Deux sonates monumentales

par https://www.crescendo-magazine.be/summer-waves-filter-hook-up/

Paul DUKAS (1865-1935)
Sonate en mi bémol mineur
Jean BARRAQUÉ (1828-1973)
Sonate pour piano
Françoise THINAT (piano)
ADD–2015–46’ 22’’ et 40’ 30’’–Textes de présentation en français et en anglais–Disques FY & du SOLSTICE SOD 315/6Il existe de nombreux points communs entre Paul Dukas et Jean Barraqué : non seulement ils sont français tous les deux, mais ils sont des compositeurs économes. Paul Dukas par tempérament et parce qu’il ne se résignait pour ainsi dire à ne donner que des chefs-d’œuvre ; Jean Barraqué parce qu’il voulait faire longuement mûrir en lui chacun de ses projets musicaux et parce qu’il est mort à l’âge de quarante-cinq ans (il n’a laissé que six opus). Et puis ils n’ont, l’un et l’autre, écrit qu’une seule et unique sonate pour piano, mais de vastes proportions. Celle de Paul Dukas date de 1900. Quand on en parle, on cite presque toujours le nom sacré de Beethoven, précisément à cause de son extrême longueur (plus de quarante-six minutes), mais son écriture ne doit rien au romantisme et possède des accents très originaux – des accents propres au compositeur de La Péri et de L’Apprenti Sorcier, très perceptibles par exemple dans le troisième des quatre superbes mouvements.
Le nom sacré de Beethoven, on le cite aussi la plupart du temps dès qu’il est question de la Sonate pour piano de Jean Barraqué. Toute sa vie durant, Jean Barraqué a en effet été comme obsédé, comme hanté, par le maître de Bonn, et il ne fait aucun doute que cette Sonate, qu’il a achevée à vingt-quatre ans, en est l’expression la plus radicale. À l’instar de l’Opus 111, elle n’a d’ailleurs que deux mouvements. Dense, austère, presque rébarbative par moments, elle tisse tout un réseau de sonorités rares et insolites, avant de s’achever dans un dépouillement proche du silence. Dans le présent coffret de deux disques, on peut l’entendre dans la version de Françoise Thinat, qui l’a travaillée avec Jean Barraqué lui-même en 1971, avant de l’exécuter en concert à l’ORTF, en février 1972. C’est également de 1972 que date son enregistrement de la Sonate en mi bémol mineur de Paul Dukas. Ces deux interprétations sont remarquables et font regretter que la discographie de Françoise Thinat ne soit guère abondante (entre autres des œuvres pour piano de Claude Debussy, de Déodat de Séverac et de Guy Ropartz).
Jean-Baptiste Baronian

Son 8 – Livret 7 – Répertoire 8 – Interprétation 9

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