Festival Musical de Dresde (2/3). Les Prix Européens Taurus. L’Orchestre des Jeunes de l’Union Européenne : une jeunesse perpétuée
L’European Union Youth Orchestra (EUYO) – l’Orchestre des Jeunes de l’Union Européenne : une belle rencontre.
Une rencontre un peu étrange dans ses modalités : elle avait commencé à l’occasion du vol vers Dresde. A l’escale de Munich, j’avais remarqué deux violoncellistes évidemment accompagnées de leurs instruments (le voyage à deux billets est onéreux pour ces musiciens-là), manifestement réjouies de se retrouver pour un voyage commun, et vite rejointes par d’autres jeunes gens aux sacs à dos spécialement conçus pour des instruments de musique. Ils étaient de nationalités différentes, pratiquaient tous l’espéranto-anglais, et avaient la même destination, Dresde. Pas de doute, ils appartenaient à l’orchestre qui justifiait en partie mon déplacement.
Effectivement, je les ai retrouvés deux jours plus tard, dans le cadre magnifique de la Frauenkirche, non pas pour un concert qui leur serait exclusivement consacré, mais chargé de « l’accompagnement musical » de la remise solennelle des Taurus 2018, des Prix Européens de la Culture. Leur orchestre, qui fête ses quarante ans, était sur la liste des élus. Avec notamment la chanteuse Nana Mouskouri, le rockeur allemand Peter Maffay, le comédien Daniel Brühl, le ténor Piotr Beczala, le plasticien Gerhard Richter, l’intendant du Festival de Dresde Jan Vogler, le ballet du Semperoper et le Prince Albert II de Monaco, pour ses engagements en faveur du développement durable. Plutôt éclectique n’est-ce pas.
« Accompagnement musical » ? Bien plus que cela évidemment dans la mesure où, ponctuant les laudatio et remises de prix, ils partageaient l’estrade avec Piotr Becszala, Annette Dasch, Daniel Pope, Jan Vogler, le Dresdner Kreuzchor, sous la baguette de Vasily Petrenko. De quoi apprécier leur engagement souriant et surtout la qualité de leur prestation.
40 ans d’une jeunesse perpétuée ! Ils sont plus de 3000 à s’être assis dans ses rangs, après s’être distingués lors d’auditions préalables très sélectives.
Quelle est belle et prometteuse cette Europe-là, une Europe qui agit, conjuguant jeunesse et talent, trouvant dans la musique un langage commun. Ces jeunes musiciens ont eu chez eux leurs premiers « maîtres ». Ensuite, le plus souvent, ils sont allés en chercher d’autres ailleurs. Pour se réunir finalement dans cet orchestre sous la baguette de mentors incontestés : Claudio Abbado, Vladimir Ashkenazy, Bernard Haitink et aujourd’hui Vasily Petrenko.
Leur Prix Taurus est bienvenu dans la mesure où il place l’Orchestre sous les projecteurs : il y a deux ans, une réforme du système des subventions européennes avait failli le condamner ! Heureusement, un peu partout, des voix s’étaient alors élevées pour mettre en évidence son importance autant réelle que symbolique. Tout doit être fait en effet pour soutenir tout ce qui, jour après jour, concrétise l’idée européenne, et surtout quand il s’agit, non pas de balances de paiements, mais d’humanité partagée !
J’en reviens à l’escale de Munich : oui, elle était bien là l’Europe désirée, dans la rencontre souriante de ces jeunes musiciens arrivant d’un peu partout et prenant tous la même direction !
Stéphane Gilbart
Dresden, du 5 au 9 juin 2018