Elizabeth Sombart à propos de Beethoven 

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La pianiste Elizabeth Sombart publie une intégrale des Concertos pour piano de Beethoven accompagnée par le Royal Philharmonic Orchestra sous la direction de Pierre Vallet. A cette occasion, la musicienne nous parle de Beethoven mais également de la Fondation Résonnance qu’elle a créée.  

Qu’est-ce qui vous a poussé à enregistrer l’intégrale des Concertos pour piano de Beethoven ? 

Pour moi, enregistrer les cinq concertos de Beethoven et le triple ont été un vrai défi mais surtout l’aboutissement d’une vie de travail où Beethoven m’a accompagné dans mes concerts et dans mes enseignements. Lorsque le RPO m’a proposé cet enregistrement, j’ai surtout aimé l’idée de les enregistrer l’un après l’autre comme on se prépare pour la montée de l’Everest.

Est-ce qu’il y a une manière particulière de se préparer à l’enregistrement d’une telle somme musicale ? 

Il y a deux aspects dans la préparation, l’aspect physique bien sûr, se mettre dans une forme presque athlétique, sport, alimentation, sommeil et aussi bien sûr spirituel : autant de gammes intérieures que de gammes extérieures. 

Certains propos de Beethoven, de Friedrich Nietzsche ou de Victor Hugo ont été pour moi, comme le dit le philosophe, un évangile de l’Harmonie. « Ce sourd entendait l’infini » a dit Victor Hugo, et cela a nourri mon écoute intérieure.

Comment évolue le langage musical de Beethoven entre le Concerto n°1 et le Concerto n°5 ?

Pour moi l’évolution majeure, à part la complexification de l’écriture, est une évolution spirituelle. Du Concerto n°1 qui porte déjà potentiellement toutes les couleurs des souffrances de l’âme humaine jusqu’au Concerto n°5 qui nous permet de vivre l’expérience de la mort dans un des plus longs pianissimos de Beethoven, à la fin du 2e mouvement, à la résurrection, sortie d’une zone d’ombre épaisse et sans espoir. Seule une note du cor dans le lointain ouvre une renaissance quasi-miraculeuse.

Pour cette intégrale, vous collaborez à nouveau avec le chef d’orchestre Pierre Vallet. Qu’est-ce qui vous séduit dans son approche de Beethoven ? 

Pierre Vallet est l’un de ces rares chefs d’orchestre qui ont le don d’écouter vraiment et qui savent accompagner un soliste. Son approche de la musique est profonde et il apporte un grand soin aux détails. Nous avons pris beaucoup de temps pour nous préparer à cet enregistrement. Nous avons parlé de chaque mesure, de chaque phrase, nous avons exploré la matière musicale sous tous ses aspects. Pierre m’a permis de réaliser ma vision artistique et spirituelle de ces concertos, et il a su la communiquer au RPO avec lequel il a de très bons rapports. 

Vous avez étudié avec le grand Bruno Leonardo Gelber. Est-ce que ses enregistrements de Beethoven sont des modèles pour vous ? Par extension, est-ce que vous avez écouté d’autres enregistrements de ces concertos pour préparer le vôtre ? 

Les enregistrements de Bruno Leonardo Gelber sont bien sûr pour moi une référence lumineuse. J’ai écouté par ailleurs pratiquement tous les enregistrements à notre disposition. Je retiens par exemple Edwin Fischer pour le Concerto n°5, mais aussi Alfred Cortot pour le mouvement lent du Concerto n°1.

Après cet enregistrement, vous allez donner ces concertos en concert à Londres, avec la même Royal Philharmonic et Pierre Vallet. Est-ce que certaines options d’interprétations vont changer par rapport à l’enregistrement ? 

Dans l’interprétation « live », il y a des moments de grâce et d’inspiration qui nous sont donnés dans l’instant. C’est la magie du concert, car la musique est avant tout un art qui s’inscrit dans l’ici et le maintenant, dans une relation directe avec le vivant. Puissent les disques donner envie aux amateurs de venir les écouter au concert. Le disque ne devrait être qu’une amorce et non une fin en soi.

Vous avez également créé la Fondation Résonnance. Pouvez-vous nous parler de ce projet ? 

Justement, une des missions de la Fondation Résonnance est d’offrir des concerts de grande qualité dans les lieux où les personnes en sont privés (hôpitaux, prisons, établissement pour personnes âgées, camps de réfugiés…). La Fondation organise des centaines de concerts par an depuis plus de 20 ans et nous pouvons dire aujourd’hui que la musique classique n’est pas seulement une consolation mais une réponse attendue par tous, quel que soit leur milieu social, culturel et psychologique. La musique classique est la beauté de l’économie. Par elle, l’homme accède en lui à ce qui est plus grand que lui.

Le site d’Elizabeth Sombart : http://www.elizabethsombart.com/

A écouter :

Ludwig van Beethoven : intégrale des Concertos pour piano. Elizabeth Sombart, piano ; Royal Philharmonic Orchestra, Pierre Vallet. 1 coffret Signum Records.

 

 

Propos recueillis par Pierre-Jean Tribot

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