La sombre noirceur mahlérienne de Prokofiev 

par

Serge Prokofiev (1891-1953) : Symphonie n°5 en si bémol majeur, Op.100.  Cleveland Orchestra, direction :  Franz Welser-Möst. 2021. TCO-0006

Franz Welser-Möst, au pupitre de ses musiciens du Cleveland Orchestra, et dans le cadre de leur label en auto-production a amorcé un projet autour des symphonies de Prokofiev. Les Symphonies n°2 et n°3 sont déjà publiées et une Symphonie n°4 (dans la version révisée de 1947) est annoncée pour décembre 2023.

Cette Symphonie n°5, captée en concert en octobre 2021, est actuellement exclusivement proposée en format numérique.

Le Cleveland Orchestra joue à domicile avec cette Symphonie n°5 dont il a gravé deux versions de référence sous les baguettes de Georges Szell (Sony) et Lorin Maazel (Decca). Cette dernière interprétation, bénéficiant d’un son de démonstration Decca, est certainement l’une des plus grandes réussites du chef américain lors de son mandat décrié à la tête de la phalange de l’Ohio. 

De son côté, Franz Welser-Möst est un chef étonnant qui se plaît à surprendre lorsqu’il sort de son répertoire austro-allemand dans lequel il reste très inégal.  On aurait pu craindre qu’il passe à côté du sujet de cette Symphonie n°5 qu’il ne faut pas limiter à une démonstration d’orchestre grandiloquente, valorisation musicale d’une URSS triomphante et parangon d'un soviétique omnipotent.

 Dès les premières notes, le chef autrichien impose un ton noir et dramatique. L’Andante initial revêt des teintes mahleriennes pas si éloignées d’un tragique funèbre de la Symphonie n°5 de Mahler. Le niveau technique phénoménal du Cleveland Orchestra permet au chef de travailler la densité du matériau instrumental et de soigner la dynamique des climax. L'œuvre de Prokofiev sort grandie d’un tel traitement dramaturgique. Franz Welser-Möst peut jouer de l'orchestre tant dans les détails (incroyables pupitres de vents) que dans les tutti. 

Somptueusement enregistrée, cette version complète utilement une discographie de très haut vol portée par les lectures de Guennadi Rojdestvenski (Melodya), Herbert von Karajan (DGG), Leonard Bernstein (Sony),  Mariss Jansons (Chandos et RCO) et bien sur George Szell et Lorin Maazel, avec ce même orchestre de Cleveland. 

Son : 10  Notice : 8  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Pierre-Jean Tribot

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