur artistique du Concours et Festival international George Enescu, le chef d'orchestre Cristian Măcelaru. Les concurrents qualifiés pour la grande finale du Concours pour la section piano. Ils sont, par ordre alphabétique :

Alexandra Segal (Israël),
George Todică (Roumanie)
Chun Lam U (Hong Kong, Chine).

Décès de Jörg Faerber

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Le fondateur de l'Orchestre de Chambre du Wurtemberg de Heilbronn (WKO), le chef d'orchestre Jörg Faerber, est décédé à l'âge de 93 ans.

Jörg Faerber est né en 1929 à Stuttgart. Après avoir passé son examen de Kapellmeister à la Staatliche Hochschule für Musik de Stuttgart de 1954 à 1962, il a travaillé comme directeur musical du théâtre de Heilbronn.
En 1960, il a fondé l'Orchestre de Chambre du Wurtemberg, qu'il a mené à une renommée internationale. Des artistes comme Anne-Sophie Mutter, Maurice André, Barry Tuckwell, Martha Argerich, Rudolf Buchbinder, Gidon Kremer, Hermann Baumann et Alfred Brendel ont joué avec lui.
La plupart des plus de 500 enregistrements de disques et de CD réalisés par l'orchestre sont le fruit de son initiative. Faerber a également été chef d'orchestre invité auprès d'orchestres symphoniques allemands, autrichiens, italiens, français, roumains et tchèques, et a notamment dirigé des orchestres de la BBC anglaise et l'English Chamber Orchestra.

Faerber a cessé ses activités en 2002, après 42 ans en tant que directeur artistique et directeur général. La même année, le WKO l'a nommé chef d'orchestre honoraire. Il a dirigé son dernier concert le 18 juin 2009.