Arturs Maskats, un compositeur habile
Arturs Maskats (°1957) : Tango, Concerto pour accordéon « What The Wind Told Over the Sea », Cantus diatonicus, « My River runs to thee… » (Homage to Emily Dickinson). Ksenija Sidorova, accordéon ; Orchestre symphonique national de Lettonie, direction : Andris Poga. 2023 - Textes de présentation en anglais - 53’52 - Ondine ODE1419-2
En voyant arriver un enregistrement d’oeuvres d’un compositeur letton contemporain, on s’attend à entendre quelque chose de minimaliste, rigoureux et décanté dans le sillage de Pēteris Vasks ou d’autres auteurs baltes contemporains comme Arvo Pärt ou Erkki-Sven Tüür (pour ne citer qu’eux).
Eh bien non, entièrement formé dans son pays natal, Arturs Maskats représente un courant tout à fait traditionnel et propose une musique habilement écrite, de bonne facture, fermement ancrée dans la tradition et -osons l’avouer- moyennement intéressante.
De toutes les oeuvres de ce disque, c’est la plus ancienne, le Cantus diatonicus de 1982 qui se rapproche le plus de l’image que l’on se fait de la musique contemporaine balte, avec son côté un peu planant, et ses interventions solennelles de cuivres sur fond de cordes. Le doute n’est pas permis : Arturs Maskats sait écrire pour orchestre, même si sa musique -et le reste du programme le confirmera- a quelque chose de convenu.
Inspiré par un voyage en Italie, le Tango montre à nouveau le solide métier de Maskats dont l’écriture rappelle par moments fortement le langage ouvertement néo-romantique des grands compositeurs de musique de films de l’âge d’or d’Hollywood, comme Korngold ou Rozsa, dans son lyrisme généreux et son orchestration très efficace. La bonne surprise est offerte par les discrètes et finement mélancoliques interventions d’un accordéon solo.
Le Concerto pour accordéon, écrit pour l’exceptionnelle virtuose lettonne Ksenija Sidorova, n’hésite pas à puiser dans la boîte à clichés pour nous offrir un piano à bretelles proprement montmartrois, tour à tour langoureux et entraînant. Maskats se montre très habile dans sa façon d’évoquer une atmosphère un peu nostalgique que n’auraient pas reniée un Francis Lai ou un Yann Tiersen et termine joliment l’œuvre sur une cadence méditative et une belle note de douceur.
My River runs to thee… est un hommage rendu à la grande poétesse américaine Emily Dickinson (1830-1886), le titre de cette composition d’assez vastes dimensions (16’31) étant la première ligne d’un poème cité en entier dans la notice. L’oeuvre est dédiée à Andrejs Zagars, ex-directeur de l’Opéra national de Lettonie et ami du compositeur qui décéda en 2019 alors que Maskats mettait la dernière main à l’oeuvre.
La musique se montre ici tour à tour emportée et romantique mais aussi sereine et réfléchie, voire méditative. Par moments, Maskats quitte sa zone de confort néo-romantique pour offrir des passages plus astringents qui rappellent Copland ou Roussel.
On ne dira que du bien des interprètes qui s’engagent à fond dans la défense de la musique de leur compatriote, l’Orchestre Symphonique national letton faisant preuve d’un très bon niveau sous la direction énergique et enthousiaste du chef Andris Poga dans un enregistrement qui bénéficie par ailleurs d’une très belle prise de son dans les meilleures traditions de l’éditeur finlandais Ondine.
Son 10 - Livret 8 - Répertoire 6 - Interprétation 9